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Sir Nigel

Sir Nigel

Titel: Sir Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arthur Conan Doyle
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il a femme et enfants, mon
Frère ! protesta faiblement l’abbé, qui avait bon cœur mais
s’en laissait facilement imposer par son subalterne, plus
intransigeant.
    – C’est vrai, Révérend Père. Mais si je
devais fermer les yeux sur lui, comment pourrais-je alors réclamer
la redevance des ségrais aux forestiers de Puttenham, ou le fermage
dans les hameaux ? Une pareille nouvelle se répandrait de
maison à maison, et qu’adviendrait-il alors de la richesse de
Waverley ?
    – Qu’y a-t-il d’autre, Frère
Samuel ?
    – Il y a la question des étangs.
    Le visage de l’abbé s’illumina : c’était
là un sujet sur lequel il faisait autorité. Si la règle de l’ordre
l’avait privé des douces joies de la vie, il n’en avait qu’un plus
grand penchant pour celles qui lui restaient.
    – Comment se portent nos ombles
chevaliers, mon Frère ?
    – Ils prospèrent, Révérend Père, mais les
carpes ont péri dans le vivier de l’abbé.
    – Des carpes ne vivent que sur un fond de
gravier. Et puis il faut les mettre dans de justes
proportions : trois mâles laités pour une femelle œuvée, Frère
procureur. De plus, l’endroit doit se trouver à l’abri du vent,
être rocailleux et sablonneux, avoir une aune de profondeur, et des
saules et de l’herbe sur les bords. De la vase pour la tanche et du
gravier pour la carpe.
    Le procureur s’inclina avec le visage de
quelqu’un qui va annoncer une mauvaise nouvelle.
    – Il y a du brochet dans le vivier de
l’abbé.
    – Du brochet ! s’exclama l’abbé
horrifié. Autant enfermer un loup dans notre bergerie ! Mais
comment peut-il y avoir du brochet dans l’étang ? Il n’y en
avait point l’an passé, et le brochet, que je sache, ne tombe point
avec la pluie, pas plus qu’il ne pousse comme les fleurs au
printemps. Il nous faut drainer l’étang, sans quoi nous risquons
fort de passer tout le carême au poisson séché et de voir tous les
Frères frappés du grand mal avant que le dimanche de Pâques ne
vienne nous délivrer de l’abstinence.
    – Le vivier sera drainé, Révérend Père,
j’en ai déjà donné l’ordre. Nous planterons ensuite des herbes
potagères sur la vase du fond et, après les récoltes, nous
ramènerons eau et poissons du vivier inférieur, afin qu’ils
puissent se nourrir des déchets qui resteront.
    – Très bien ! s’exclama l’abbé.
J’ordonnerai qu’il y ait dorénavant trois viviers dans chaque
maison ; un asséché pour les herbes, un creux pour le frai et
les alevins, et un autre, plus profond, pour les reproducteurs et
les poissons de table. Mais je ne vous ai toujours point entendu
dire comment un brochet s’en est venu dans notre vivier.
    Un spasme de colère passa sur le fier visage
du procureur et les clés grincèrent sous sa main osseuse qui les
serrait plus fortement.
    – Le jeune Nigel Loring ! dit-il. Il
a juré de nous faire grand tort et c’est ce qu’il a fait !
    – Comment le savez-vous ?
    – Il y a six semaines, on l’a vu, jour
après jour, pêcher le brochet dans le grand lac de Frensham. Par
deux fois, durant la nuit, on l’a rencontré sur le Hankley Down
tenant une botte de paille sous le bras. Je gagerais que la paille
était mouillée et qu’au milieu se trouvait un brochet vivant.
    L’abbé secoua la tête.
    – On m’a souvent parlé des façons
sauvages de ce jeune homme, mais cette fois il a dépassé les
bornes, si ce que vous me dites est vrai. C’était déjà bien assez
d’abattre, à ce qu’on prétendait, les cerfs du roi dans la chasse
de Woolmer ou de rompre les os au colporteur Hobbs, qui en était
resté sept jours durant à l’article de la mort dans notre
infirmerie et n’a dû la vie qu’aux compétences en simples du frère
Peter. Mais glisser un brochet dans notre vivier !… Pourquoi
donc nous jouerait-il un tour aussi diabolique ?
    – Parce qu’il hait la maison de Waverley,
Révérend Père. Il prétend que nous nous sommes emparés indûment des
terres de ses pères.
    – Point sur lequel il ne se trompe pas si
lourdement…
    – Mais, Révérend Père, nous ne possédons
rien de plus que ce qui nous a été octroyé par la loi.
    – Très juste, mon Frère, mais, entre
nous, reconnaissons que le poids d’une bourse a de quoi faire
pencher le bon plateau de la balance de la Justice. Du jour où je
suis passé devant cette maison et où j’ai vu la vieille femme aux
joues rouges dont les yeux

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