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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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organisme
fantomatique.
    Le 11 avril 1946, Staline adresse à tous les
membres du Bureau politique et à quelques chefs militaires un acte d’accusation
contre Chakhourine et ses adjoints, accusés de s’être mis d’accord pour livrer « des
avions de mauvaise qualité en les faisant passer pour des avions de bonne
qualité, tromper le gouvernement et recevoir des récompenses pour
"exécution" et "dépassement du plan", ce qui a mené nos
aviateurs à la mort [1317]  ».
Novikov les a couverts et protégés en imposant le silence à ses subordonnés.
Staline transmet régulièrement aux membres du Bureau politique, ainsi tenus
sous pression, les procès-verbaux d’interrogatoires qu’il suit de près. Les 10
et 11 mai 1946, le collège militaire de la Cour suprême condamne les
accusés à une peine définie par Staline. Ils sont convaincus de s’être entendus
pour équiper massivement les forces aériennes « d’avions et de moteurs
notoirement défectueux […], ce qui a conduit à toute une série d’accidents et
de catastrophes dans les unités des forces aériennes, ayant entraîné la mort d’aviateurs [1318]  ». Les
faits sont exacts, mais le seul responsable en est Staline ; il exigeait
des délais de livraison intenables, à l’origine de la négligence des opérations
de vérification et de contrôle. Pour ce sabotage collectif et meurtrier, les
accusés sont condamnés à des peines légères hiérarchiquement décroissantes :
Chakhourine écope de sept ans de camp, Novikov et ses adjoints de six, cinq,
quatre et trois ans ; les deux derniers de deux ans ! C’est
inhabituellement peu pour de si grands crimes. Les accusés ne sont intéressants
pour Staline que dans la mesure où ils lui permettent de frapper des cibles
plus élevées. Dans sa lettre à Beria d’avril 1953, Novikov affirmera qu’il
n’a pas rédigé la déclaration qui lui est attribuée et n’en connaît pas l’auteur.
Elle n’a pu être dictée que par Staline, qui l’utilise aussitôt contre Joukov.
    Novikov accuse Joukov d’avoir voulu s’attacher
personnellement certains chefs militaires et de s’être efforcé, « sous une
forme très rusée et prudente, de diminuer le rôle dirigeant du Commandant
suprême pendant la guerre [1319]  »
(Staline, dont le nom comme celui de Dieu ne saurait être prononcé), tout en
exagérant son propre rôle. À l’en croire, Joukov s’attribuait le mérite des
victoires de Stalingrad, de Leningrad, de Moscou, de Koursk, et de la prise de
Berlin, parlait avec dédain du Commandant suprême et critiquait certaines de
ses décisions. Le 3 juin, Joukov est destitué de ses fonctions de
commandant en chef des forces terrestres et de vice-ministre de la Défense de l’URSS
et nommé commandant du district militaire d’Odessa. Staline prépare avec
Boulganine et Vassilevski un ordre (resté secret) du ministre des Forces armées
de l’URSS, en date du 9 juin 1946, qui accuse Joukov d’avoir « perdu
toute modestie », de s’être laissé « emporter par l’ambition
personnelle », de s’être « attribué, dans des conversations avec des
subordonnés, l’élaboration et la mise en œuvre de toutes les opérations
essentielles de la grande guerre patriotique y compris de celles auxquelles il
n’a pas pris part [1320]  »,
etc. On sent la hargne de l’homme de bureau pour le chef militaire dont les
lauriers lui sont à jamais inaccessibles.
    La généralisation du nationalisme russe, orchestré par ses
soins pendant la guerre, à tous les domaines de l’existence est un dérivatif,
un camouflage et un nouvel instrument d’épuration. Il en fait le nouveau
critère de la « position juste » en remplacement des critères
politiques « bolcheviks » d’antan. Ce transfert parachève la
transformation du Parti d’organisme politique en appareil administratif chargé
d’appliquer des décisions prises en secret par ses sommets. C’est pourquoi, le 9 février 1946,
Staline fait aux électeurs de la circonscription de Moscou où il est candidat à
la députation une déclaration à première vue surprenante : « La seule
différence entre les sans-parti et les militants du Parti, c’est que les uns
sont membres du Parti et les autres non, mais ce n’est qu’une différence
formelle [1321] . »
C’est pourquoi il oublie de convoquer un congrès de ce parti, dont les statuts
prévoient pourtant une réunion annuelle. À quoi bon en

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