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Staline

Staline

Titel: Staline Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie,Jean-Jacques
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Staline, avant de partir en vacances, s’attache
à mettre au pas l’intelligentsia à qui la guerre, paradoxalement, a fourni un
espace de liberté nouveau. Les soirées littéraires où certains écrivains mal
vus du régime, comme Akhmatova, avaient été ovationnés, témoignaient, selon l’écrivain
Constantin Simonov, d’un souffle de liberté excessif aux yeux de Staline :
« Il y avait là un peu de tapage, un soupçon de fronde, fondés sur une
appréciation erronée de la situation et sur l’assurance que les frontières du
permis s’élargiraient silencieusement et que se rétréciraient celles de l’interdit
au lendemain de la guerre [1323] . »
Staline ne peut accepter cet assouplissement, susceptible de se transformer en
faille béante. Il stimule à cette fin l’énergie, à son goût défaillante, de
Jdanov. Une réunion du Bureau d’organisation, le 9 août, en présence de
Staline, prépare le décret du 14 août 1946 qui condamne deux revues (Zvezda et Leningrad) et trois écrivains (Akhmatova, Zochtchenko, Khazine) de
cette capitale du Nord qu’il déteste parce qu’elle a été le foyer de la
révolution, puis d’une fronde, certes intermittente, mais récurrente.
    Staline dirige la réunion ; il y dénonce violemment
Zochtchenko, l’auteur des Aventures d’un singe, raillerie amusante des
embarras de la vie soviétique, qui incitent un singe échappé du zoo à retourner
dans sa cage, et Anna Akhmatova, dont la poésie lyrique est fondamentalement
intimiste. L’accusation qu’il porte contre la rédaction des deux revues esquisse
le futur leitmotiv de la campagne anticosmopolite, qui va dominer la vie
culturelle et politique à partir de l’hiver 1948-1949. Se tournant vers le
rédacteur en chef de la revue Leningrad, Likharev, qui tente de se
défendre, Staline lui reproche son attitude obséquieuse devant les écrivains
étrangers, envers lesquels il se comporterait comme un élève devant des
professeurs, et il l’interpelle : « Est-ce que c’est digne d’un
citoyen soviétique de marcher sur la pointe des pieds devant l’étranger ?
Vous encouragez ces sentiments d’obséquiosité. C’est un grand péché. Vous
inoculez le goût d’un respect exagéré vis-à-vis des étrangers. Vous inoculez le
sentiment que nous sommes des gens de deuxième catégorie, et que là-bas, ce
sont des gens de première catégorie [1324] . »
La revue Leningrad est supprimée. Un décret du 14 août condamne
Akhmatova, que Jdanov qualifie de fornicatrice et de nonne (poétiques) à la
fois, et Zochtchenko, qui seront exclus, peu après, de l’Union des écrivains.
Avec cette liquidation, Staline efface symboliquement à la fois la référence à
la ville et à Lénine. Lors d’une réunion à Leningrad, pour saluer ces
décisions, Likharev affirme que la suppression de sa revue a été le plus beau
jour de sa vie.
    La seconde partie de la réunion du 9 est consacrée au
cinéma. Jdanov, mis à mal dans la première partie, dénonce le film Une
grande vie, consacré à la reconstruction du Donbass. Il a décompté le
nombre de fois – scandaleux (sept) – où un personnage boit. À la fin
de la réunion, les Léningradois se retrouvent dans le couloir. Jdanov les
rejoint et tente de les réconforter. Soudain Staline apparaît et demande sur un
ton badin : « Pourquoi les Léningradois font-ils bande à part [1325]  ? »
Faire bande à part, c’est le début d’une fraction. Jdanov, effrayé, s’éloigne
aussitôt. La phrase de Staline prendra tout son sinistre sens deux ans plus
tard. La normalisation vise tous les domaines de la vie intellectuelle. Le 26 août,
une nouvelle résolution du Comité central dénonce les insuffisances du
répertoire des théâtres dramatiques. Une troisième résolution du 4 septembre
condamne quatre films soviétiques : Une grande vie, L’Amiral Nakhimov,
Des gens ordinaires, et la deuxième partie d’Ivan le Terrible.
    Fin août, Staline reprend la route de Sotchi. Avant son arrivée,
Beria a demandé au responsable de la Sécurité d’État de la région de prendre
les mesures nécessaires. Celui-ci établit entre la gare de Sotchi et la datcha
de Staline 180 postes de surveillance. « Toute la route est sous
protection », peut-il assurer. Il a, de plus, « activement étudié et
surveillé les éléments antisoviétiques enregistrés à la section [de la
Sécurité] de Sotchi ». Enfin « les arrestations suivent

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