Sur ordre royal
servante l’avait conduite était étonnamment confortable, bien qu’un peu poussiéreuse. Les meubles — un lit ceint de rideaux, une petite table de bois, un tabouret et une table de toilette — étaient anciens, mais bien cirés. Les tentures du lit, teintes dans un bleu vibrant, étaient accrochées à des anneaux de bronze. L’absence de pichet et de linge sur la table de toilette suggérait que la pièce n’avait pas été utilisée récemment.
Peut-être la gardait-on pour des invités, et que le seigneur avait une chambre plus belle dans une autre partie du château.
Elle alla à l’étroite croisée et regarda dehors. D’ici, on n’apercevait que la courtine intérieure, une vue qui n’était guère réjouissante. D’un autre côté, elle n’avait nullement besoin de voir plus qu’elle n’avait déjà vu de ce domaine. Après tout, n’était-elle pas destinée à quitter Llanpowell très bientôt ?
Même si elle ne souhaitait pas courroucer le roi par un refus direct, elle était prête à le faire si cela s’avérait nécessaire. Elle préférerait essuyer le courroux de John plutôt que d’épouser un homme au caractère emporté,peut-être violent, qui la rendrait malheureuse. Elle avait vécu cette existence une fois ; elle ne recommencerait pas.
Elle entendit de lourdes bottes qui montaient rapidement l’escalier et se tourna vers la porte juste comme sire Alfred la franchissait en trombe.
— Par tous les saints, ma dame ! déclara-t-il en entrant dans la chambre sans y avoir été invité. Dire que je me suis senti désolé pour vous !
Il s’arrêta, les poings sur les hanches, la fusillant du regard.
— Qui pensez-vous être ?
— Je suis dame Roslynn de Werre, fille de dame Eloïse et de sire James de Briston, répondit-elle, n’ayant peur ni de sire Alfred ni de sa colère.
Il avait très peu de pouvoir sur elle ici, si loin du roi.
Sa réponse calme n’atténua pas l’exaspération du noble normand.
— A quelle sorte de jeu jouez-vous, ma dame ? Vous n’avez pas émis une seule protestation durant tout le voyage jusqu’ici !
— Je ne joue à aucun jeu. Comme je l’ai dit, je ne suis pas opposée au mariage en lui-même, seulement au fait de retourner à la Cour si sire Madoc ne veut pas de moi. Vous savez le genre d’hommes que John a autour de lui. Est-il surprenant que je ne veuille pas les retrouver ?
Sire Alfred ne répondit pas directement, sans doute parce qu’il connaissait l’entourage du roi.
— Vous auriez dû parler au roi de vos sentiments.
Comme si John s’en souciait ! Mais elle se contenta de remarquer :
— Et lui aurait dû m’en dire plus sur Madoc ap Gruffydd.
— Afin que vous puissiez trouver des excuses pour ne pas lui obéir ?
— Pour savoir quel genre d’homme j’étais censée épouser. Il semble être un sauvage au tempérament bouillant qui trouve amusant de nous faire passer pour des sots. On aurait dû me dire en particulier qu’il a déjà un fils, étant donné que les fils qu’il pourrait me donner n’hériteraient pas de son domaine, mais seulement d’une partie.
— Tous les enfants que j’aurai hériteront à part égale, à l’exception du titre, déclara le « sauvage » en personne depuis la porte.
Roslynn et sire Alfred sursautèrent avant de pivoter vers la porte où se tenait sire Madoc, les bras croisés.
Dieu lui vienne en aide, pensa-t-elle, qu’avait-il entendu au juste ?
— C’est une décision que j’ai prise avant la naissance de mon premier enfant et je m’y tiendrai, si j’ai la bénédiction d’en avoir d’autres, continua-t-il en entrant dans la chambre.
Il haussa un sourcil d’un air interrogateur.
— Puis-je demander ce que vous faites dans la chambre de la dame, sire ?
Sire Alfred se redressa de toute sa taille.
— En tant que représentant du roi, j’ai tous les droits de lui parler en privé.
— Pas dans mon château.
Le Normand n’aurait pas paru plus offensé s’il avait reçu un soufflet.
— Je suis un homme honorable !
— C’est ce que vous dites, mais les mots n’ont que peu de valeur.
— Alors écoutez-moi, déclara Roslynn, sa propre colère flambant en elle. Quoi qu’ai été mon défunt époux, je suis une femme honorable et il n’y a rien d’inconvenant entre sire Alfred et moi !
— Je l’espère.
— Messire Madoc, dit-elle d’un ton sec, si vous n’êtes venu ici que pour nous
Weitere Kostenlose Bücher