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Templa Mentis

Templa Mentis

Titel: Templa Mentis Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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Florence était femme d’esprit vif, ne gobant pas aisément lanternes 6 .
    — Pourquoi l’évoquer au passé ?
    Blandine lui jeta un étrange regard.
    — Volatilisée.
    — Comment cela ?
    — Aucun autre terme ne me vient. Florence vieillissait fort ; elle avait pris goût à notre petit village et affirmait qu’elle y finirait ses jours lorsque ses membres ainsi que son dos la feraient souffrir au point qu’elle ne pourrait plus servir sa bien-aimée maîtresse. Or personne ne la revit dès après l’enterrement de Mme Anne.
    — Je vois. Et que vous relata Florence, le jour où elle se décida à parler ?
    — Des confidences arrachées aux autres serviteurs de la mesnie. La première dame d’Errefond, Agnès, de belle santé et de vigueur, a soudain trépassé à la nuit. Lorsque deux servantes ont pénétré dans ses appartements pour la toilette mortuaire, la bière était déjà scellée. Le très dévoué secrétaire du seigneur aurait affirmé à tous que le médecin venu à la nuit avait redouté une fièvre pulmonaire contagieuse 7 , et recommandé qu’on enterrât feu Mme d’Errefond au plus preste. Pourtant, nul n’avait surpris la visite du médecin en question, pas même la dame d’entourage dont la chambre se situait juste en face des appartements de sa maîtresse. Au demeurant, selon Florence, celle-ci fut remerciée moins d’une semaine après le décès.
    — Ce qui incite à penser qu’on ne voulait pas que le cadavre fût vu.
    Un nouveau hochement de tête approuva sa déduction.
    — Afin de dissimuler des coups, des plaies, un étranglement, un enherbement ?
    — J’ai formé identique liste, messire mire.
    Un doute assaillit Druon qui s’enquit :
    — Pourquoi ne pas vous en être ouverte auprès de votre époux, si je puis, avec tout mon respect ?
    Un sourire attendri illumina le joli visage préoccupé.
    — Mon si cher Gabrien… L’âme de Gabrien est vierge de souillure au point qu’il n’entrevoit le mal nulle part. De plus, l’accusation, même assortie de précautions de langue, était fort grave, et ne reposait que sur ce que m’avait confié Florence, que je ne connaissais que de bien peu. Pis, si mon époux avait ajouté foi à ses dires… En dépit de sa ténuité, il montre un rare courage, une témérité dont je crains toujours qu’elle se retourne contre lui. Le seigneur d’Errefond est connu pour avoir fine lame. Imaginez ! Et si Gabrien avait exigé de lui une explication ? Après tout, il s’agit de notre seigneur, même si notre existence ne lui revient au souvenir qu’au paiement des impôts.

    Le portrait de Luc d’Errefond brossé par Blandine Leguet se révélait plus que déplaisant.
    — Quand vîtes-vous Florence pour la dernière fois ?
    — Le lendemain du trépas de Mme Anne. Défigurée de larmes, elle pénétra dans l’officine de mon époux au prétexte de régler son ardoise. Aux œillades 8 qu’elle me lançait, je compris qu’elle me voulait entretenir. Je proposai donc de l’escorter jusqu’à la sortie de la bourgade. Je l’ai sentie bouleversée, pas seulement de chagrin. À la vérité, elle semblait effrayée.
    — Que vous a-t-elle conté ?
    — Elle bafouillait, des paroles heurtées, brouillonnes, bien saisissantes de la part d’une femme autrefois bonne commère et posée. Pardonnez-moi, je la revois et me perds… Elle relata la fin brutale, à la nuit, de sa maîtresse qu’elle avait quittée en belle forme au coucher de la veille.
    — Et ?
    — Tout se déroula ainsi qu’avec la première épouse. Un prétendu médecin, une mise en bière expéditive et une inhumation dès le lendemain.
    — Aucun prêtre ne fut mandé ?
    — Le chapelain du seigneur d’Errefond bénit le cercueil. Florence précisa qu’il était fort vieux, sourd et presque aveugle.
    — Sénile ?
    — Quoi de mieux qu’un chapelain qui n’ouït, n’entend et n’y voit goutte pour couvrir, en toute innocence, les turpitudes d’un seigneur ?
    — De juste.

    Blandine contempla un instant le bouquet de feuillage posé au centre du guéridon et prit une longue inspiration avant de poursuivre. Druon remarqua le léger tremblement nerveux qui agitait la commissure de ses lèvres.
    — Florence avait les sangs retournés lorsque je la quittai. Elle m’agrippa par le bras et murmura, jetant un regard inquiet autour d’elle : « Je suis certaine qu’il l’a occise, comme la première, et redoute

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