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Tragédies Impériales

Tragédies Impériales

Titel: Tragédies Impériales Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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jeune baronne Maria Vetsera avec lui !… »
    Le drame de Mayerling allait, en effet, amener, resserrement certain des relations entre François-Joseph et Katharina Schratt. L’été suivant, la jeune femme loua à Ischl une villa toute proche de l’imposante résidence où la famille impériale avait coutume de villégiaturer : la villa Félicitas. À Ischl, François-Joseph oubliait les rigueurs de l’étiquette, et se retrouvait le chasseur passionné qu’il avait toujours été. C’était avec un bonheur toujours nouveau qu’il se replongeait dans la nature.
    À peine Mme Schratt fut-elle installée que l’on perça une petite porte dans le mur mitoyen des deux propriétés et chaque matin, l’on put voir l’empereur, vêtu d’une vareuse de chasse, botté, coiffé d’un feutre rond orné d’un blaireau et d’une plume, franchir cette petite porte et se rendre, à pied, à la villa Félicitas, grand chalet de bois aux balcons peints et ouvragés. Sur le perron, Katharina l’attendait.
    Elle lui adressait une belle révérence, puis le précédait dans la grande salle où le petit déjeuner était servi. Un petit déjeuner qu’elle confectionnait elle-même, car elle était excellente cuisinière. L’empereur trouvait là le café viennois à la crème fouettée, le pain de campagne, les compotes, les confitures, les œufs et les fines saucisses qu’il aimait et que son hôtesse confectionnait comme personne. Tous deux déjeunaient alors en échangeant les nouvelles de la matinée.
    Parfois, Mme Schratt essayait, doucement, de chapitrer son impérial ami.
    — Votre Majesté travaille trop ! Elle a mauvaise mine, même ici. Elle devrait dormir davantage.
    Car, surtout depuis la mort de son fils, l’empereur dormait de moins en moins. Chaque matin, hiver comme été, il se levait à trois heures et travaillait à ses dossiers jusqu’à l’heure du bienheureux petit déjeuner.
    — Je dois faire mon métier, Kathy, et le faire bien ! Tout au moins, du mieux que je peux.
    Ensuite, il s’accordait une promenade avec son amie, promenade à laquelle s’associait Élisabeth quand elle était là, ce qui était de plus en plus rare. Mayerling avait fait d’elle une sorte de grand oiseau noir, affolé et douloureux, qui errait inlassablement d’un bout à l’autre de l’Europe.
    Les petits déjeuners d’Ischl devinrent si chers à l’empereur que, de retour à Vienne, il continua à se rendre chaque matin chez son amie, dans sa belle maison de la Gloriettengasse. Avec une joie enfantine, il se plaisait à proclamer que personne ne confectionnait, comme elle le café au lait et les saucisses. Ce qui inspira à l’écrivain français Robert de Fiers un mot cruel et peu élégant :
    — Mme Schratt est une dame qui attache l’empereur avec des saucisses !
    C’était cependant une vérité profonde. Ces instants de vie bourgeoise, ce semblant d’intérieur que lui apportait Katharina étaient devenus infiniment précieux au souverain. Mais bien sûr, on en vient malgré tout à se poser la question naturelle : fut-elle ou non sa maîtresse ?
    Toutes les mauvaises langues de Vienne en étaient persuadées. Pourtant, l’amitié constante d’Élisabeth pour la jeune femme, l’affection que les jeunes archiduchesses manifestaient à Mme Schratt et le respect évident que lui témoignait François-Joseph s’inscrivent en faux contre ces bavardages. On peut supposer que, dans les tout premiers temps, la fraîcheur de la comédienne put tenter l’empereur privé d’amour mais, outre qu’il est impossible de l’affirmer, ce ne put être qu’une très brève passade.
    Ce qui est certain, par contre, c’est la haine que cette amitié insigne valut à Mme Schratt de la part de certains personnages. Le plus acharné fut le prince de Montenuovo. Cet homme aux idées étroites, pétri de morgue plus qu’aucune altesse impériale, fut l’un des mauvais génies du règne et l’une des causes d’exacerbation de bien des problèmes familiaux des Habsbourg. Rodolphe eut à en souffrir ainsi que l’impératrice. Plus tard ce furent François-Ferdinand et son épouse morganatique, car c’était un homme qui ne désarmait jamais.
    Tant que vécut Élisabeth, cependant, il n’osa pas trop faire sentir son animosité à Mme Schratt. Mais dès que Sissi fut tombée sous le poignard de l’assassin Luccheni, il donna libre cours à sa méchanceté. Mme Schratt fut chassée du Burgtheater pour

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