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Traité du Gouvernement civil

Traité du Gouvernement civil

Titel: Traité du Gouvernement civil Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: John LOCKE
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lois prescrivent, étant ridicule de s'imaginer que quelqu'un pût être obligé, en dernier ressort, d'obéir au pouvoir d'une société, lequel ne serait pas suprême.

     
    135. Quoique le pouvoir législatif (soit qu'on l'ait remis à une seule personne ou à plusieurs, pour toujours, ou seulement pour un temps et par intervalles) soit le suprême pouvoir d'un État; cependant, il n'est premièrement, et ne peut être abso­lu­ment arbitraire sur la vie et les biens du peuple. Car, ce pouvoir n'étant autre chose que le pouvoir de chaque membre de la société, remis à cette personne ou à cette as­sem­blée, qui est le législateur, ne saurait être plus grand que celui que toutes ces différentes personnes avaient dans l'état de nature, avant qu'ils entrassent en société, et eussent remis leur pouvoir à la communauté qu'ils formèrent ensuite. Car, enfin, personne ne peut conférer à un autre plus de pouvoir qu'il n'en a lui-même : or, per­sonne n'a un pouvoir absolu et arbitraire sur soi-même, ou sur un autre, pour s'ôter la vie, ou pour la ravir a qui que ce soit, ou lui ravir aucun bien qu'il lui appartienne en propre. Un homme, ainsi qu'il a été prouvé, ne peut se soumettre au pouvoir arbitraire d'un autre; et, dans l'état de nature, n'ayant point un pouvoir arbitraire sur la vie, sur la liberté, ou sur les possessions d'autrui, mais son pouvoir s'étendant seule­ment jusqu'où les lois de la nature le lui permettent, pour la conservation de sa personne, et pour la conservation du reste du genre humain; c'est tout ce qu'il donne et qu'il peut donner à une société, et, par ce moyen, au pouvoir législatif; en sorte que le pouvoir législatif ne saurait s'étendre plus loin. Selon sa véritable nature et ses véritables engagements, il doit se terminer au bien public de la société. C'est un pouvoir qui n'a pour fin que la conservation, et qui, par conséquent, ne saurait jamais avoir droit de détrui­re, de rendre esclave, ou d'appauvrir, à dessein, aucun sujet  * . Les obligations des lois de la nature ne cessent point dans la société ; elles y deviennent même plus for­tes en plusieurs cas; et les peines qui y sont annexées pour contraindre les hommes à les observer, sont encore mieux connues par le moyen des lois humaines. Ainsi, les lois de la nature subsistent toujours comme des règles éternelles pour tous les hommes, pour les législateurs, aussi bien que pour les autres. S'ils font des lois pour régler les actions des membres de l'État, elles doivent être aussi faites pour les leurs propres, et doivent être conformes à celles de la nature, c'est-à-dire, à la volonté de Dieu, dont elles sont la déclaration; et la loi fondamentale de la nature ayant pour objet la conservation du genre humain; il n'y a aucun décret humain qui puisse être bon et valable, lorsqu'il est contraire à cette loi.

    136. En second lieu, l'autorité législative ou suprême, n'a point droit d'agir par des décrets arbitraires, et formés sur-le-champ, mais est tenue de dispenser la justice, et de décider des droits des sujets par les lois publiées et établies, et par des juges connus et autorisés  * * . Car, les lois de la nature n'étant point écrites, et par conséquent ne pouvant se trouver que dans le cœur des hommes, il peut arriver que, par passion, ou par intérêt, ils en fassent un très mauvais usage, les expliquent et les appliquent mal, et qu'il soit difficile de les convaincre de leur erreur et de leur injustice, s'il n'y - et, par ce moyen, le droit de a point de juges établis ; chacun ne saurait être déterminé comme il faut, ni les propriétés être mises à couvert de la violence, chacun se trouvant alors juge, interprète et exécuteur dans sa propre cause. Celui qui a le droit de son côté, n'ayant d'ordinaire à employer que son seul pouvoir, n'a pas assez de force pour se défendre contre les injures, ou pour punir les malfaiteurs. Afin de remédier à ces inconvénients, qui causent bien du désordre dans les propriétés des particuliers, dans l'état de nature, les hommes s'unissent en société, afin qu'étant ainsi unis, ils aient plus de force et emploient toute celle de la société pour mettre en sûreté et défendre ce qui leur appartient en propre, et puissent avoir des lois stables, par lesquelles les biens propres soient déterminés, et que chacun reconnaissance ce qui est sien. C'est pour cette fin que les hommes remettent à la

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