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Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
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chrétiens, à construire de meilleures maisons, à utiliser des méthodes scientifiques en agriculture, et ils étaient plus riches que leurs compatriotes xhosas. Ils confirmaient l ’ axiome des missionnaires selon lequel être chrétien c ’ était être civilisé et être civilisé c ’ était être chrétien. Il existait encore une certaine hostilité envers les amaMfengu, mais rétrospectivement, je l ’ attribuerais plus à la jalousie qu ’ à une animosité tribale. Cette forme locale de tribalisme que j ’ ai observée quand j ’ étais enfant était relativement inoffensive. A ce stade, je n ’ ai pas soupçonné les violentes rivalités tribales qui, plus tard, seraient encouragées par les dirigeants blancs d ’ Afrique du Sud, ni n ’ en ai été témoin.
    Mon père ne partageait pas le préjugé local à l ’ égard des amaMfengu et il protégeait deux frères amaMfengu, George et Ben Mbekela. Ces frères représentaient une exception à Qunu   : ils étaient instruits et chrétiens. George, le plus âgé des deux, était un instituteur à la retraite et Ben, sergent dans la police. Malgré le prosélytisme des frères Mbekela, mon père resta à l ’ écart du christianisme et garda la foi dans le grand esprit des Xhosas, Qamata, le dieu de ses ancêtres. Mon père était un prêtre officieux   ; il présidait l ’ abattage rituel de chèvres et de veaux et il officiait dans les rites traditionnels locaux à propos des semailles, des moissons, des naissances, des mariages, des cérémonies d ’ initiation et des enterrements. Il n ’ avait pas besoin d ’ avoir été ordonné parce que la religion traditionnelle des Xhosas se caractérise par une totalité cosmique et il y a peu de différence entre le sacré et le séculier, entre le naturel et le surnaturel.
    Si la foi des frères Mbekela ne déteignit pas sur mon père, elle inspira ma mère, qui devint chrétienne. En fait, Fanny était son nom chrétien au sens littéral parce qu ’ on le lui avait donné à l ’ église. C ’ est à cause de l ’ influence des frères Mbekela que j ’ ai moi-même été baptisé à l ’ Eglise méthodiste ou wesleyenne et qu ’ on m ’ a envoyé à l ’ école. Les frères me voyaient souvent jouer ou m ’ occuper des moutons et ils venaient me parler. Un jour, George Mbekela rendit visite à ma mère. « Ton fils est un garçon intelligent, dit-il. Il devrait aller à l ’ école. » Ma mère resta silencieuse. Dans ma famille, personne n ’ y était jamais allé et ma mère ne semblait pas préparée à entendre la proposition de Mbekela. Mais elle la transmit néanmoins à mon père qui, malgré  – ou à cause de  – son absence d ’ instruction, décida immédiatement que son plus jeune fils irait à l ’ école.
    L ’ école se composait d ’ une seule pièce, avec un toit de style occidental, et était située de l ’ autre côté de la colline de Qunu : J ’ avais sept ans et la veille de la rentrée mon père m ’ a pris à part et m ’ a dit que je devais être habillé correctement pour aller à l ’ école. Jusqu ’ à cette date, comme tous les garçons de Qunu, je n ’ avais porté pour tout vêtement qu ’ une couverture enroulée autour d ’ une épaule et épinglée à la taille. Mon père a pris un de ses pantalons et a coupé les jambes au genou. Il m ’ a dit de le mettre, ce que j ’ ai fait, et il avait en gros la bonne longueur même s ’ il était beaucoup trop large. Alors mon père a attrapé un morceau de ficelle et me l ’ a serré autour de la taille. Je devais être comique à voir, mais je n ’ ai jamais été aussi fier d ’ un costume que du pantalon coupé de mon père.
    Le premier jour de classe, mon institutrice, Miss Mdingane, nous a donné à chacun un prénom anglais et nous a dit que dorénavant ce serait notre prénom à l ’ école. A cette époque, c ’ était la coutume, sans doute à cause de la prévention des Britanniques envers notre éducation. Celle que j ’ ai reçue était britannique et les idées britanniques, la culture britannique, les institutions britanniques étaient censées être supérieures. La culture africaine n ’ existait pas.
    Les Africains de ma génération  – et encore ceux d ’ aujourd ’ hui  – ont en général un prénom anglais et un prénom africain. Les Blancs ne pouvaient ou ne voulaient pas prononcer un prénom africain, et ils considéraient qu ’ en porter un

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