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Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
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à sa famille et à son foyer, et obligé de vivre à part une existence intermédiaire de secret et de révolte. Au début, je n’ai pas choisi de placer mon peuple au-dessus de ma famille, mais, en essayant de servir mon peuple, j’ai découvert que je ne pouvais plus remplir mes obligations de fils, de frère, de père et de mari.
    De cette façon, mon engagement envers mon peuple, envers les milliers de Sud-Africains que je ne connaîtrais ni ne rencontrerais jamais, s’était fait aux dépens des gens que je connaissais et aimais le plus. C’était aussi simple et pourtant incompréhensible que lorsqu’un enfant demande à son père   : « Pourquoi est-ce que tu ne peux pas venir avec nous   ? » Et le père doit prononcer ces paroles terribles   : « Il y a d’autres enfants que toi, des milliers d’autres…   » et sa voix se brise.
     
    Je ne suis pas né avec une faim de liberté. Je suis né libre  – libre de toutes les façons que je pouvais connaître. Libre de courir dans les champs près de la hutte de ma mère, libre de nager dans le ruisseau clair qui traversait mon village, libre de faire griller du maïs sous les étoiles et de monter sur le dos large des bœufs au pas lent. Tant que j’obéissais à mon père et que je respectais les coutumes de ma tribu, je n’étais pas inquiété par les lois de l’homme ou de Dieu.
    Ce n’est que lorsque j’ai appris que la liberté de mon enfance était une illusion et que j’ai découvert, jeune homme, qu’on m’avait déjà pris ma liberté que j’ai commencé à avoir faim d’elle. Au début, en tant qu’étudiant je ne voulais la liberté que pour moi-même, la liberté passagère de rester dehors pendant la nuit, de lire ce qui me plaisait, et d’aller là où je l’avais choisi. Plus tard, en tant que jeune homme, à Johannesburg, j’ai désiré les libertés fondamentales et honorables de réaliser mes possibilités, de gagner ma vie, de me marier et de fonder une famille –   la liberté de ne pas être entravé dans une vie injuste.
    Mais alors, j’ai lentement découvert que non seulement je n’étais pas libre, mais que mes frères et mes sœurs ne l’étaient pas non plus. J’ai vu qu’il n’y avait pas que ma liberté à être réduite, il y avait aussi celle de tous ceux qui me ressemblaient. C’est alors que j’ai rejoint le Congrès national africain, et c’est alors que ma faim de liberté personnelle est devenue faim de liberté pour mon peuple. C’est ce désir de liberté pour que mon peuple vive sa vie dans la dignité et la fierté qui a transformé un jeune homme effrayé en quelqu’un d’audacieux, qui a conduit cet avocat respectueux des lois à devenir un criminel, qui a transformé un mari aimant sa famille en errant, qui a obligé un homme amoureux de la vie à vivre en moine. Je n’ai pas plus de vertu ni d’abnégation qu’un autre, mais j’ai découvert que je ne pouvais pas profiter des pauvres libertés limitées qu’on m’autorisait, alors que je savais que mon peuple n’était pas libre. La liberté est indivisible   ; les chaînes que portait un de mes compatriotes, tous les portaient, les chaînes que tous portaient, je les portais.
    C’est au cours de ces longues années solitaires que la faim de liberté pour mon peuple est devenue faim de liberté pour tous, Blancs et Noirs. Je savais parfaitement que l’oppresseur doit être libéré tout comme l’oppressé. Un homme qui prive un autre homme de sa liberté est prisonnier de la haine, il est enfermé derrière les barreaux des préjugés et de l’étroitesse d’esprit. Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu’un d’autre de sa liberté, tout comme je ne suis pas libre si l’on me prive de ma liberté. L’opprimé et l’oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité.
    Quand j’ai franchi les portes de la prison, telle était ma mission   : libérer à la fois l’opprimé et l’oppresseur. Certains disent que ce but est atteint. Mais je sais que ce n’est pas le cas. La vérité, c’est que nous ne sommes pas encore libres   ; nous avons seulement atteint la liberté d’être libres, le droit de ne pas être opprimés. Nous n’avons pas encore fait le dernier pas de notre voyage, nous n’avons fait que le premier sur une route plus longue et difficile. Car être libre, ce n’est pas seulement se débarrasser de ses chaînes   ; c’est vivre d’une façon qui respecte et

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