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Un paradis perdu

Un paradis perdu

Titel: Un paradis perdu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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vieux, j'ai passé une fin d'après-midi de faune luxurieux et comblé. J'avais toujours rêvé de me trouver au lit avec des jumelles. « Nous ne faisons jamais rien l'une sans l'autre », m'avait dit l'une, ce que sa sœur s'était empressée de confirmer en murmurant avec un clin d'œil, « … et toujours ensemble ». Tout ce que je souhaitais.
     
    – Et le résultat satisfit tes espérances, vieux libertin !
     
    – Oh combien ! Elles ont l'amour joyeux, tendre, inventif, une impudicité si naturelle et spontanée qu'elle en est épurée de toute notion de péché. Le plaisir pour le plaisir, sans façon ni égoïsme. Elles font de l'étreinte un échange ardent et voluptueux, si franc et loyal qu'il en devient décent. À mon avis, c'est ainsi qu'Ève compromit Adam, si tu vois ce que je veux dire.
     
    – Je vois surtout que tu as obtenu ce que mon ami défunt, Malcolm Murray, qui connut ces demoiselles adolescentes, n'avait pas osé demander. J'imagine qu'elles se sont relayées au cours de la nuit ?
     
    – J'ai dû tirer à pile ou face celle qui, la première… mais ne crois pas que, pendant ce temps l'autre restât inactive ! Un duo de virtuoses. Jamais je n'ai été pareillement traité. À la fin de l'après-midi, en riant comme des fous, nous avons pris une collation et bu un breuvage de leur composition appelé yellow bird . Ensuite, nous avons recommencé. Ces femmes, crois-moi, réveilleraient un mort. Je suis moulu.
     
    – Je le conçois. Le yellow bird est un stimulant.
     
    – J'ai promis de les revoir, car elles m'ont affirmé être souvent privées de plaisir, étant donné qu'elles ne veulent absolument pas de rencontres avec des hommes du cru. « Nous devons veiller à notre réputation », m'a dit Emphie. « Nous sommes filles de pasteur » a complété Madge. En somme, elles ne choisissent que des gaillards de passage, conclut Fouquet.
     
    – Et comment les différencies-tu l'une de l'autre ? Moi qui ne les ai jamais vues qu'habillées, je n'ai jamais su le faire.
     
    – Pour me prouver leur souhait de me revoir, elles m'ont confié le secret qui permet de les reconnaître. Emphie a sur la hanche gauche une cicatrice due à une chute, quand elle était enfant. Bien sûr, il faut être déjà assez intime avec elle pour repérer cette marque. Vêtues, la confusion, qu'elles se plaisent d'ailleurs à entretenir, reste inévitable, révéla Fouquet.
     
    – Dire que ces donzelles ont été éduquées chez les Dames de Sion, le collège le plus huppé du Massachusetts, et que leur père, le pasteur Russell, que tu auras certainement l'occasion de rencontrer à Soledad, est un ministre d'une foi rayonnante, bon et généreux ! Il est fort déçu par ses filles aînées.
     
    – Madge m'a dit que leur mère ne veut plus les voir depuis qu'elles ont ouvert leur boutique de fanfreluches à Nassau. C'est stupide, dit Albert.
     
    – Margaret Russell s'est mise à boire plus que de raison. Et encore ne sait-elle pas que ses jumelles copulent, ensemble, avec le premier venu, dit Charles.
     
    – Merci pour « le premier venu » ! lança Albert en riant.
     
    Charles s'excusa d'une bourrade affectueuse.
     
    Après avoir dévoré le dernier scone, Fouquet sortit sa pipe et l'alluma.
     
    – Dans leur genre, ces demoiselles, que l'on ne peut, malgré leur âge, qualifier de vieilles filles, sont des artistes. Sais-tu à quoi j'ai pensé en les voyant, au petit matin, endormies dans les bras l'une de l'autre ? Eh bien, j'ai vu ce tableau de Gustave Courbet, le Sommeil ou les deux Amies 1 , qui fit scandale au Salon de 1866 et qui m'avait tant plu. J'ai toujours imaginé que le peintre avait honoré ses modèles avant de les peindre.
     
    – Et pour toi, comment cela s'est-il terminé ?
     
    – D'une façon un peu humiliante, je dois le reconnaître. Je me suis esbigné sans les réveiller, avec le sentiment, ayant rempli mon office de mâle, d'être devenu inutile, insignifiant, presque importun.
     
    – Tu t'en es bien tiré. Sais-tu que, chez les insectes, certaines femelles tuent le mâle après usage, commenta Charles, goguenard.
     
    L'appareillage mit fin à la conversation, Tom O'Graney invitant Desteyrac à vérifier avec lui, sur le pont, l'arrimage des caisses qui contenaient la coupole et l'optique du phare du Cabo del Diablo.
     

    Pendant le séjour de son père à Nassau, Pacal, suivant les instructions de son grand-père,

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