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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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Caporal à moitié fumées
s’entassaient dans le coquillage rosâtre tenant lieu de cendrier.
    « Ils n’ont pas franchement cherché à masquer leurs
traces, dis donc », commenta l’un des enquêteurs.
    La décoration intérieure du rez-de-chaussée et du premier
étage était féminine, presque exempte de la moindre touche masculine, mais le
grenier renfermait de vieux meubles, des cartons d’ornements de Noël et de
bric-à-brac, rangés et étiquetés en capitales de la main d’Albert, et un fauteuil
capitonné flanqué d’un cendrier sur un pied chromé, devant les lucarnes en
saillie, dont celle de droite était encore entrebâillée pour permettre à la
fumée de cigare de s’échapper. L’ouvrage Deep Sea Fishing and Fishing Boats (« Pêche en haute mer et navires de pêche »),
d’Edmund W. H. Holdsworth (1874), reposait sur le sol.
    L’autre domaine d’Albert était le sous-sol, où l’inspecteur
Frank Heyner tomba sur un atelier des plus ordonnés : un alambic
artisanal, un râtelier à cannes à pêche et moulinets, une barque poncée qui
n’attendait, semblait-il, plus qu’apprêt et peinture, un moteur hors-bord
Johnson et une descente à linge, par laquelle les vêtements atterrissaient dans
une panière où le policier trouva une taie d’oreiller tachée de sang. L’atmosphère
surchauffée de la maison trahissait qu’on avait alimenté la chaudière en
charbon une ou deux heures avant le lever du soleil et, dans celle-ci, Heyner
identifia les poignets mousquetaire de ce qui, présumait-il, avait dû être une
belle chemise, mais n’était plus que cendres. Et enfin, dans une boîte à
outils, il dénicha un contrepoids de cinq livres tout neuf, destiné à faciliter
l’ouverture des fenêtres à guillotine. On l’avait saupoudré de cendres de
charbon mais du sang était encore visible. Heyner recueillit ces pièces à
conviction.
    Le commissaire George McLaughlin était à l’étage cette
après-midi-là lorsqu’il reçut un appel sur le téléphone de l’entrée.
L’enquêteur dépêché au domicile de Milton C. Fidgeon l’informa que
l’histoire de Ruth concordait. Milton avait porté une main à son front et il
avait dû s’asseoir à l’annonce de l’homicide. L’hôte de la soirée avait
confessé qu’Albert pouvait être irascible – « un gars
compliqué » – mais il était aussi jovial et de bonne compagnie. Les
Snyder avaient débarqué si tôt ce soir-là que Fidgeon avait plaisanté :
« Vous venez dîner ? » George Hough et Cecil, son aîné, étaient
les beaux-frères de Fidgeon. Et des voisins habitant la même rue, Mr et
Mrs Howard Eldridge, étaient aussi présents à la soirée. Fidgeon se
remémorait l’incident, trois semaines auparavant, lors duquel Albert avait
accusé George Hough de lui avoir volé son portefeuille et soixante-quinze
dollars, et sur le moment, il avait pensé : « C’est assez mesquin
d’accuser un groupe d’amis d’un truc pareil. » Mais la querelle de la
veille n’était pas aussi acerbe – tout au plus, une prise de bec entre
deux gaillards au sang chaud.
    Se pouvait-il que George Hough eût été assez furieux à
l’issue de la soirée pour tuer Albert ?
    Rigoureusement impossible, avait assuré Fidgeon.
    Les policiers qui avaient perquisitionné la chambre des
Snyder vinrent trouver McLaughlin et lui remirent leur inventaire. La liste
comprenait : la première page du quotidien italien L’Arena, une
montre-bracelet Bulova en or pour homme, en évidence sur le sol, le porte-mine
Cross en or qui avait servi à serrer le fil de fer, un beau manteau en rat
musqué enveloppé dans du papier et caché tout au fond de la penderie, des
vêtements quelconques et une boîte à bijoux apparemment vide. Par acquit de
conscience, les policiers avaient cependant soulevé le matelas de
Mrs Snyder et découvert des bagues, des boucles d’oreilles et des colliers
dissimulés au-dessous. Et par terre, près du matelas d’Albert, ils avaient
ramassé une épingle de cravate ou de foulard arborant les initiales
« J. G. ».
    L’ancienne fiancée d’Albert Snyder s’appelait Jessie
Guischard. Elle était morte d’une pneumonie avant qu’ils pussent se marier et
Albert n’avait jamais fait son deuil. Cette épingle était un cadeau de Jessie à
Albert, mais, détail critique, les enquêteurs ne l’apprendraient que plus tard
et en déduisirent sur le moment qu’elle avait fusé de la cravate

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