1942-Le jour se lève
mai 1942, l’offensive de la
Wehrmacht annonce un déferlement des panzers durant l’été. Hitler vise
Stalingrad et Leningrad, et Moscou tombera comme un fruit pourri.
L’enjeu est immense : Laval l’analyse dès son retour au
pouvoir en avril 1942.
« Nous voilà placés devant cette alternative, dit-il :
ou bien nous intégrer, notre honneur et nos intérêts vitaux étant respectés, dans
une Europe nouvelle et pacifiée… Ou bien nous résigner à voir disparaître notre
civilisation. »
Le 13 mai 1942, Laval écrit une longue lettre au
ministre des Affaires étrangères du Reich, Ribbentrop.
« Vous connaissez mes vues sur les relations que je
désire voir s’établir entre nos deux pays, écrit Laval. Les Français savent que
je veux rechercher et épuiser tous les moyens d’arriver à une réconciliation et
à une entente étroite avec l’Allemagne. Afin de protéger l’Europe d’une bolchevisation
qui détruirait notre culture jusque dans ses bases, l’Allemagne s’est préparée
à une lutte gigantesque. Le sang de sa jeunesse va couler.
« Je souhaite, en conséquence, que des Français aussi
nombreux que possible prennent dans vos usines la place de ceux qui partent
pour le front de l’Est… »
« Sang allemand, travail français », résumera
Laval.
Il répond ainsi aux demandes allemandes de main-d’œuvre, au
Service du Travail Obligatoire (STO) que le ministre allemand Sauckel veut
instituer.
Avec son habileté de politicien roué, Laval choisit le terme
de « relève ». Des prisonniers français seront rapatriés, « relevés »
par de jeunes travailleurs français.
En même temps, Laval propose de transformer la Légion des
volontaires français contre le bolchevisme en Légion tricolore.
« Il serait possible d’en augmenter les effectifs »,
précise Laval à Ribbentrop. Et à ces volontaires le gouvernement français « donnerait
l’assurance que leurs intérêts personnels et ceux des membres de leurs familles
seraient protégés avec équité.
« Je prie Votre Excellence de bien vouloir soumettre
cette lettre au Führer comme témoignage de la sincérité du gouvernement
français. »
Ribbentrop prend bonne note des intentions de Laval, mais, précise
le ministre, « le gouvernement du Reich ne se laisse pas influencer par
des espoirs et des assurances, mais exclusivement par les actes de la politique
française ».
Laval
veut et doit donc aller plus loin. Il prépare pour le lundi 22 juin 1942
un discours où il affirmera qu’il « croit et souhaite la victoire de l’Allemagne ».
Ses proches s’inquiètent d’un tel propos, une provocation.
« Je sais, répond Laval, que mes paroles vont faire aux
Français l’effet de l’acide sulfurique sur des blessures, mais je les pense. »
— Vous ne pouvez pas prononcer un discours pareil sans
le soumettre au Maréchal, lui dit-on.
Laval bougonne, hausse les épaules, se rend chez le Maréchal
et lui lit son discours.
Pétain hoche la tête.
« Vous n’avez pas le droit de dire “je crois à la
victoire de l’Allemagne” », marmonne-t-il.
Laval est déjà prêt à élever la voix quand Pétain ajoute :
« Non, vous n’avez pas le droit de dire “je crois”, vous
n’êtes pas militaire, donc vous ne pouvez pas faire de pronostic sur l’issue du
conflit, vous n’en savez rien. »
Laval raye aussitôt le « je crois » de son discours.
Il parlera à la radio le lundi 22 juin 1942.
« Je voudrais que les Français sachent monter assez
haut pour se mettre au niveau des événements que nous vivons, commence-t-il.
« C’est peut-être l’une des heures les plus émouvantes
qui se soient inscrites dans l’histoire de notre pays.
« Nous avons eu tort en 1939 de faire la guerre.
« Nous avons eu tort en 1918, au lendemain de la
victoire, de ne pas organiser une paix d’entente avec l’Allemagne…
« J’ai la volonté de rétablir avec l’Allemagne et avec
l’Italie des relations normales et confiantes.
« De cette guerre surgira inévitablement une nouvelle
Europe…
« Pour moi, Français, je voudrais que demain nous
puissions aimer une Europe dans laquelle la France aurait une place qui serait
digne d’elle.
« Pour construire cette Europe, l’Allemagne est en
train de livrer des combats gigantesques. Elle doit, avec d’autres, consentir d’immenses
sacrifices et elle ne ménage pas le sang de sa jeunesse. Pour
Weitere Kostenlose Bücher