1942-Le jour se lève
la jeter dans la
bataille, elle va la chercher à l’usine et aux champs.
« Je souhaite la victoire de l’Allemagne parce que, sans
elle, le bolchevisme, demain, s’installerait partout. »
Il évoque ensuite la Relève.
« Ouvriers de France ! C’est pour la libération
des prisonniers que vous allez travailler en Allemagne ! C’est pour notre
pays que vous irez en grand nombre ! C’est pour permettre à la France de
trouver sa place dans la nouvelle Europe que vous répondrez à mon appel…
« La reconnaissance de la nation montera vers vous.
« Français, conclut Laval, un grand soldat, dont toute
la vie est un exemple de sacrifices et de discipline, préside aux destinées de
notre patrie.
« Je vous parle ce soir en son nom.
« Le Maréchal vous dirait que la France n’a jamais
laissé l’Histoire se faire sans elle et qu’on ne remonte des abîmes du malheur
que par les sentiers du courage. »
Mensonge de Laval – ou demi-vérité – puisque le
Maréchal a entendu le discours avant qu’il soit prononcé à la radio, et qu’il a
suggéré de modifier « la phrase ». Laval s’est incliné et Pétain n’a
pas interdit à « son » chef du gouvernement de parler.
Mais Pétain, écoutant le discours radiodiffusé, est atterré.
Il se refuse à accorder son patronage à la Relève.
Le 26 juin 1942, le cabinet du Maréchal fait arrêter l’impression
d’une affiche invitant les ouvriers à se rendre en Allemagne, et comportant une
phrase du Maréchal.
En fait, les deux hommes sont désormais associés dans une
collaboration qui « souhaite la victoire de l’Allemagne ». Et c’est
la seule phrase du discours que l’on retient.
Le journaliste Pierre Limagne note dans ses Éphémérides, à
la date du 22 juin :
« En entendant cette déclaration, les Français ont vu
rouge ; si bien qu’ils ne remarquèrent pas combien la formule “je
souhaite” manquait d’assurance. Et quand la musique a attaqué La
Marseillaise , chacun s’est précipité sur son poste de radio pour tourner le
bouton et ne pas laisser notre hymne national accompagner tant d’ignominie. »
C’est un sentiment de mépris qu’éprouvent les Français, à l’exclusion
d’une poignée. Dans l’entourage de Pétain, on est scandalisé parce que Laval a
prétendu parler au nom du Maréchal.
Le général Serrigny dit au Maréchal que les Parisiens
siffleraient le chef de l’État s’il se rendait dans la capitale [2] .
Le rejet de Laval est d’autant plus vif que les émissions de
Radio-Londres – et ce dès le 22 juin, à 21 h 25 – prennent
Laval – et sa politique de Relève – pour cible.
L’émission « Honneur et patrie » « condamne »
Laval à mort.
On y entend la chronique suivante :
« “Je souhaite la victoire de l’Allemagne.”
« Avant même d’avoir prononcé cette phrase, Laval s’était
exclu de la France.
« Avant même d’avoir prononcé cette phrase, Laval s’était
condamné à mort.
« Pourquoi donc son discours de tout à l’heure
sonnait-il à toutes les oreilles françaises comme une circonstance aggravante ?
« Sans doute parce que, jusqu’à présent, on n’avait
jamais vu dans l’Histoire un Judas doublé d’un maître chanteur et triplé d’un
négrier. »
Et Georges Boris, le socialiste proche de Blum, ajoute que « ces
deux mots, Laval, négrier, sont désormais inséparables ».
Les voix de la France Libre dénoncent la « rafle des
ouvriers de France au profit des ennemis de la France » qui se prépare.
On prétend que Laval a préparé les décrets sur le travail
obligatoire en accord avec les Allemands et que Pétain les a contresignés.
La Relève qui devait susciter un élan est stigmatisée.
« Chaque travailleur français partant pour le Reich se
constitue prisonnier civil, répète Radio-Londres.
« Femmes de France, prenez garde ! Le négrier
convoite vos hommes. »
24 .
Négrier, Laval ?
Les attaques de Radio-Londres, des journaux clandestins de
la Résistance, la réprobation qu’il suscite dans l’entourage du « Vieux »,
la haine qu’il sent monter, loin de semer le doute en lui, le confortent dans
sa résolution.
Il imagine être l’habile qui donne aux Allemands les mots qu’ils
attendent.
Il s’installe dans le rôle de leur unique interlocuteur. Qui
d’autre que lui aurait osé prononcer cette phrase : « Je souhaite
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