1943-Le souffle de la victoire
envoyées
aux évêques ou a manifesté sa compassion pour les souffrances infligées au
peuple polonais – reste silencieux.
Il n’ignore pas qu’en Italie de nombreux prêtres, des moines –
et ce au sein même de la cité du Vatican – accueillent et sauvent des
milliers de Juifs, mais il craint que les Allemands ne pénètrent au Vatican, et
n’ouvrent une période de persécution contre l’Église catholique.
Pie XII veut agir au mieux des « intérêts »
de l’Église catholique. En cet automne 1943, il craint la victoire de l’armée
Rouge, donc du communisme athée. Il a vécu, à Munich en 1919 comme nonce, les
révolutions communistes.
Il confie à l’ambassadeur du Reich auprès du Vatican, Ernst
von Weizsäcker, qu’il est favorable à une paix de compromis entre le Reich et
les Anglo-Américains.
Il n’est donc pas favorable à l’exigence d’une capitulation
sans condition, qui favoriserait la Russie communiste. Et que deviendrait la
Pologne catholique ? Pie XII agit en diplomate mais son silence sur l’extermination
est assourdissant.
Chez les protestants, les voix qui s’élèvent contre les
persécutions ne sont guère plus nombreuses.
L’évêque protestant Theophil Wurm, figure de proue de son
Église, essaie de faire parvenir à Hitler – à l’automne 1943 – une
lettre rappelant qu’il avait perdu son fils et son gendre sur le front de l’Est,
il écrit que la rudesse croissante des mesures prises contre les non-Aryens
sont « en contradiction absolue avec le commandement de Dieu et violent le
principe de base de toute la vie et la pensée occidentales : le droit
fondamental, que chacun tient de Dieu, à la vie et à la dignité humaine ».
Theophil
Wurm fait recopier sa lettre et la diffuse au sein de son Église.
La lettre n’est sûrement pas parvenue jusqu’au Führer.
Lammers, le chef de la chancellerie du Reich, invite Wurm à « rester
dans les limites de sa profession ».
« Je vous demande de vous abstenir de répondre à cette
lettre », conclut Lammers.
Et l’Église protestante est réduite au silence.
Ces protestations isolées n’inquiètent pas le Führer.
Il a confiance dans la police et les SS de Himmler. Il tient
le Reich et le peuple allemand.
En cet automne 1943, il dîne souvent en tête à tête avec Goebbels.
« J’ai demandé au Führer s’il était prêt à entamer des
négociations avec Churchill, raconte Goebbels. Il ne croit pas que des
négociations avec Churchill aboutissent à un résultat quelconque étant donné qu’il
est trop profondément ancré dans ses idées hostiles et qu’en outre il se laisse
guider par la haine et non par la raison. Le Führer préférerait, quant à lui, négocier
avec Staline, mais il ne pense pas que ce soit possible…
« Quelle que soit la situation, j’ai dit au Führer qu’il
fallait que nous concluions un arrangement avec un côté ou l’autre. Jamais
encore le Reich n’a pu gagner une guerre sur deux fronts. Il faut donc que nous
étudiions comment sortir d’une manière ou d’une autre de cette guerre sur deux
fronts. »
Le Führer écoute Goebbels, puis paraissant changer d’avis il
dit à mi-voix :
« Churchill est lui-même un vieil antibolchevique, et
sa collaboration avec Moscou n’est qu’une question d’opportunisme. »
Le Führer ferme les yeux, murmure qu’il « aspire
ardemment à la paix ».
Après un long silence, il ajoute :
« J’aimerais reprendre contact avec des cercles
artistiques, aller au théâtre le soir et fréquenter les artistes. »
31.
En cet automne 1943, alors que Hitler qui a lancé ses tueurs
sur l’Europe rêvasse à une paix qu’au fond de lui il ne désire pas et sait
impossible, de Gaulle est à Alger.
Il préside le Comité Français de Libération Nationale (CFLN),
cette esquisse du gouvernement d’une France libérée.
Autour de De Gaulle, c’est le grouillement des intrigues
dans lesquelles il ne faut pas se laisser prendre.
« Ma nature m’avertit, dit-il, mon expérience m’a
appris qu’au sommet des affaires on ne sauvegarde son temps et sa personne qu’en
se tenant méthodiquement assez haut et assez loin. »
Il doit être lucide, savoir que le général Giraud, poussé
par ses entourages, ne se contente pas d’être le commandant en chef des forces
armées, coprésident du CFLN, cantonné aux affaires militaires, de Gaulle en
étant coprésident chargé des
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