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À La Grâce De Marseille

À La Grâce De Marseille

Titel: À La Grâce De Marseille Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: James Welch
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cela.
    — Je… je présume que celui qui était avec elle doit maintenant profiter de ses charmes. Une curieuse créature – pas le genre que l’on trouve d’ordinaire chez vous, Olivier. »
    Le petit homme replet émit un léger rire, sorte de gloussement aigu que Breteuil ne connaissait que trop bien. « Il a débarqué ici un soir il y a quelques mois de cela. J’ignore pourquoi, mais il m’a plu. Je m’étais dit que peut-être… mais non, il aime les filles, et en particulier Marie. En tout cas, il est inoffensif, aussi pourquoi ne le laisserais pas entrer ?
    — Il vient souvent ?
    — Tous les samedis soir. Avec une régularité de calendrier.
    — Et il s’appelle comment ? » Breteuil tâtait le terrain.
    Olivier fronça les sourcils, devenu soudain soupçonneux. Et jaloux.
    « Simple curiosité », s’empressa de le rassurer Breteuil. Il se tourna vers le bar et but une nouvelle gorgée de champagne. Il congédiait ainsi Olivier, ou du moins en donnait l’impression.
    Celui-ci hésita un instant sur la conduite à tenir. Le petit Espagnol dans le salon de derrière, c’était une chose, mais un de ses clients… Il connaissait Breteuil et se doutait bien que rien de bon ne résulterait de cette histoire. Néanmoins, il répondit : « Il s’appelle François. C’est un Oriental, je crois. Vous avez remarqué ses yeux ? »
    Breteuil garda le silence. Il alluma un de ses minces cigares et regarda la volute de fumée monter vers le plafond avant de se joindre à celles qui s’élevaient des autres cigares et cigarettes. Oui, il avait remarqué les yeux noirs de ce François. C’étaient les mêmes que ceux qui l’avaient littéralement mis à nu quatre ans auparavant sur le quai des Belges, un matin où il faisait encore presque nuit.

13
    Le long du cours Saint-Louis, les feuilles des platanes élagués, déjà d’un beau vert foncé, se découpaient sur le ciel orange, et le soleil n’allait pas tarder à se coucher derrière les toits. On était début mai et Charging Elk, contemplant le store vert au-dessus du kiosque de fleuriste, se sentait encore rempli d’espoir et d’émerveillement. Ce qui attirait son attention, c’était l’inscription : NAISSANCES MARIAGES FUNÉRAILLES . Une femme était occupée à arranger un bouquet dans un vase de porcelaine. Les fleurs provenaient des immenses serres situées pour la plupart dans l’arrière-pays niçois. En cette saison, il y avait surtout des œillets ainsi que des iris et des roses, et même un peu de lavande, le tout disposé dans des bacs de forme conique. Un petit chien blanc qui semblait appartenir à la fleuriste était assis à côté. Il se leva et se gratta le ventre avant de se mêler aux passants. Il avait l’air habitué à trottiner au milieu de l’animation qui régnait sur le trottoir.
    Charging Elk fêtait son nouveau travail à la savonnerie. Installé à une petite table, il regarda le chien courir après des pigeons qui s’égaillèrent, s’envolèrent, puis décrivirent un cercle avant de revenir se poser cinq ou six mètres plus loin. Le chien renifla longuement le pied d’un platane, puis leva la patte.
    Cinq sommeils plus tôt, alors que Charging Elk accrochait son manteau, son chef était arrivé et lui avait demandé de le suivre dans une autre partie de la fabrique, un vaste atelier éclairé par de nombreuses fenêtres où il le présenta à un homme qui, naturellement, avait déjà entendu parler de lui. En effet, bien qu’il assurât la tâche la plus pénible et la moins qualifiée de l’usine, tout le monde le connaissait sous le nom du Peau-Rouge d’Amérique, car même dans une entreprise aussi importante que celle de monsieur Miroux, les nouvelles se répandaient vite. Certains se moquaient de lui, d’autres poussaient ce qu’ils se figuraient être des cris de guerre quand ils le croyaient hors de portée de voix et d’autres encore le considéraient avec appréhension ou même avec haine en raison de sa différence. Et tous, à l’exception de Louis Granat, avaient tendance à l’éviter.
    L’autre homme, un certain monsieur Billedoux, déclara : « On m’a signalé que vous seriez prêt à changer de poste, Charging Elk. Nous verrons bien. Mais ce matin, je vous demande simplement d’observer et de faire ce que je vous dirai de faire. C’est un travail fatigant, mais beaucoup moins salissant que les fourneaux. »
    Charging Elk remarqua que son interlocuteur

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