Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
frères
pour moi, ce sont des amis et des gardes du corps: voici Héphestion, Séleucos, Ptolémée, Perdiccas, Cratère, Léonnatos, Lysimaque, Philotas. Et celui-ci, à l'allure plus guerrière..., il ne put s'empêcher de sourire, ... c'est mon secrétaire général, Eumène de Cardie.
--Salut, secrétaire général ", lui lança la reine en inclinant gracieusement la tête.
Alexandre examina son invitée: elle devait avoir près de soixante ans.
Elle ne teignait pas ses cheveux et s'abstenait de dissimuler ses tempes déjà grises, mais elle avait sans nul doute été d'une grande beauté. Sa robe carienne de laine ouvragée en damiers, brodée de scènes mythologiques, révé lait des formes qui l'avaient certainement rendue fort attirante quelques années plus tôt.
Elle avait des yeux d'une belle couleur ambrée, lumineux et sereins~
légèrement maquillés, un nez droit et des pommettes saillantes qui lui donnaient une expression très noble. Ses cheveux étaient relevés en chignon et surmontés d'un diadème en or, lapis-lazuli et turquoises, mais son habillement et son allure traduisaient quelque chose de mélancolique et de désuet~ comme si sa vie était désormais privée de sens.
Les civilités et les présentations requirent un certain ternps Alexandre vit qu'Eumène griffonnait quelques mots sur un tablette, qu'il posa sur la table, devant lui. Il lut du coin de l'oei ce qui y était écrit: Cette femme est Ada, reine de Carie. Elle a été maIié successivement à
deux de ses frères, qui sont à présen décédés. L'un d'eux avait vingt ans de moins qu'elle. L t~oisième n'est autre que Pixodaros, qui aurait pu être to beau-père et qui l'a chassée du trône. Votre rencontre ser sans-doute très intéressante. Ne laisse pas échapper cett
occasion.
Il venait tout juste de parcourir ces quelques lignes quan son invitée affirma: " Je suis Ada, reine de Carie, et je vi désormais à l'écart du monde dans ma forteresse d'Alinda. J suis certaine que mon frère m'en aurait également chassée s'i en avait eu la force. La vie et le destin ne m'ont pas permi d'avoir des enfants, et je me dirige maintenant vers I vieillesse, pleine de tristesse et surtout de souffrance face à 1 manière dont Pixodaros, le dernier et le plus odieux de me frères, m'a traitée.
--Mais comment as-tu su ? murmura Alexandre à l'oreill d'Eumène, assis à
ses côtés.
--C'est mon travail, répondit-il tout aussi bas. Et puis je t'ai déjà
épargné des problèmes avec ces gens-là, l'aurais-t oublié ? "
Alexandre se rappela la terrible colère de son père le jour o il avait annulé le mariage de son demi-frère, Arrhidée, avec la fille de Pixodaros, et il sourit en songeant à l'étrangeté du des tin: cette femme à l'allure extravagante aurait pu devenir u membre de sa famille.
" Puisje t'inviter à ma modeste table ? ", demanda-t-il.
La femme hocha délicatement la tête. " Je t'en remerci beaucoup et j'accepte ton invitation avec plaisir. Connaissan la cuisine des armées, je me suis toutefois permis d'apporte des mets qui, je l'espère, te plairont.
" .
Elle battit des mains, et ses serviteurs s'affairèrent aussitO autour de ses charrettes, d'o˘ ils tirèrent des miches de pai parfumées, des g‚teaux aux raisins secs, des tartes, des biscuit de p‚te feuilletée au miel, des petits pains fourrés à l'oeuf, à la farine et au mo˚t cuit, ainsi que quantité d'autres douceurs.
Une goutte de salive coula sur la cuirasse d'Héphestion, qui contemplait la scène bouche bée; et Léonnatos se serait empreSsé de se servir si Eumène ne lui avait pas écrasé le pied.
" Je vous en priej invita la dame, servez-vous librement, nous en avons en abondance. "
Tous les of ficiers se jetèrent sur ces plats qui leur évoquaient leurs repas d'enfance préparés par les mains expertes de leurs mères et de leurs nourrices. Alexandre se contenta de mordre c~ans un biscuit, puis il s'assit sur un tabouret près de la reine.
" Pourquoi es-tu venue me rendre visite, noble dame, s'il ~'est permis de te le demander ?
~--Ainsi que je te l'ai expliqué, je suis la reine de Carie, fille d~
Mausole, l'homme qui est enseveli dans le grand monu ment d'Halicarnasse.
Mon frère Pixodaros a usurpé mon trône et il gouverne la ville après s'être allié avec le satrape Orontobatès, dont il a épousé la fille. J'ai été
dépouillée non seulement de mon pouvoir, mais aussi de mes apanages, de mes rentes et
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