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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
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nom d’Henri qui, lui, est la plupart du temps en Normandie. Grâce notamment aux Pipe’s Rolls, on trouve trace du passage d’Aliénor à Bermondsey et Westminster bien sûr, mais aussi à Oxford, Woodstock, Marlborough, Salisbury, au château de Sherbone dans le Dorset, en Cornouailles ou dans le Devon et également dans l’île de Wight dont elle semble particulièrement apprécier le climat plus clément. Elle séjourne dans de nombreuses abbayes dont certaines sont créées par ses soins ; l’ordre de Fontevraud, notamment, connaît une grande extension sous son impulsion.
    Le lieu d’exercice du pouvoir et son instrument est la cour du roi, la curia regis. Cet instrument de pouvoir, Henri l’a façonné à sa main. Sur ce point la « modernité » du Plantagenêt est patente. En l’occurrence, elle reflète plus la personnalité d’Henri que celle d’Aliénor ; la duchesse reste très traditionnelle. On chercherait vainement une unité dans l’empire Plantagenêt. Il est composé de trop d’États différents, de trop de populations diverses. Si l’on en croit la légende, Geoffroy le Bel aurait laissé comme conseil à son fils de ne jamais chercher à unir tous ces territoires sous la même administration mais, au contraire, à respecter leurs diversités sans quoi il ne parviendrait jamais à les gouverner. Bien évidemment, Henri n’a pas appliqué ce conseil. De ses ancêtres normands, il a hérité un sens profond de l’administration qu’il va pousser à l’excès – c’est dans son tempérament – pour devenir un grand roi centralisateur.
    Le principe de centralisation est le fondement même de l’action politique d’Henri II. Le roi n’a jamais compris – ou voulu comprendre – que la seule unité de l’empire Plantagenêt était au fond sa personne même. Si cet empire a existé quelques dizaines d’années, c’est parce qu’il l’a voulu, qu’il l’a rêvé, et qu’il a eu la chance de rencontrer une femme qui a accepté de partager son rêve. Mais ce rêve ne lui a pas survécu, preuve qu’il n’était pas construit sur des fondations solides. Il était impossible, à l’époque, de centraliser un territoire aussi vaste. Pourtant Henri va s’y essayer avec acharnement. Un des instruments qu’il va utiliser est la cour. Cette mécanique de gouvernement était totalement nouvelle au XIIe siècle et n’avait de raison d’exister que par la nature même de l’empire et la personnalité de son souverain. La tentation est forte de regarder Henri II Plantagenêt comme un des premiers souverains modernes, du moins de voir dans son mode d’administration une étape historique sur le chemin de la constitution de l’État moderne. Malheureusement le délitement rapide de l’empire après la mort d’Henri et d’Aliénor fait qu’il n’a pas servi d’exemple dans les siècles qui ont immédiatement suivi sa disparition.
    Les historiens ont longtemps hésité à reconnaître que ce que les chroniqueurs de l’époque appellent curia ressemble beaucoup à la cour royale telle qu’elle existera quelques siècles plus tard et qui trouvera son apogée, en France du moins, à Versailles. Henri est entouré par une noria de serviteurs, de conseillers et de « courtisans ». L’un d’eux, Gautier Map, nous a laissé ce portrait : « Si je devais décrire la cour comme Porphyre définit le genre, je ne mentirais peut-être pas si je disais qu’elle est une multitude se rapportant d’une façon certaine à un seul principe. Nous sommes certes une multitude infinie, mais qui cherche à plaire à un seul. Aujourd’hui nous sommes ainsi une multitude, mais demain nous en deviendrons une autre. Pourtant, la cour ne change pas : elle est toujours la même. Cela serait aussi juste, si nous disions de la cour ce que Boèce a dit, en toute vérité, de la fortune, qu’elle n’est stable que dans sa mobilité {38} . » L’étude des Pipe's Rolls ainsi que celle des chartes royales a permis de déterminer que près de mille personnes se sont succédées dans la curia auprès d’Henri tout au long de son règne. Le chiffre aujourd’hui nous paraît infime au regard des administrations qui entourent nos chefs d’État mais, replacé à l’époque, il s’agit d’un nombre considérable. Jamais aucune cour royale n’avait réuni autant de monde.
    Le roi d’Angleterre considère sa cour comme un outil d’administration, de propagande et un moyen de

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