Amy, ma fille
comme souvent dans ce genre d’occasions, autour du lit de Janis afin d’accueillir la nouvelle venue.
Je suis quelqu’un de très émotif, particulièrement en ce qui concerne ma famille, et quand j’ai pris Amy dans mes bras, je me suis senti l’homme le plus chanceux du monde. J’étais tellement content d’avoir une fille. Après la naissance d’Alex, nous espérions qu’il puisse avoir une petite sœur. Janis et moi avions déjà décidé du prénom. Suivant la tradition juive, nous avons donné à nos enfants un prénom commençant par la même lettre qu’un ancêtre décédé. Nous avons baptisé Alex d’après mon père, Alec, décédé quand j’avais seize ans. Si nous avions un autre fils, je pensais l’appeler Ames. Un nom à consonance jazzy. « Amy », ai-je dit en pensant que ça sonnait un peu moins jazzy. Mais j’ignorais à quel point je me trompais. Et c’est ainsi qu’elle est devenue Amy Jade Winehouse, Jade en hommage à Jack, le père de mon beau-père Larry.
Amy était magnifique et ressemblait comme deux gouttes d’eau à son grand frère. Quand je regarde des photos d’eux à cet âge, j’ai du mal à les différencier. Le lendemain de sa naissance, j’ai emmené Alex voir sa petite sœur et nous avons pris des photos où il la tient dans ses bras.
Je n’avais pas vu ces clichés depuis presque vingt-huit ans quand, en juillet 2011, la veille de mon départ pour New York, j’ai reçu un coup de fil d’Amy. J’ai tout de suite su qu’elle était excitée.
— Papa, papa, il faut que tu viennes !
— Je ne peux pas, ma chérie. Tu sais bien, j’ai un concert ce soir et je prends l’avion tôt demain matin.
Mais elle a insisté.
— Papa, j’ai trouvé les photos, il faut que tu viennes !
Tout à coup, j’ai compris son excitation. Un jour, au cours de ses nombreux déménagements, une boîte de photos de famille s’était égarée. À l’évidence, elle venait de la retrouver.
— Il faut que tu viennes ! a-t-elle répété une fois de plus.
J’ai fini par monter dans mon taxi pour aller jusqu’à Camden Square, où je me suis garé devant chez elle.
— Je ne fais que passer, ai-je prévenu d’emblée, sachant combien il était difficile de lui dire non. Tu sais que j’ai plein de choses à faire aujourd’hui.
— Oh, tu viens toujours en coup de vent. Allez, papa, reste un peu.
Je l’ai suivie dans la maison et j’ai regardé les photos étalées sur la table. Ce n’était pas forcément les meilleures, mais manifestement, elles lui tenaient à cœur. On voyait Alex qui portait Amy bébé, puis une photo d’Amy adolescente. C’étaient les seules photos d’elle, tout le reste représentait la famille ou des amis.
Elle a montré une photo de ma mère.
— Mamie était magnifique, non ?
Et puis elle s’est tournée vers le cliché où Alex la portait dans ses bras.
— Oh, regarde-le ! a-t-elle dit, à la fois fière et taquine.
Pendant qu’elle passait en revue et commentait chaque photo, je me suis dit : « Cette fille, célèbre dans le monde entier, qui a apporté de la joie à des millions de gens, c’est juste une fille comme les autres qui aime sa famille. Je suis vraiment fier d’elle. Elle est géniale, ma fille. »
C’était facile d’être avec elle ce jour-là, elle était vraiment marrante. Au bout d’une heure environ, j’ai dû partir. En la serrant contre moi, j’ai senti qu’elle était en train de reprendre le dessus, elle avait récupéré des forces. Elle faisait de la musculation dans la salle de gym qu’elle avait installée chez elle.
— Quand tu seras revenu, on ira tous les deux en studio enregistrer ce duo, m’a-t-elle dit en me raccompagnant.
On avait deux chansons préférées, « Fly me to the Moon » et « Autumn Leaves », et Amy avait envie qu’on en enregistre une en duo.
— On va répéter pour de bon ! a-t-elle ajouté.
— J’attends de voir ça !
Nous avions souvent eu cette conversation par le passé. C’était bon de l’entendre parler comme ça de nouveau. Je lui ai dit au revoir avant de monter dans mon taxi.
C’est la dernière fois que j’ai vu ma fille chérie vivante.
*
Je suis arrivé à New York le vendredi et j’ai passé une soirée tranquille, seul. Le lendemain, je suis allé rendre visite à mon cousin Michael et sa femme Alison dans leur appartement de la 59 e Rue. Michael avait émigré aux États-Unis quelques années plus
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