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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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parlait avec Camille et Catherine.
    — C’est pas bien important, déclara l’institutrice en adoptant un air indifférent.
    — Je te dis ça juste parce que Rémi lui a parlé hier au magasin général. Il se demandait si notre meunier avait dans l’idée de tout vendre pour retourner vivre avec ses frères à Québec.
    — Puis ?
    — Il a dit que c’est pas pantoute son intention. À ce que je vois, on dirait même qu’il est pas mal moins gêné qu’avant, poursuivit Emma en désignant du menton Laurence Comtois.
    Bernadette n’eut pas à commenter parce que Donat venait d’approcher le boghei. La jeune fille et sa mère montèrent et la voiture se dirigea vers le haut de la côte du rang Sainte-Ursule.
    Durant le court trajet qui séparait les membres de la famille Beauchemin de la ferme du rang Saint-Jean, il régna un lourd silence dans le véhicule. Marie réfléchissait à ce qu’elle allait servir au dîner pendant que Donat, l’air sombre, se demandait si Anthime Lemire, le grand organisateur Bleu du comté, tiendrait parole. Lors de son passage à la maison, la veille, le gros homme avait tacitement promis au jeune organisateur le poste d’inspecteur des routes de Saint-Bernard-Abbé si leur candidat était élu à la mi-août.
    Pour sa part, Bernadette broyait du noir. Après plus d’un an de fréquentations, la fille cadette de Marie Beauchemin avait éconduit son amoureux sous le prétexte d’avoir besoin de réfléchir, de souffler, comme elle lui avait dit sans ménagement. Après tout ce temps, elle se demandait encore si elle l’aimait.
    Constant Aubé était conscient de ne pas être le plus beau, et sa boiterie causée par un accident alors qu’il était enfant n’arrangeait rien. Il avait toujours été assez timide avec les filles, même si les gens de la paroisse étaient unanimes à lui reconnaître des qualités de cœur et une générosité remarquables. De plus, il savait lire et écrire et ne manquait pas d’habileté autant comme meunier que comme cordonnier, métiers appris auprès de son grand-père décédé. Avant son départ, Bernadette le considérait comme un ami qui lui prêtait des romans.
    Après près d’un an d’absence, à la stupéfaction de tous, le jeune homme était revenu à Saint-Bernard-Abbé, avait acheté un lot dans le rang Saint-Jean et y avait fait construire un moulin à farine sur le bord de la rivière ainsi qu’une maison. Alors, Bernadette s’était empressée de l’attirer dans le salon familial, sans toutefois lui dire qu’elle l’aimait. De fait, cet amoureux transi ne suscitait guère le respect de la jeune institutrice qui savait jouer de sa séduction pour obtenir de lui tout ce qu’elle désirait. Elle se savait belle et attirante et ne se privait pas de jouer de la prunelle.
    Depuis le début de leur relation, il avait toujours fait ses quatre volontés et l’avait gâtée. Après son renvoi, le jeune meunier avait disparu durant près d’un mois. Une rumeur persistante circulait dans la paroisse comme quoi il n’avait pas l’intention de revenir à Saint-Bernard-Abbé et qu’il allait charger son ancien patron, Thomas Hyland, de vendre sa maison et son moulin.
    Un peu plus tôt, sa sœur Emma venait de lui apprendre qu’il était revenu depuis quelques jours.
    Les sourcils froncés, elle se demanda pour la centième fois depuis deux semaines si elle n’avait pas fait une fausse manœuvre en le congédiant aussi cavalièrement deux mois auparavant.
    Au début du mois de juin, elle s’était mis dans la tête que le séduisant Amédée Durand, inspecteur scolaire, était amoureux d’elle et n’attendait qu’un petit encouragement pour devenir son cavalier officiel. Elle avait renvoyé Constant pour faire de la place à son nouveau prétendant. Malheureusement pour elle, le jeune célibataire avait déjoué sans mal ses projets et avait feint de ne pas les remarquer. Lors de sa dernière visite à son école, il s’était limité à remplir avec zèle sa charge et il avait accordé au moins autant d’attention à Angélique Dionne, appelée à enseigner au début de l’automne dans la nouvelle école du village.
    Bref, très dépitée, elle était forcée de constater qu’il ne lui restait plus qu’à jouer de son charme pour attirer, encore une fois, le meunier dans son salon, ce qui, selon elle, n’allait pas être particulièrement difficile. N’était-elle pas l’une des plus belles filles de

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