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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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endiguer ce torrent de paroles. Hitler était semblable à un prisonnier qui dévoile à son accusateur de dangereux secrets. J’avais l’impression qu’une force invincible le poussait à parler.
     
    Pour apporter à la postérité la preuve qu’il avait toujours pris les meilleures décisions, Hitler fit venir des sténographes assermentés du Reichstag qui prenaient place à la table des conférences d’état-major et devaient noter tout ce qui s’y disait.
    Parfois, quand il pensait avoir trouvé la solution d’un dilemme, Hitler demandait : « Vous avez noté ? Mais oui, un jour on me donnera raison. Mais ces idiots de l’état-major ne veulent pas me croire. » Même quand les troupes refluaient en masse vers l’arrière, il triomphait encore : « Est-ce que je n’ai pas donné l’ordre de faire cela, il y a trois jours ? Encore une fois ils n’ont pas exécuté mes ordres et ensuite ils cherchent à s’en tirer par un mensonge en disant que ce sont les Russes ! Ils prétendent que ce sont les Russes qui ont empêché qu’on exécute les ordres, les menteurs ! » Hitler ne voulait pas admettre que ses défaites étaient dues à la position de faiblesse où il nous avait réduits en menant la guerre sur plusieurs fronts.
    Les sténographes, qui quelques mois avant leur arrivée portaient encore en eux l’image idéalisée de Hitler et de son génie supérieur, comme Goebbels le leur avait appris, avaient échoué sans s’en douter dans une véritable maison de fous. Maintenant ils étaient obligés de regarder la réalité en face. Je vois encore distinctement leur visage blême, tandis qu’ils prenaient leurs notes, et leur mine accablée lorsqu’ils faisaient les cent pas dans l’enceinte du quartier général pendant leurs heures de liberté. Ils m’apparaissaient comme des envoyés du peuple, condamnés à être les témoins directs de la tragédie qui se jouait.
    Hitler, prisonnier de sa théorie selon laquelle les Slaves n’étaient que des sous-hommes, avait prétendu au début que faire la guerre contre eux ne serait qu’un jeu d’enfant ; mais maintenant, plus la guerre se prolongeait, plus les Russes forçaient son respect. Il était impressionné par la ténacité dont ils avaient fait preuve pour supporter leurs défaites. Il parlait de Staline avec beaucoup de considération, tout en mettant en relief lesanalogies qu’il y avait entre sa propre endurance et celle de Staline. Il voyait dans le danger qui avait plané sur Moscou pendant l’hiver 1941 et la situation actuelle de l’Allemagne deux situations parallèles. Quand, dans un moment d’optimisme, il se reprenait à croire en la victoire  9  , il disait parfois, sur le ton de la boutade, que la meilleure chose à faire, si on parvenait à vaincre la Russie, serait de confier à Staline l’administration du pays, évidemment sous la tutelle de l’Allemagne, car pour s’y prendre avec les Russes, il était le meilleur chef qu’on puisse imaginer. Surtout il considérait Staline un peu comme un collègue. Peut-être est-ce en raison de ce respect qu’il avait à son égard qu’il ordonna, lorsque le fils de Staline fut fait prisonnier, de le bien traiter. Les choses avaient bien changé depuis le jour où, après l’armistice avec la France, Hitler avait prédit que la guerre avec l’Union soviétique ne serait qu’un jeu d’enfant.
    Hitler avait donc fini par acquérir la conviction d’avoir affaire à l’est à un adversaire résolu ; en revanche, il persista jusqu’à la fin de la guerre dans son idée préconçue que les soldats occidentaux étaient de piètres combattants. Même les victoires des Alliés en Afrique et Italie ne purent le faire démordre de cette idée que leurs troupes détaleraient à la première attaque sérieuse des Allemands. Il était d’avis que la démocratie diminuait les peuples. En été 1944, il ne cessait de réaffirmer sa conviction qu’à l’ouest on pouvait tout reconquérir en peu de temps. Les jugements qu’il portait sur les hommes d’État occidentaux étaient en rapport avec cette optique. Churchill était pour lui, il le répétait souvent aux conférences d’état-major, un démagogue, un incapable et un ivrogne invétéré ; de Roosevelt il affirmait très sérieusement que sa maladie n’était pas due à une poliomyélite mais à une paralysie d’origine syphilitique, et que par conséquent c’était un irresponsable. Là encore se

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