Azincourt
Anglais
creusèrent de nouvelles fosses plus près de la cité. Ils bombardèrent sans
relâche la porte de Leure, abattant ses deux tours et son arche de pierre, mais
les assiégés continuaient de résister.
Et le premier vent frais de la fin
de l’été apporta la pluie. Le grand mal persista ; et l’armée d’Henry se
mourait dans le sang, les vomissures et la merde.
Et Harfleur restait française.
Il fallut tout recommencer. Un autre
assaut, cette fois sur les décombres de la porte de Leure et, pour s’assurer
que les défenseurs ne concentrent pas leurs hommes sur cette portion sud-ouest
des remparts, les troupes du duc de Clarence attaqueraient la porte de
Montivilliers de l’autre côté de la cité.
— Cette fois, déclara sir John,
nous entrerons dans la ville. Cette maudite engeance refuse de se rendre !
Vous savez donc ce que vous pourrez faire ! Tout ce qui a vit, vous
occirez, et tout ce qui a giron, vous trousserez ! Tout ce qui se trouve
dans cette cité est vôtre, jusqu’aux derniers écus, chopes d’ale et
femmes ! Vôtre ! À présent, allez et prenez tout !
Les deux attaques conjointes
traversèrent donc les fossés remplis d’eau, les flèches se mirent à pleuvoir du
ciel, les trompettes sonnèrent leur défi à un soleil sans clémence et le
massacre recommença. Cette fois encore ce fut sir John Holland qui commanda, et
les hommes de sir John Cornewaille furent en première ligne et s’emparèrent
promptement des ruines de la porte de Leure avant d’y être brutalement arrêtés.
La porte menait naguère à une rue
étroite bordée de maisons, mais la garnison les avait abattues afin de ménager
un champ de bataille derrière lequel avait été élevée une autre barricade,
restée bien à l’abri des boulets anglais. La Messagère, montée en haut de la
barbacane, avait pu tirer quelques pierres sur ce nouvel ouvrage, mais elle ne
pouvait dépasser trois tirs par jour et les Français réparaient les dégâts
entre chacun d’eux. Derrière ce nouveau mur en maçonnerie, solives et paniers
remplis de terre, se tenaient des arbalétriers, et à peine les hommes d’armes
anglais apparurent-ils que les carreaux se mirent à voler.
Les archers ripostèrent, mais les
Français avaient fait preuve de ruse. La nouvelle muraille était pourvue de
trous et chicanes par lesquels les arbalétriers pouvaient tirer, mais assez étroits
pour qu’ils soient abrités des flèches anglaises. Hook, accroupi dans les
décombres, estima que chaque arbalétrier devait disposer de trois ou quatre
aides qui préparaient les armes, si bien que les tirs étaient ininterrompus et
nombreux et, de surcroît, d’autres carreaux pleuvaient depuis les fenêtres des
hautes maisons situées derrière la muraille. C’était ainsi qu’il aurait fallu
défendre Soissons, pensa-t-il.
— Nous allons devoir faire
amener une bombarde, gronda sir John avant de mener une charge contre la
barricade en criant à ses archers de la cribler de flèches.
Ils obéirent, mais les carreaux
continuaient de pleuvoir et, s’ils ne parvenaient pas à percer une armure, ils
déséquilibraient les hommes. Quand enfin une demi-douzaine parvint à atteindre
le mur et tenta de l’abattre, un chaudron rempli d’huile de poisson bouillante
fut déversé sur eux. Ils battirent en retraite, certains cruellement brûlés, et
sir John, l’armure luisante d’huile, revint en débitant un chapelet de jurons
d’impuissance. Les Français poussaient des vivats et agitaient leurs bannières.
Une fumée bleutée s’éleva derrière le nouveau rempart, promettant qu’un autre
chaudron d’huile accueillerait la prochaine tentative. Les catapultes anglaises
tentèrent de cribler le mur de pierres, mais la plupart des projectiles
passèrent au-dessus, allant s’écraser dans les décombres des maisons.
Le soleil montait. Les dernières
chaleurs de l’été étaient revenues et tous rôtissaient dans leurs armures. Des
serviteurs apportèrent de l’eau et de l’ale. Les hommes d’armes, au repos à
l’abri des ruines de la porte de Leure, ôtèrent leurs casques. Ils avaient les
cheveux collés et le visage luisant de sueur. Les archers étaient accroupis
dans les pierres, tirant parfois quand un adversaire se montrait ; mais
pendant de longues périodes, personne ne gâcha ses traits, chacun se contentant
d’attendre.
— Misérables ! cracha sir
John.
Hook vit deux défenseurs s’efforcer
d’ôter
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