Azincourt
armée
d’archers qui, au moment de quitter l’Angleterre, étaient trois fois plus
nombreux que les hommes d’armes, et à l’aube de la Saint-Crépin, six fois plus.
J’ai essayé, autant que possible, de
suivre les événements réels qui eurent lieu en cette pluvieuse Saint-Crépin en
France. En bref, il semble certain que les Anglais aient avancé les premiers
(et qu’Henry s’écria « Allons, compagnons ! ») et se soient
positionnés juste hors de portée de flèche des Français qui, imprudemment, les
laissèrent faire. Les archers provoquèrent ensuite la première attaque
française avec une volée de flèches. Ce premier assaut fut constitué d’hommes
d’armes censés disperser et défaire les archers si redoutés ; mais ces
attaques échouèrent, en partie parce que les chevaux, même revêtus d’armures,
étaient mortellement vulnérables aux flèches et parce que les épieux formaient
un obstacle suffisant pour arrêter une telle charge dans son élan. Certains des
chevaux français, affolés par les flèches, semblent avoir galopé jusque dans
les rangs serrés des Français, les désorganisant totalement.
Ce premier bataillon, probablement
composé d’environ huit mille hommes d’armes, rencontrait déjà de graves
difficultés. Les champs d’Azincourt étaient fraîchement labourés pour le blé
d’hiver et il est exact, comme le déclare Nicholas Hook, que le sillon est plus
profond pour le blé d’hiver que pour le blé de printemps. Des pluies
torrentielles étaient tombées la veille, les Français pataugeaient donc dans un
bourbier visqueux. Ce dut être cauchemardesque.
Pendant tout ce temps, les flèches
pleuvaient. Et plus les Français approchaient des lignes anglaises, plus les
frappes étaient mortelles. Un bon archer pouvait tirer quinze flèches à la
minute – je l’ai vu faire avec un arc d’une force de cinquante
kilogrammes, soit dix à quinze kilos de moins que les arcs d’Azincourt, mais
bien plus que n’importe quel arc de compétition moderne. Si l’on estime que les
archers d’Azincourt tiraient en moyenne douze flèches à la minute et qu’ils
étaient cinq mille, en une minute soixante mille flèches frappaient les
Français, soit mille à la seconde et six cent mille en dix minutes. Ce déluge
de flèches parvint à forcer les flancs désorganisés des Français à se replier
vers le centre, c’est-à-dire sur les hommes d’armes anglais.
La bataille dura entre trois et
quatre heures, mais elle peut être considérée comme ayant été réglée dès les
premières minutes où le bataillon français atteignit les lignes anglaises. Ce
premier bataillon comprenait la plupart des grands noms de l’aristocratie
française : c’est ainsi que périrent les ducs d’Alençon, de Bar et de
Brabant, l’archevêque de Sens, le connétable de France et au moins huit comtes.
Les Anglais ne furent pas pour autant totalement épargnés : le duc d’York
fut tué, tout comme le comte de Suffolk (dont le père mourut de dysenterie à
Harfleur).
Le deuxième bataillon français
devait renforcer le premier, mais entre-temps les Français en étaient réduits à
tenter de combattre par-dessus un rempart de cadavres et de mourants, tout en
affrontant les archers anglais qui avaient délaissé leurs arcs et attaquaient
avec vouges, épées et masses.
Peu après l’assaut du deuxième
bataillon français, une petite troupe de cavaliers, menés par le sire
d’Azincourt, attaqua le convoi d’intendance anglais. Cet événement, et
l’apparent empressement des derniers Français à attaquer, convainquit Henry de
faire exécuter les prisonniers. À ce stade, il y avait environ deux mille
prisonniers français à l’arrière des lignes anglaises. Henry envoya un écuyer
et deux cents archers perpétrer ce massacre, qui cessa manifestement assez
rapidement quand il devint clair que la menace du troisième bataillon français
s’était évanouie. Les Français en avaient eu pour leur compte, les survivants
commençaient à battre en retraite : Henry venait de remporter
l’extraordinaire victoire d’Azincourt.
La bataille fut un massacre qui,
comme le sac de Soissons, bouleversa la chrétienté. Soissons et Azincourt,
étrangement liés par saint Crépin et saint Crépinien, furent considérés comme
extraordinaires.
Hormis Thomas Perrill, j’ai pris
tous les noms des archers d’Azincourt dans les registres d’enrôlement de
l’armée d’Henry, qui
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