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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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ils se mirent à faire des clowneries, exagérant leur claudication, se
mettant à quatre pattes comme des grenouilles, rampant de côté comme des crabes
ou encore, tordant leurs vieux cous décharnés les uns vers les autres, comme le
font les grues à la saison des amours, ce qui fit hurler la foule de rire. Mais
ces vieux danseurs ne se sentaient plus et ils prolongèrent tant leurs
ridicules gambades, que les prêtres durent presque les pousser hors de la
scène. Votre Excellence sera peut-être intéressée d’apprendre que toutes ces
contorsions n’influencèrent jamais Tlaloc en faveur d’un seul infirme, bien au
contraire, beaucoup étaient cloués au lit après une telle nuit, mais ceux qui
en étaient encore capables revenaient danser chaque année.
    Ensuite, ce fut le tour des auinimi, ces femmes dont le corps est
réservé aux soldats et aux chevaliers. Leur danse s’appelait le quequezcuicatl,
« la danse qui excite », parce qu’elle éveillait de telles réactions
chez les spectateurs, hommes et femmes, jeunes et vieux, qu’il fallait souvent
les empêcher de se précipiter parmi les danseuses pour faire des choses tout à
fait scandaleuses. Les auinimi dansaient pourtant seules et éloignées les unes
des autres, mais leurs mouvements étaient si évocateurs qu’on aurait dit
qu’elles avaient un compagnon invisible et nu qui…
    Bon, bon. Lorsque les auinimi eurent quitté la place, en sueur,
chancelantes et les cheveux emmêlés, arrivèrent à l’appel péremptoire du
tambour-dieu, un garçon et une fille d’environ quatre ans dans une litière
portée par des prêtres. Etant donné le relâchement qu’il y avait eu, sous le
règne de Tizoc, dans la mise sur pied des guerres, on n’avait fait prisonnier
aucun enfant d’une autre nation pour le sacrifice de la nuit, aussi les prêtres
avaient-ils dû acheter deux enfants d’esclaves. Les quatre parents étaient
assis devant et regardaient fièrement leurs petits qui défilèrent plusieurs
fois devant eux en faisant de multiples tours sur la place. Parents et enfants
avaient raison d’être fiers et heureux, car les enfants avaient été achetés
depuis longtemps et on les avait bien nourris. Ils étaient bien gras et
respiraient la santé. Ils faisaient des signes joyeux à leurs parents et à tous
ceux qui les acclamaient. Ils étaient mieux vêtus qu’ils n’auraient jamais pu
l’espérer, car on les avait déguisés en esprits tlaloque, les serviteurs du
Dieu pluie. Ils portaient de petits manteaux de coton bleu-vert parsemés de
gouttes de pluie argentées et on leur avait accroché des ailes de papier blanc
dans le dos.
    De même que lors de toutes les cérémonies en l’honneur de Tlaloc, ces
enfants ne savaient pas ce qui les attendait. Les couleurs, la musique et les
lumières les remplissaient d’une telle excitation qu’ils ne cessaient d’éclater
de rire et ils rayonnaient comme le soleil. C’était exactement le contraire de
ce qu’on souhaitait. Aussi, comme d’habitude, les prêtres qui portaient la
chaise durent leur pincer les fesses en cachette. D’abord les enfants furent
surpris, puis ils se mirent à geindre et à pleurer et enfin à éclater en
sanglots, comme il le fallait. Plus il y avait de hurlements et de larmes, plus
il y aurait d’orages et de pluie.
    La foule se joignit à ces lamentations, même les hommes faits et les
guerriers endurcis, au point que les collines environnantes résonnaient de tous
ces sanglots, de ces cris et de ces battements de cœur. Tous les tambours et
les instruments de musique vinrent s’ajouter au battement du tambour-dieu et
aux hurlements de la foule au moment où les prêtres déposèrent la chaise sur un
côté du bassin de pierre, au pied de la pyramide. Ce brouhaha était si
assourdissant que même le chef des prêtres était incapable d’entendre les
paroles qu’il psalmodiait devant les enfants tandis qu’il les élevait tous deux
vers le ciel pour que Tlaloc puisse les voir et les agréer.
    Deux assistants-prêtres s’approchèrent alors, tenant l’un, un petit pot
et l’autre, un pinceau. Le chef des prêtres se pencha vers les enfants, et bien
que personne ne pût l’entendre, tout le monde savait qu’il leur disait qu’il
fallait qu’on leur mette un masque pour que l’eau ne leur rentre pas dans les
yeux, pendant qu’ils nageraient dans l’eau sacrée. Ils reniflaient, les joues
mouillées de larmes, mais ils ne protestèrent pas quand

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