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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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corbeau, mettant sa tête par terre,
regardait son maître de côté, comme pour lui dire :
« Redis-moi ça. »
    Barnabé, comprenant parfaitement son désir,
lui répéta la phrase bien des fois. L'oiseau l'écouta avec une
profonde attention, répétant quelquefois ce cri populaire à voix
basse, comme pour comparer les deux manières et pour s'essayer dans
ce nouvel exercice ; quelquefois battant des ailes ou
aboyant ; quelquefois enfin, dans une espèce de désespoir,
tirant une multitude infinie de bouchons retentissants, avec une
obstination extraordinaire.
    Barnabé était si occupé de son oiseau favori,
qu'il ne s'aperçut pas d'abord de l'approche de deux cavaliers qui
venaient au pas, juste dans la direction du poste qu'il avait à
garder. Cependant, quand ils furent à une portée de fusil, il les
vit, sauta vivement sur ses pieds, commanda à Grip de rentrer, prît
son drapeau à deux mains, et resta tout droit à attendre qu'il pût
reconnaître si c'étaient des amis ou des ennemis.
    Presque au même instant, il vit que, de ces
deux cavaliers, l'un était le maître et l'autre le
domestique ; le maître était précisément lord Georges Gordon,
devant lequel il se tint la tête découverte, les yeux fixés en
terre.
    « Bonjour, lui dit lord Georges sans
arrêter son cheval avant d'être arrivé tout près de lui ; tout
va bien ?
    – Tout est tranquille, monsieur, tout va
bien, cria Barnabé. Les autres sont partis : ils ont pris par
là ; voyez-vous ce sentier-là. Ils étaient beaucoup ?
    – Ah ! dit lord Georges en le
regardant d'un air sérieux, et vous ?
    – Oh ! ils m'ont laissé ici en
sentinelle… pour monter la garde… pour veiller à la sûreté du poste
jusqu'à leur retour, ce que je ferai, monsieur, pour l'amour de
vous. Vous êtes un bon gentilhomme, un excellent gentilhomme… ça,
c’est sûr. Vous avez bien du monde contre vous ; mais vous
leur ferez voir leur maître. N'ayez pas peur.
    – Qu'est-ce que c’est que ça ? dit
lord Georges, en montrant le corbeau qui regardait du coin de l'œil
à la porte de l'écurie ; mais en faisant cette question, il
regardait toujours Barnabé d'un air pensif, et, à ce qu'il
semblait, avec une certaine inquiétude.
    – Comment, vous ne savez pas ?
répondit Barnabé, éclatant de rire ; ne pas savoir ce que
c'est ! c'est un oiseau d'abord, mon oiseau, mon ami Grip.
    – Un diable, une bouilloire, Grip ;
Polly, un protestant, pas de papisme ! cria le corbeau.
    – Ce n'est pas l’embarras, ajouta
Barnabé, passant la main sur le col du cheval de lord Georges, et
parlant doucement ; vous n'aviez pas tort de me demander ce
que c'est : car souvent je n'en sais rien moi-même, et il faut
que je sois familiarisé avec lui comme je le suis, pour croire que
ce n'est qu'un oiseau. C'est plutôt un frère pour moi, que Grip… il
est toujours avec moi, toujours jasant… toujours content… n'est-ce
pas, Grip ? »
    L'oiseau répondit par un croassement amical,
et sautant sur le bras de son maître, que Barnabé lui avait tendu
pour cela, se laissa caresser d'un air de parfaite indifférence
tournant son œil mobile et curieux, tantôt vers lord Georges,
tantôt vers son domestique.
    Lord Georges, se mordant les ongles d'un air
un peu déconfit, regarda Barnabé quelque temps en silence, puis il
fit signe à son domestique de venir plus près de lui.
    John Grueby toucha le bord de son chapeau par
respect et s'approcha.
    « Aviez-vous déjà vu ce jeune
homme ? lui demanda son maître à voix basse.
    – Deux fois, milord, dit John. Je l'ai vu
dans la foule hier au soir et samedi.
    – Est ce que… est-ce que vous lui avez
trouvé l'air aussi singulier, aussi étrange ? continua lord
Georges d'une voix faible.
    – Fou ! répondit John avec une
concision énergique.
    – Et qu'est-ce qui vous fait croire qu'il
est fou, monsieur ? lui dit son maître d'un ton de dépit. Je
vous trouve bien prompt à lâcher ce mot-là. Qu'est-ce qui vous fait
croire qu'il est fou ?
    – Milord, vous n'avez qu'à voir son
costume, ses yeux, son agitation nerveuse ; vous n'avez qu'à
l'entendre crier : « Pas de papisme ! » Fou,
milord.
    – Ainsi, parce qu'un homme s'habille
autrement que les autres, répliqua son maître avec colère, en
jetant un coup d'œil sur son propre habillement ; parce qu'il
n'est pas dans son port et dans ses manières exactement comme les
autres, et qu'il épouse avec chaleur une cause

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