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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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réclamiez de ma part, vous savez qu'ils vous appartiennent
de droit, qu'ils vous sont pleinement acquis.
    – Que diriez-vous donc, monsieur, si
j'étais venue, répliqua-t-elle, moi qui n'ai pas d'autre ami que
vous sur la terre, pour rejeter votre aide à partir de ce moment,
et pour vous dire que désormais je me lance sur l'océan du monde,
seule et sans soutien, prête à y enfoncer ou y surnager, selon que
le ciel en décidera ?
    – Vous auriez, si vous étiez venue vers
moi dans une semblable intention, dit avec calme M. Haredale,
quelque motif à me donner sans doute d'une conduite si
extraordinaire, et, malgré l'étonnement que pourrait me causer une
résolution si soudaine et si étrange, naturellement je ne le
traiterais pas légèrement.
    – C'est là, monsieur, répondit-elle, ce
qu'il y a de déplorable dans mon malheur. Je ne puis vous donner de
motif. Ma résolution, sans explication aucune, est tout ce que je
puis vous offrir. C'est mon devoir, mon devoir impérieux et forcé.
Si je ne le remplissais pas, je serais une créature vile et
criminelle. Maintenant que je vous ai dit cela, mes lèvres sont
scellées ; je ne puis vous en dire davantage. »
    Comme si elle se fût sentie soulagée d'en
avoir tant dit, et que cela lui eût donné du nerf pour le restant
de sa tâche, elle continua de parler d'une voix plus ferme et avec
plus de courage.
    « Le ciel m'est témoin, comme l'est mon
propre cœur (et le vôtre, chère demoiselle, parlera pour moi, je le
sais), que j'ai vécu, depuis le temps dont nous avons tous d'amers
sujets de nous souvenir, dans un dévouement et une gratitude
invariables pour cette famille. Le ciel m'est témoin que, n'importe
en quel lieu j'aille, je conserverai les mêmes sentiments à jamais
inaltérables. Il m'est témoin encore qu'eux seuls me poussent dans
la voie que je vais suivre, et dont rien à présent ne me
détournera, aussi vrai que j'espère en la miséricorde divine.
    – Voilà d'étranges énigmes, dit
M. Haredale.
    – Dans ce monde, monsieur,
répliqua-t-elle, peut-être ne seront-elles jamais expliquées. Dans
un autre, la vérité se découvrira d'elle-même. Et puisse ce temps,
ajouta-t-elle à voix basse, être bien éloigné !
    – Voyons, dit M. Haredale, si je
vous comprends bien ; car je doute de mes propres sens.
Voulez-vous dire que vous êtes volontairement résolue à vous priver
des moyens de subsistance que vous avez si longtemps reçus de
nous ; que vous êtes déterminée à résigner la rente que nous
vous avons faite il y a vingt ans : à quitter votre maison,
votre intérieur, tout ce qui vous appartient, pour recommencer une
vie nouvelle ; et cela pour quelque secret motif ou quelque
monstrueuse fantaisie, qui n'est pas susceptible d'explication, qui
n'existe que d'aujourd'hui et n'a pas cessé de dormir dans l'ombre
pendant tout ce temps ? Au nom de Dieu, à quelle illusion
êtes-vous en proie ?
    – Aussi vrai que je suis profondément
reconnaissante, répondit-elle, des bontés de ceux qui, vivants ou
morts, ont été ou sont les propriétaires de cette maison ;
aussi vrai que je ne voudrais pas que son toit tombât et m'écrasât,
ou que ses murs suassent du sang, lorsqu'ils entendent prononcer
mon nom ; aussi vrai est-il que je ne subsisterai plus jamais
aux dépens de leur libéralité, ni que je ne souffrirai qu'elle aide
à ma subsistance. Vous ne savez pas, ajouta-t-elle avec
promptitude, à quels usages vos bienfaits peuvent être appliqués,
dans quelles mains ils peuvent passer. Je le sais, et j'y
renonce.
    – Sûrement, dit M. Haredale, vous
êtes maîtresse de l'emploi de cette rente.
    – Je le fus. Je ne saurais l'être plus
longtemps. Il se peut qu'elle soit (elle l'est) consacrée à un
usage qui raille les morts dans leurs tombeaux. Cela ne peut que me
porter malheur, attirer encore quelque affreuse condamnation du
ciel sur la tête de mon cher fils, dont l'innocence souffrira des
fautes de sa mère.
    – Quels mots viens-je d'entendre
là ? cria M. Haredale en la regardant avec étonnement.
Parmi quels associés êtes-vous donc tombée ? quelle est cette
faute où l'on vous aurait entraînée par surprise ?
    – Je suis coupable et pourtant
innocente ; j'ai tort et j'ai raison ; pure d'intention,
et contrainte de protéger et d'aider les méchants. Ne me
questionnez pas davantage, monsieur ; mais croyez que je suis
plutôt à plaindre qu'à condamner. Il faut que j'abandonne

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