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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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depuis que l'horloge
avait sonné huit heures, il ne donnait pas d'autres signes de vie
que de respirer avec un ronflement sonore et continuel (quoiqu’il
fût très éveillé), de porter de temps en temps son verre à ses
lèvres, de faire tomber les cendres de sa pipe et de la bourrer de
nouveau Il était maintenant dix heures et demie. M. Cobb et le
long Phil Parkes étaient ses compagnons, comme jadis, et, pendant
deux mortelles heures et demie, personne de la société n’avait
prononcé un mot.
    À force de s'asseoir ensemble à la même place
et dans les mêmes positions relatives, à force de faire exactement
la même chose durant un grand nombre d'années, serait-il vrai que
les gens finissent par acquérir un sixième sens, ou, à son défaut,
la faculté occulte de s'influencer les uns les autres qui en tient
lieu ? c'est une question que je laisse à la philosophie le
soin de résoudre. Mais ce qu'il y a de certain, c'est que le vieux
John Willet, M. Parkes et M. Cobb, étaient tous trois
fermement convaincus qu’ils formaient un trio de jolis lurons,
qu'ils étaient plutôt des esprits d'élite qu'autrement. Il est
encore certain qu’ils se regardaient les uns les autres de temps en
temps, comme s'il y avait entre eux un perpétuel échange d'idées,
qu'aucun d’eux ne considérait nullement ni lui ni son voisin comme
silencieux, et que chacun d'eux, quand il rencontrait le regard
d’un autre, faisait un signe de tête affirmatif, comme pour lui
dire : « Ce que vous venez de dire là est parfait,
monsieur, on ne pouvait pas mieux s'exprimer, et je suis tout à
fait de votre avis. »
    La salle était si chaude, le tabac si
délicieux, le feu si caressant, que M. Willet commença par
degrés à s'assoupir, mais comme il avait supérieurement acquis, par
suite d'une longue habitude, l'art de fumer dans son sommeil, et
comme sa respiration était presque la même, qu'il fût éveillé ou
endormi, sauf que dans ce dernier cas il éprouvait quelquefois une
petite difficulté du genre de celle qu'un charpentier rencontre
lorsque son rabot ou sa plane trouve un nœud sur son chemin, aucun
de ses camarades ne s'était aperçu de la chose, jusqu'à ce qu'il
rencontra un de ces obstacles et fut obligé de s'y reprendre.
    « Voilà Johnny parti, chuchota
M. Parkes.
    – Il ronfle comme un sabot, » dit
M. Cobb.
    Ils n'en dirent pas davantage jusqu'à ce que
M. Willet arriva à un autre nœud, un nœud d'une dureté
surprenante, qui promettait de le jeter dans des convulsions, mais
que, par un effort tout à fait surhumain, il surmonta enfin sans se
réveiller.
    « Il a le sommeil terriblement
dur, » dit M. Cobb.
    M. Parkes, qui était peut-être lui-même
un dormeur de première force, répliqua avec quelque dédain :
« Ah bien oui, joliment ! » et dirigea ses yeux vers
une affiche collée sur le manteau de la cheminée. Le haut de cette
affiche avait pour décoration une gravure sur bois, laquelle
représentait un jeune garçon d'un âge tendre, fuyant d'un pied
leste et portant un paquet au bout d'un bâton, et, pour aider à
l'intelligence des spectateurs, un poteau avec une main et une
borne milliaire, à côté du fugitif. M. Cobb tourna également
ses yeux dans la même direction, et examina le placard comme si
c'était la première fois qu'il l'eût vu. Or ce placard était un
document que M. Willet lui-même avait dicté lors de la
disparition de son fils Joseph ; il y informait la grande
noblesse, la petite noblesse et le public en général, des
circonstances dans lesquelles son fils avait quitté la
maison ; il dépeignait son costume et son extérieur ; et
il offrait une récompense de cinq livres sterling à la personne ou
aux personnes qui emballeraient le fugitif et le renverraient sain
et sauf au Maypole à Chigwell, ou qui le logeraient dans quelqu'une
des prisons de Sa Majesté jusqu'à ce que son père eût le temps de
venir le réclamer. Dans cet avertissement, M. Willet avait,
d'une manière obstinée, en dépit des avis et des prières de ses
amis, persisté à dépeindre son fils comme « un petit
garçon, » bien plus, dans son signalement, il lui donnait
dix-huit pouces ou deux pieds de moins que sa taille réelle Cette
double inexactitude suffisait pour expliquer peut-être l'unique
résultat que l’affiche avait produit, c'est-à-dire la transmission
à Chigwell, en différentes fois et avec des frais considérables, de
quelque quarante-cinq

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