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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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tête. Gashford !
    – Milord.
    – Vous ne pensez pas, dit-il en se
tournant et s'agitant dans son lit, que ces gens-là
m'abandonneront, quand l'heure sera venue ? J'ai parlé
hardiment pour eux, j'ai risqué beaucoup, je n'ai rien ménagé. Ils
ne reculeront point, n'est-ce pas ?
    – N'ayez pas peur, milord, dit Gashford
avec un regard significatif, qui était plutôt l'expression
involontaire de sa propre pensée qu'une réponse aux inquiétudes de
Sa Seigneurie, car la figure de lord Georges était tournée dans
l'autre sens. N'ayez pas peur, il n'y a pas de danger.
    – Il n'y a pas non plus à craindre,
dit-il en se remuant encore davantage, qu'on ne les… mais non, on
ne peut pas les punir pour s'être ligués dans ce but. Le droit est
de notre côté, quand même la force serait contre nous. Vous vous
sentez convaincu de cela comme moi, n'est-ce pas ?
Voyons ! la main sur la conscience ? »
    Le secrétaire commençait sa réponse par :
« Vous ne doutez pas… » lorsque l'autre l'interrompit, et
répliqua avec impatience :
    « Douter. Non. Qui dit que je
doute ? Si je doutais, re-nierais-je parents, amis, toute
chose, en faveur de ce malheureux pays ? ce malheureux pays,
cria-t-il en se redressant dans son lit, après s'être répété à
lui-même la phrase : « en faveur de ce malheureux
pays » au moins une douzaine de fois, oublié de Dieu et des
hommes, livré à une dangereuse confédération des puissances
papales, en proie à la corruption, à l'idolâtrie, au
despotisme ! Qui peut dire après cela que je doute ? ne
suis-je pas appelé, élu et fidèle ? Voyons ! le suis-je
ou ne le suis-je pas ?
    – Oui, fidèle à Dieu, au pays et à
vous-même, cria Gashford.
    – Je le suis, je le serai, je le dis
derechef, je le serai jusqu'au billot. Qui est-ce qui en dit
autant ? est-ce vous ? est-ce quelque autre ? Qu'on
m'en cite un au monde seulement. »
    Le secrétaire baissa la tête avec une
expression de complet acquiescement à tout ce que son maître avait
dit ou pourrait dire ; et lord Georges, s'affaissant peu à peu
sur son oreiller, s'endormit.
    Quoiqu'il y eût quelque chose de risible dans
la véhémence de ses manières rapprochée de sa maigreur et de son
aspect disgracieux, il n'y avait vraiment pas de quoi rire pour un
homme doué de quelque sensibilité ; ou bien, s'il eût cédé à
ce premier mouvement, il en aurait été fâché, il se le serait
reproché à lui-même le moment d'après. Lord Gordon était aussi
sincère dans sa violence que dans son hésitation. Il était
naturellement enclin au faux enthousiasme, il avait la vanité de
vouloir être un chef de parti ; c'étaient là les deux plus
grands défauts de son caractère. Le reste n'était que faiblesse…
pure faiblesse ; et c'est le malheureux lot des hommes
faibles, que même leurs sympathies, leurs affections, leur
confiance… toutes les qualités qui, dans les esprits mieux
constitués, sont des vertus, dégénèrent en défauts, s'ils ne
deviennent pas des vices complets.
    Gashford, en dirigeant vers le lit plus d'un
regard rusé, resta assis à ricaner de la folie de son maître,
jusqu'à ce qu'une profonde et lourde respiration l'eût averti qu'il
pouvait se retirer. Fermant son pupitre, et le replaçant dans la
malle (mais non pas sans avoir pris d'un compartiment secret deux
imprimés), il se retira avec précaution. Comme il s'en allait, il
regarda en arrière pour considérer la figure de son maître endormi.
Au-dessus de la tête de lord Georges, les panaches poudreux qui
couronnaient la royale couche du Maypole s'agitaient d'un air
triste et lugubre comme sur une bière.
    S'arrêtant sur l'escalier pour écouter si tout
était tranquille, et pour retirer ses souliers de peur que ses pas
n'alarmassent près de là quelque dormeur qui aurait le sommeil
léger, il descendit au rez-de-chaussée, et jeta un de ses imprimés
sous la grande porte de la maison ; cela fait, il se coula
doucement, revint à sa chambre, et de la fenêtre laissa tomber dans
la cour l'autre imprimé, soigneusement roulé autour d'une pierre,
pour que le vent ne l'emportât pas.
    Ces proclamations avaient au dos la
suscription suivante : « À tout protestant aux mains
duquel ceci tombera, » et à l'intérieur :
    « Hommes et frères, quiconque trouvera
cette lettre doit la regarder comme un avertissement d'aller
rejoindre sans délai les amis de lord Georges Gordon. De grands
événements se

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