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Bataillon de marche

Bataillon de marche

Titel: Bataillon de marche Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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pensées papillotaient dans sa cervelle comme une poignée de jetons de couleur lancés sur un tapis sombre. De nouveau il se retourna contre la porte. Fallait-il sonner ? Qui viendrait ; un sous-ordre ? N’était-il pas un officier très au-dessus des sous-ordres ?
    Il entendit traîner quelque chose de lourd dans le couloir. Peut-être celui qu’ils avaient été chercher pour son dernier voyage s’était-il évanoui ? En ferait-il autant quand l’heure serait venue ? Ils auraient des casques d’acier et des fusils. Non, il ne pensait pas pouvoir rester courageux. On serait sûrement forcé de le traîner comme l’autre… En écoutant bien, pourrait-il entendre la salve ?
    Il resta immobile et tendit l’oreille. Puis il marcha vers le carreau et se hissa sur les bras pour voir quelque chose, mais le verre laiteux était impénétrable. Il se laissa retomber avec une secousse, et son cœur s’arrêta presque de battre en entendant une clef qui tournait dans la serrure. On venait le chercher…
    – Maman ! gémit-il. J’ai peur !
    La lourde porte livra passage à un immense Obergefreiter (Caporal-chef) en uniforme noir des troupes de char, avec la tête de mort sur les revers. De petits yeux perçants le fixèrent, puis l’Obergefreiter hocha la tête comme s’il se rendait compte que ce qu’il voyait était dans l’ordre des choses.
    – Ça ne va pas, hein, lieutenant. Ça ne sert à rien d’être lieutenant. Je ne suis qu’un misérable Obergefreiter mais je suis mieux loti que toi. J’ai des esclaves qui ont le droit de me procurer de la bière, et si tu étais libre, et pas lieutenant, tu en aurais aussi.
    Le jeune lieutenant, la bouche ouverte, regardait son gardien qui se laissa tranquillement tomber sur le banc, et lui fit signe d’en faire autant. Une conversation entre un officier et un simple soldat ! Inimaginable. Et le respect dû à l’uniforme ? Il se regarda comme pour s’assurer qu’il portait bien celui de lieutenant d’artillerie. Alors, ce grand buffle d’Obergefreiter… Pour la première fois de sa courte vie, il se mit à douter de la vérité de tout ce qu’on lui avait appris.
    – Tiens, mon gars, continua l’Obergefreiter en crachant par terre…
    « Mon gars ! » Lui, un lieutenant ! Il fut sur le point de protester violemment, mais songeant à sa situation, il se laissa tomber sans forces sur le banc à côté de cette montagne humaine. Tout à coup, il s’aperçut que l’étui du revolver de son gardien était entrebâillé. On voyait luire le gros revolver de l’armée qui semblait sourire à une invitation. Un geste rapide et l’arme était à lui. Tous les géants étaient des lourdauds, disait-on. La tentation l’électrisait… Et ce gros trousseau de clefs dont jouait l’Obergefreiter… Il y avait là un passepartout. Quelle perspective ! La liberté, tout simplement. Ici, c’étaient tous des simples soldats ou des sous-officiers, espèce idiote qui avait la peur des galons. On en viendrait facilement à bout. La confiance lui regonfla le cœur. Mon Dieu !… Il s’en fallait d’une seconde. Ce gros imbécile, un coup de crosse et on l’assommait. Le monde ne perdrait pas grand-chose. Le lieutenant respira péniblement, l’excitation l’étouffait…
    – Vois-tu, lieutenant, continuait l’Obergefreiter, il faut avoir du courage. On te tuera sans que tu t’en aperçoives. Peut-être pourras-tu obtenir du médecin qu’il te donne quelque chose qui fasse faire une virée à ta conscience ; alors on perd la boule. C’est ce qu’ils ont (fait au major général, hier. On l’a piqué, et de major a claqué des talons devant nous. Julius, l’ennemi des Juifs, l’a attaché au poteau sans qu’il dise ouf. Même pas quand le lieutenant Ohlsen commanda : «  En joue ! » Généralement, à ce moment-là, ils sont tous sens dessus dessous et ils gueulent des histoires à nous autres, pauvres crétins, comme si on y pouvait quelque chose. Nous, on n’est que des invités, comme dit le blédard qui a toujours raison. Tu ne connais pas le blédard ? Un type formidable, ça je peux le dire. Je lui ai donné une tournée monstre la première fois que je l’ai vu. Il a été douze ans dans une organisation de meurtre, en Afrique, à tirer des bicots. Ça se passe dans le sable brûlant ; après on va au bordel avec les filles arabes, mais le blédard lui, ne peut plus rien. On lui a coupé ce qui dépasse parce qu’il

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