Byzance
Avant-propos
Pendant la première moitié du XIe siècle, tandis que l’Europe se traînait non sans heurts vers la fin des âges obscurs, l’Empire byzantin se trouvait à son apogée. Héritière directe de la puissance et de la gloire de la Rome antique, Byzance exerçait son hégémonie depuis sept siècles. Le pivot de ce pouvoir apparemment invincible était Constantinople, la magnifique capitale fortifiée, fondée en 330 apr. J.-C. par Constantin le Grand, premier empereur chrétien. Invulnérable derrière ses kilomètres de hautes murailles, la Reine des Cités comptait un million d’habitants et passait pour une somptueuse métropole comparée aux gros bourgs sordides qui portaient les noms de Londres et de Paris.
L’homme qui présidait à la splendeur de Byzance était le plus puissant de la terre. Seigneur du Monde entier, l’empereur byzantin régnait sur le même plan que le Seigneur de l’Univers, le Christ Pantocrator. Mais plus d’un mortel convoitait les prérogatives divines de l’empereur, qui craignait souvent pour sa vie jusque dans les retraites les plus opulentes de son immense Palais sacré. Pour cette raison, les empereurs byzantins s’entouraient souvent d’une garde composée de mercenaires vikings, réputés pour leur loyauté inconditionnelle et leur intraitable férocité. Ces quelques centaines de guerriers varègues devinrent bientôt essentiels à la stabilité et à la survie du plus puissant empire du monde.
Le plus célèbre de tous les Varègues fut un jeune prince norvégien, Haraldr Sigurdarson, qui joua un des rôles les plus décisifs qu’aucun homme ait jamais assumé sur le théâtre de l’histoire. Ce livre est le récit de sa vie.
Il s’agit d’un roman, mais il se fonde sur des faits historiques minutieusement vérifiés, sur une vérité plus extraordinaire que n’importe quelle fiction. Tous les personnages, sauf les plus accessoires, ont réellement vécu et sont morts il y a presque mille ans. Tous les événements majeurs ont réellement eu lieu.
Par souci d’authenticité, divers termes techniques en usage au XIe siècle ont été conservés. Les unités de mesure le plus fréquemment utilisées par les peuples du Nord étaient le pouce – environ deux centimètres et demi ; l’aune ou coudée – quarante-cinq centimètres (mesure approximative de l’avant-bras entre le coude et l’index) ; l’archée – distance d’un trait d’arc, environ deux cents mètres ; et la ramée distance – parcourue à la rame sans période de repos, soit environ onze kilomètres. Les Byzantins utilisaient la brasse – six pieds romains d’environ trente centimètres. Le stade, unité tirée de la longueur de la piste d’hippodrome, équivalait à environ deux cents mètres.
Les Vikings du XIe siècle ne s’appelaient jamais entre eux par ce nom, qui leur fut attribué, non sans raison, quelques siècles plus tard. C’étaient des Nordiques, des Norrois et dans leur langue le mot viking désignait une activité précise : partir à l’aventure en quête de richesses. Leur nom de Varègues, largement utilisé en Scandinavie et à Byzance, signifiait littéralement « les hommes de la promesse » car ces guerriers du Nord s’engageaient de façon inviolable à défendre leurs compagnons et leur chef juré jusqu’à la mort. Les peuples du Nord appelaient les Byzantins Griks et leur empire Grikkland ou Grikia ; pour eux, Constantinople était le plus souvent Miklagardr – la Grande Ville. Mais les Byzantins, dont la langue était le grec et dont l’empire comprenait la Grèce et non Rome, se flattaient d’être romains et qualifiaient leur capitale de Nouvelle Rome. En général, ils appelaient les gens du Nord Rus, parce qu’ils arrivaient normalement à Byzance après la traversée du pays de Rus, qui deviendrait plus tard la Russie. Dans les cercles élégants de la cour, on donnait également aux Varègues le nom de Tauro-Scythes, anachronisme condescendant et affecté qui signifiait Scythes (c’est-à-dire sauvages) d’au-delà des monts Taurus. Bien entendu, aux yeux des Byzantins, tous les étrangers, quel que fût leur statut ou leur origine, appartenaient à la catégorie fondamentale des Barbaroï, les Barbares.
Prologue
Stiklestad, Norvège
31 août 1030.
Réduits aux cendres d’avant l’aube, les feux de camp, par centaines sur la prairie encore sombre, formaient comme une constellation d’étoiles
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