Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
désabusé sur l’Europe, Pompidou étant persuadé – c’est ce que je comprends entre les phrases de son porte-parole – qu’à la moindre occasion l’Europe est prête à se débander. Les Allemands partagent certes notre position sur la monnaie, mais ils ont pour 6 milliards de dollars de bons du Trésor américain non négociables. Ils jouent le jeu européen, mais n’arrivent pas à rompre le cordon ombilical avec les États-Unis. Quant aux Anglais, ils ont choisi de faire flotter la livre en mettant leurs collègues européens devant le fait accompli. Pompidou est sceptique : il pense qu’à la moindre chiquenaude américaine les Anglais et les Allemands vont abandonner.
    Nous revenons sur le référendum : « Le vote mou s’explique parce qu’il s’agissait d’un référendum “froid”, c’est-à-dire dont l’urgence ne s’imposait pas. De plus, il s’agissait de l’Europe. Georges Pompidou est un homme qui n’a jamais raté une élection. Or, c’était son référendum à lui. Il a donc pris les choses humblement, mais fortement. »
    Pour les élections prochaines, il me révèle que Pompidou appelle de ses vœux une majorité plus restreinte que celle issue des élections de 1968, mais mieux structurée. Il ne serait pas hostile à un rééquilibrageentre giscardiens et UDR en 1973. « D’ailleurs, conclut Marchetti, Giscard a toujours joué, depuis 1969, le jeu de Pompidou. »

    21 septembre. Conférence de presse de Georges Pompidou
    Je ne sais pas pourquoi il affiche la plupart du temps un air courroucé. Peut-être est-ce parce qu’il répond à la dernière philippique de Mitterrand sur le « régime sans loi » ? Même si ce n’est pas ce qu’il souhaite, répondre, et de cette manière aussi publique, est une façon de considérer que l’opposition mène la danse et que Mitterrand en est le chef.
    L’occasion, pour Pompidou, de faire de Mitterrand un sombre portrait : ce n’est pas un nouveau-né, il nous présente toujours les solutions du passé, et le reste à l’avenant. « Alors, s’interroge-t-il, ce régime est-il sans foi ni loi ? »
    Il plaide que nous sommes sous la V e  République, pas sous la IV e , et que le gouvernement ne procède pas de l’Assemblée nationale, mais du président de la République. Que, en cas de motion de censure, les solutions sont souples : ou bien il s’agit d’une crise superficielle, et le président forme un autre gouvernement, ou bien il s’agit d’une crise grave, et, dans ce cas, le président dissout l’Assemblée, le peuple tranche, et chacun en tire les conséquences.
    Après le départ de Chaban, fallait-il solliciter un vote du Parlement pour Pierre Messmer ?
    « Dès mon arrivée à l’Élysée, explique-t-il, j’ai dit qu’il n’était pas bon de garder le même Premier ministre pendant sept ans. »
    Il continue en s’adressant à la foule des journalistes comme si ceux-ci nourrissaient contre lui de noirs desseins : « Alors, vous vous êtes dit que Chaban allait rester jusqu’aux élections de 1973. Cette idée ne m’a jamais traversé. Il n’est d’ailleurs pas possible, pour un gouvernement, d’agir s’il connaît d’avance la date de sa mort. »
    Il explique qu’il a longtemps songé à prononcer une dissolution, mais qu’il y a renoncé le jour où il a opté pour le référendum européen. À partir du moment où les Français avaient été convoqués une première fois, il ne pouvait plus les rappeler aux urnes une deuxième. C’est à ce moment, dit-il, qu’il a décidé de se séparer de Jacques Chaban-Delmas.
    « Je n’étais pas favorable à ce qu’il sollicite le vote des députés en juin, ajoute-t-il superbement, mais il tenait à une manifestation desympathie après les attaques dont il avait été l’objet. Comme la chose était connue, lui refuser le droit de solliciter ce vote aurait été lui infliger un désaveu public qu’il n’avait à aucun moment mérité. »
    Sur l’ORTF, il tient (tout en continuant, sous ses gros sourcils, à nous envoyer des regards furibonds) des propos musclés, qui montrent toute la distance entre Chaban et lui. Ce qu’il attend, dit-il, de l’information télévisée, c’est la liberté, l’objectivité et la dignité. Manière de se livrer à une attaque en règle de la façon dont les journalistes de l’ORTF font leur métier. Il dénonce tout à la fois l’inexactitude de leur traitement des faits, les

Weitere Kostenlose Bücher