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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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son poste.
    Usé par le travail et l’incessante surveillance dont La Martinière était l’objet de la part du ministre des Finances et de son cabinet, celui-ci était prêt à prendre n’importe quoi plutôt que de continuer à vivre dans ce climat. Jacques Chirac lui a alors proposé le Crédit agricole. Giscard, tenace, s’y est opposé. Alors Pompidou, une nouvelle fois, a imposé sa volonté : La Martinière s’est vu proposer deux compagnies nationalisées.
    Aujourd’hui, il est un fervent défenseur de Chaban : il fera partie de ses parrains si celui-ci se présente à la présidence de la République. Ce qui, affirme-t-il, lui donne tout à fait le droit de dire publiquement, à la télévision s’il le faut, que Giscard est capable de faire subir, aux gens qu’il n’aime pas, des pressions abominables. Et que ses aspects caractériels, sa fragilité, interdisent qu’il soit un jour installé à l’Élysée.
    Charmant ! Évidemment, difficile – pour ne pas dire impossible – à vérifier.
    19 janvier
    Je reviens sur le déjeuner avec René Piquet 3 le 17, soit jeudi dernier. Dans le petit bistrot près de la place du Colonel-Fabien, il parle librement.
    Sur l’Europe : « Nous irons jusqu’à envisager l’Europe intégrée, dit-il, à condition qu’elle soit socialiste. » Je me garde de dire que, dans ces conditions, ce n’est pas demain la veille !
    Sur Waldeck Rochet, complètement ramolli dans son appartement : de temps en temps, raconte-t-il, on lui apporte L’Humanité , et il la jette. À d’autres moments, il la parcourt. Parfois, il fout Étienne Fajon à la porte ; parfois, au contraire, il tombe dans les bras de Gaston Plissonnier.
    Piquet ne nie pas que ce soit à Moscou, lorsqu’il s’y est rendu pour la dernière fois, qu’il a subi un choc trop fort, une pression trop lourde. Et parle sans se cacher de ce qu’a fait Waldeck Rochet en juillet et août 1968 : d’un côté, persuader les Soviétiques que les Tchécoslovaques n’étaient pas des contre-révolutionnaires ; de l’autre, convaincre les Tchécoslovaques qu’il fallait être plus gentils avec les Soviétiquess’ils voulaient éviter une invasion. Double échec ! Terrible, moralement, pour le chef du PC français...
    Piquet n’a pas l’air d’être très favorable à une candidature unique de la gauche pour la future présidentielle. Il préférerait que Georges Marchais se présente. Pourquoi Marchais ? Parce que c’est le plus connu et sans doute le plus sympathique aux yeux des Français. Qu’il a fait beaucoup de progrès à la radio et à la télévision. Ce ne serait pas Duclos en 1969, non, mais ce serait important pour le PC. Marchais, lui, pense – ou du moins dit – exactement le contraire.
    Je lui demande si, les communistes et les socialistes étant au pouvoir, il serait possible de publier en France Soljénitsyne. Il m’assure que oui.
    Il est aujourd’hui totalement en faveur de la stratégie d’union de la gauche, sans réticences, mais avec une foi nouvelle, m’a-t-il semblé, rare chez les dirigeants communistes, dans l’enthousiasme socialiste de François Mitterrand.
    21 janvier
    Conférence de presse des trois partis de la gauche après la décision du gouvernement de sortir du système monétaire européen, conséquence du choc pétrolier consécutif à la guerre du Kippour 4 .
    Mitterrand et la délégation socialiste arrivent avec un quart d’heure de retard au siège du Parti communiste. Au complet, et après congratulations d’usage, les trois délégations se réunissent au 5 e  étage, dans la salle ovale, tapissée de bois de teck blond, du bureau politique.
    Pendant que nous attendons que les trois chefs de parti nous fassent part de leurs conclusions, résumées dans un texte qu’on nous distribue, Georges Mamy, du Nouvel Observateur , nous rejoint, bouleversé : il nous apprend que trois journalistes de L’Obs ont été avisés qu’ils ne seraient pas les bienvenus au déjeuner auquel le Parti communiste a convié les journalistes, le 23 janvier.
    Émoi dans les rangs de la presse : pourquoi cette censure ? pourquoi cette vindicte ? Parce que, dans une interview, Gilles Martinet, éditorialiste du Nouvel Observateur , a jugé que, dans les commentaires de Marchais sur Soljénitsyne, il n’y avait pas la moindre condamnation du comportement de l’URSS et des faits qui lui ont été reprochés dans cette affaire. Incidence

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