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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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l’évolution catastrophique qu’a prédite Giscard.
    Il pense évidemment qu’il serait le mieux placé pour faire accepter à la gauche de jouer le jeu de la sortie de la crise économique. Et avance plusieurs suggestions, depuis la fin du système de la Sécurité sociale, qui pèse lourdement sur les entreprises de main-d’œuvre, l’indexation de l’épargne, jusqu’à la régulation des profits en matière spéculative, etc.
    Il n’est jamais à court d’idées, amusant jusque dans sa façon de faire de l’économie politique. Ses yeux roulent dans son visage chauve. Et la table de la présidence de l’Assemblée nationale est la meilleure qui soit. Je ne parle pas des vins : Chaban a laissé une cave de bordeaux et Edgar est un œnologue averti.
    29 octobre
    J’avais trouvé Pierre Juquin très critique, au dernier congrès du PC, et j’ai voulu le revoir pour qu’il me dise ce qui, à son avis, cloche avec les socialistes.
    Il leur pose trois questions qui montrent à quel point il a choisi aujourd’hui de douter d’eux après avoir été pourtant favorable à la candidature unique de la gauche.
    Où en est-on du programme commun ? demande-t-il. Il s’inquiète du fait qu’aux assises du socialisme, par exemple, on n’en ait pas assez parlé. Toucher au programme commun, oui, c’est possible, mais à condition de le garder.
    Les alliances sont-elles claires ? Pas tellement, juge-t-il. Et notamment s’agissant des municipalités : pour les dernières élections à l’Union des maires, il me fait tout un sac pour me démontrer que les maires socialistes ont voté Poher, qu’ils sont entrés au bureau de l’Union, mais pas les communistes. Il me parle dans le même sens du maire socialiste de Juvisy, qui a placé je ne sais quelle exposition sous la présidence d’Alain Poher, sans en parler à Juquin, ou encore de l’attitude du maire de Nancy.
    Du grand classique dans le registre de l’amalgame, auquel s’ajoute un gros soupçon de mauvaise foi et une forte dose de suspicion envers les socialistes bourgeois.
    Mais le plus important n’est pas là. Pour la première fois, Juquin me cite des propos attribués à François Mitterrand au congrès de l’Internationale socialiste, à Vienne, il y a quelques mois. Il y aurait dit (c’est vrai, mais Juquin s’en tient au conditionnel) : le Parti socialiste ramènera les communistes en France à 15 %.
    « Nous voulons l’union et nous y croyons vraiment, nous voulons aller au gouvernement avec la gauche, commente Juquin. Pendant quarante ans, les gens ont dit : les communistes plumeront la volaille socialiste. Aujourd’hui, il ne faudrait pas que ce soit le contraire ! »
    Reste – ou plutôt revient – sur le devant de la scène le sempiternel procès fait par les communistes aux socialistes : « Le PS serait tenté d’aller de concession en concession vers le centre si le Parti communiste n’était pas puissant. Nous voulons donc gagner ensemble. »
    C’est-à-dire qu’il souhaite une sorte d’équilibre entre les deux forces de la gauche. Il souhaite surtout que les socialistes ne piquent pas tous leurs électeurs au Parti communiste.
    « Il faudra fixer cet objectif », dit-il on ne peut plus sérieusement, comme si on pouvait faire voter les gens avec une kalachnikov dans le dos !
    30 octobre
    Claude Estier, à qui je fais part de l’état d’esprit qui désormais prédomine au Parti communiste, me répond d’un ton embarrassé. Ilest vrai qu’aux dernières assises du socialisme le texte final ne fait aucune référence au programme commun. Ahurissant, mais vrai.
    « C’est une connerie », convient-il. Il m’explique que le projet de texte initial parlait bien du programme commun, mais que le texte final, rédigé par Rocard et Chapuis, tous deux PSU, et relu par Mauroy, l’a oublié en cours de route.
    Le secrétariat du PC a tout de suite réagi. D’ailleurs, avant même qu’il ait réagi, Mitterrand l’avait fait lui-même. « Tout de même, me dit Estier, on ne peut pas dire, sauf à être de mauvaise foi, que Mitterrand ne se réfère pas au programme commun ! Ils peuvent peut-être le craindre de Rocard, mais Rocard n’est pas le chef du PS. »
    Pourtant, Claude Estier n’est pas très optimiste sur les relations entre socialistes et communistes. Il pense que, même si le congrès communiste a gommé in extremis de sa résolution finale les attaques envisagées contre le PS, ses

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