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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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personne ne prendrait la responsabilité de cette opération.
    Et s’il parle, que dire ? Chirac, pour l’heure, est indécis. Il s’enferme avec Ponia et Edgar Faure dans un des bureaux attenants à l’hémicycle. Après conciliabule, il choisit de parler.
    La séance reprend donc à 11 heures. Je ne sais pas pourquoi, je trouve que son ton, d’un coup, a changé. Longtemps son phrasé, l’accentuation de certaines syllabes, une pointe de chuintementpar-ci par-là, évoquait la façon si particulière que Giscard a de s’exprimer. Aujourd’hui, avec assurance et autorité, il a retrouvé sa vraie voix.
    Le discours qu’on nous distribue fait une quinzaine de pages en gros caractères : Chirac confirme qu’il a abandonné pour le moment l’idée de soumettre au Congrès la proposition « concernant les conditions dans lesquelles les membres du gouvernement peuvent, lorsqu’ils quittent celui-ci, retrouver leur rôle de parlementaire ». Il ne soumettra donc au vote que le texte concernant la constitutionnalité des lois : les députés et les sénateurs pourront saisir le Conseil constitutionnel s’ils le jugent nécessaire. C’est, selon le chef du gouvernement, une nouvelle étape dans « la protection de nos libertés ».
    André Chandernagor répond pour l’opposition : il dénonce une révision inopportune, parce que éloignée des préoccupations des Français, et dérisoire, car elle n’apporte aucun commencement de solution aux problèmes constitutionnels fondamentaux qui touchent au déséquilibre essentiel de nos institutions.
    Mise aux voix à 12 h 37, la modification est adoptée.
    Les parlementaires en profitent pour faire du tourisme : c’est à qui se fera photographier devant telle statue ou dans la cour pavée. On dirait des lycéens à la fin des classes.
    22 octobre
    Long, très long débat budgétaire avec un Maurice Papon qui se prend pour l’économiste du siècle et trouve que les mesures retenues par le gouvernement prennent une « mesure un peu étroite du phénomène inflationniste ».
    Jean-Pierre Fourcade répond interminablement. Sur la conjoncture, d’abord, dans laquelle il pointe le ralentissement de la croissance dans certains secteurs, les difficultés des entreprises moyennes et l’augmentation du nombre des chômeurs. Puis sur les grandes lignes du budget 1975.
    Pendant qu’il l’écoute, Chirac, à sa place, celle du gouvernement, fait des cocottes en papier. Je m’en aperçois en me penchant, comme tous les autres journalistes, qui n’en croient pas leurs yeux, de la tribune de la presse qui surplombe l’hémicycle. Manifestement, cedébat – ou plus exactement celui qui parle en ce moment, Fourcade – l’ennuie à périr.
    Ce qui l’ennuie davantage encore, il me semble, c’est que, par la voix de Fanton, l’UDR, une fois de plus, critique le gouvernement : le budget, pour lui, est insuffisant. « Il faut prendre des mesures dirigistes, clame-t-il, et le président n’en veut pas. »
    Il parle bien, André Fanton, et ses arguments touchent une partie de l’UDR. Il réclame un plan. « Hé oui, un plan  ! »
    Bref, la fronde contre Giscard continue de plus belle.

    Un député UDR que je connais à peine, et dont je ne retrouve pas le nom, me balance ce qu’il a sur le cœur : tout est fait pour normaliser l’UDR, le faire rentrer dans le rang. Mais, depuis la rentrée, tout se déglingue : le président de la République ne réunit pas sa majorité présidentielle sur un projet, une politique, alors que Pompidou, par exemple, son grand dessein était l’industrialisation. Or, quel est le grand projet de Giscard ? Giscard veut simplement, pour le moment, « couper l’herbe sous le pied de la gauche ». Cela ne suffit pas pour dessiner l’avenir. Qui plus est, cela donne de la crédibilité aux socialistes.
    Son ultime espoir réside dans les assises de l’UDR, prévues pour décembre, où il espère que les choses seront clarifiées.
    À noter que ce député gaulliste ne me parle que du président, pas une fois de Chirac.
    24 octobre
    Conférence de presse de Valéry Giscard d’Estaing.
    Pourquoi ce catastrophisme ? Pourquoi la tête d’enterrement qu’il s’est fabriquée ? Les Français ont élu un homme jeune, dynamique, qui parlait de l’avenir et des réformes. Je veux bien que la crise soit là, qu’il faille provoquer une prise de conscience des Français. Tout de même !
    « Le monde est

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