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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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enfin je n’ai pas de raison de la mettre en doute. Jean-Philippe Lecat était présent comme faisant partie des 43 conjurés. Il a commis ce jour-là, nous raconte Soisson, une erreur capitale : il a promis à Giscard d’être présent à Beaune ou à Dijon au moment où celui-ci ferait campagne à Beaune ou à Dijon 7 . Naturellement, en proie au doute, empêtré dans ses incertitudes et craignant que, finalement, ce ne soit Chaban qui gagne, Lecat rentre chez lui et tombe malade. Résultat : lorsque Giscard vient à Dijon, pas de Lecat, resté sous ses couvertures ! Robert Poujade, en revanche, l’autre figure politique de la région, député de Dijon et fidèle à Chaban, lui fait porter une lettre pour le saluer à l’hôtel de ville.
    Selon Soisson, Giscard ne pardonnera jamais tout à fait cette défection à Lecat. De toute manière, son attitude a été imbécile : il fallait soit ne pas participer à la réunion chez Soisson, soit aller accueillir Giscard à Dijon. « L’avenir, dit gravement Soisson, n’est pas à ceux qui manquent de caractère. »
    Noble principe : on verra si, dans son avenir personnel, Soisson lui-même en fera montre, de caractère !
    En attendant, il raconte cette histoire assez drôle sur Robert Mallet, qu’il a chargé d’une enquête administrative sur la fac de Vincennes et sur ce qui s’y est passé. Ce bon vivant, ancien secrétaire d’André Gide, est à son affaire avec les jeunes étudiants excités. Craignant qu’il ne fasse durer trop longtemps le plaisir (et l’enquête !), Jean-Pierre Soisson le convoque au ministère avant-hier et le questionne :
    « Comment cela se passe-t-il, à Vincennes ?
    – Oh, soupire Mallet, c’est aussi compliqué que la correspondance Gide-Claudel ! »
    En sortant d’un des derniers Conseils des ministres, Giscard dit à Soisson qu’il faut incorporer le petit Bussereau, président des Jeunes giscardiens, ou plus exactement de « Génération sociale et libérale » (GSL), dans le brain-trust de réflexion des giscardiens. Il y a donc un brain-trust où sont disséquées et peut-être élaborées les orientations présidentielles.
    13 février
    Je reviens sur la conférence de presse de Marchais. Je pense à la réjouissance profonde que j’ai lue dans les yeux des dirigeants communistes pendant qu’il parlait ! À quoi l’attribuer ? Avaient-ils l’impression d’avoir recouvré leur identité ? Ou était-ce la joie d’être les patrons du jeu à gauche ?
    Jean Ranger 8 , que je rencontre le 13, trois jours plus tard, m’avoue que, ayant quitté le Parti communiste après ce qui s’est passé en Tchécoslovaquie en 1968, il se prépare aujourd’hui à y retourner, tant il a trouvé que le PC s’épuisait, se désintégrait en se mettant dans le sillage de la gauche non communiste.
    Le bonheur des uns...
    Chirac, me raconte Toubon au téléphone, n’a pas la moindre envie de quitter le secrétariat général de l’UDR, même s’il a dit en décembre dernier qu’il n’occupait ce poste qu’à titre intérimaire. Il ne laisserait ce rôle à personne. « Il n’a aucun intérêt, me dit Toubon, à voir se dégager un deuxième homme. »
    Mauroy, enfin : même lui, pense que Mitterrand est trop sûr de lui et dominateur. Il a trouvé ses propos, à la fin de son discours de Pau (« personne ne s’incrustera », « il n’y aura pas de partage du pouvoir », etc.) beaucoup trop autoritaires, et désobligeants de surcroît, vis-à-vis de ceux qui exercent le pouvoir à ses côtés. Il confie à Guy Claisse 9  : « Pour le comité directeur et le bureau exécutif, j’ai dit à Mitterrand que j’allais protester. “Faites-le, m’a-t-il répondu, mais nos rapports ne seront plus jamais les mêmes !” »
    Mauroy a calé.
    En ce 13 février, conférence de presse de Mitterrand en réponse à Georges Marchais. Il y a quelque chose de fou et de sinistre dans cette succession de mises et de remises en cause entre les deux partis de la gauche. J’ai l’impression que cela dure depuis des années, cette avalanche de reproches, de remords, de doutes, et que tout le monde s’épuise. Mais c’est un fait politique. Les giscardiens en redemandent. Et Mitterrand, cent fois sur le métier, se remet à l’ouvrage. On me paierait pour faire ce qu’il fait...
    Le voici donc une nouvelle fois face à la presse en train d’énumérer les multiples activités du Parti socialiste dans les

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