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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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les pressions exercées sur lui par Pasqua pour qu'il se retire. Inouï !

    20-21 avril
    Suivi François Mitterrand dimanche et lundi à Latche, à moins d'une semaine du premier tour. Il y a là quelques jeunes femmes assez jolies, plusieurs journalistes étrangers, deux photographes et les petits-enfants du candidat. Sa femme Danielle et la sœur de celle-ci, Christine, sont là également, avec Roger Hanin, bien entendu.
    Béret rouge sur la tête – il faut le voir ! –, Mitterrand paraît dans sa vieille veste bleue, son pull rouge et son ample pantalon de velours beige.
    À table, on parle peu de Giscard. Renard ou tueur ? Mitterrand écourte volontairement la conversation. Il reste vague lorsqu'on lui demande s'il acceptera un débat télévisé avec Giscard entre le premier et le deuxième tour.
    Fugitivement, je me dis : « Et si Giscard était premier et Chirac second ? »
    Ce serait un épouvantable échec pour Mitterrand et le PS. Il est vrai que c'est une hypothèse d'école, qui n'a aucune chance de se produire.
    Le lendemain, déjeuner de tout le groupe au Pavillon landais, à Soustons. Le restaurateur a préparé des asperges. La serveuse demande si nous les voulons à la vinaigrette ou avec sauce hollandaise. La moitié des convives clame : « Vinaigrette ! », tandis que l'autre moitié hurle : « Hollandaise ! »
    « Eh oui, dit Mitterrand, comme toujours en France : 50/50 ! »

    22 avril
    Rendez-vous avec Jacques Chirac à l'Hôtel de Ville. Je m'interroge – et je l'interroge – sur l'« effet Chirac ». Existe-t-il, cet effet ? Existe-t-il ailleurs que dans ses déclarations quotidiennes où il assure qu'il sera présent au deuxième tour ?
    Dans les sondages 20 , il n'existe guère : la semaine dernière, il ne réunissait toujours qu'entre 16 et 20 % des suffrages. Il n'a pas gagné une voix depuis le début de la campagne. Pourtant, les sondeurs que j'ai vus hier sont beaucoup plus flous lorsqu'on les interroge : tous me disent qu'étant donné la courbe ascendante des intentions de vote en faveur de Chirac en fin de semaine dernière, il pourrait peut-être arriver en numéro 2. Mais en numéro 2 derrière Mitterrand, car si l'électorat de la majorité se divisait en deux, ce serait Giscard qui aurait des problèmes pour être premier, et non pas Mitterrand.
    Chirac répond à mes questions sans manifester d'impatience. Pas l'ombre d'une dissimulation, ce soir, chez lui, ni de comédie sur son visage ! Il pense qu'il n'arrivera pas en deuxième position, mais en troisième ; qu'il y aura, entre le premier et le deuxième tour, un débat télévisé Mitterrand-Giscard ; que 30 % environ de ses électeurs au premier tour ne voteront pas pour Giscard (« J'ai été surpris, me dit-il, dans toutes mes réunions électorales, par les ravages que Valéry Giscard d'Estaing avait causés dans l'électorat gaulliste – ou chiraquien, comme vous voudrez ! Dans ces 30 %, 10 % voteront Mitterrand, 20 % s'abstiendront ») ; que, dans ce cas, Mitterrand sera élu, que VGE retournera à Chamalières et disparaîtra de la circulation, et que lui, Chirac, sera Président dans trois ans (« Car cela ne durera pas sept ans ! »).
    Il me dit aussi que Marie-France Garaud « roule » pour Giscard (je lui dis que je pense au contraire que, divisant les voix de la majorité, elle « roule » objectivement pour Mitterrand ; il n'en croit rien) ; que Michel Debré, qui, lui, ne roule pour personne, aurait mieux fait de se rallier à lui à l'occasion de son dernier meeting au Parc des Princes ; enfin qu'il a fait, lui, Chirac, ce qu'il a pu, et qu'il en est content.
    Je lui raconte ensuite, parce que je l'estime nécessaire, notre différend avec Giscard à la veille du premier tour. Celui-ci a refusé, contrairement à tous les autres candidats, le « Grand Jury » RTL- Le Monde . Personne ne comprenant pourquoi, je l'explique donc à Chirac qui s'étonne de l'absence du candidat n o  1 sur notre antenne. Nous avons, selon Giscard, mal couvert l'attentat d'Ajaccio, avec l'intention maligne de cacher qu'il avait échappé à un véritable attentat, pas à une petite démonstration d'intimidation à la corse...
    En fait, le premier accès de mauvaise humeur de Giscard à l'égard de la station remonte à quelques mois. Je m'aperçois que je n'ai pas noté sur ce carnet, en temps voulu, le premier incident qui m'a opposée, en tant que chef du service

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