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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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d'autres noms pour TF1, Jacques Attali, sur la pelouse du jardin de l'Élysée, en pleine garden-party de la fête nationale, laisse tomber : « Le président de TF1 sera ce soir Hervé Bourges. »
    Façon de montrer que l'Élysée a la situation en main, et même qu'il la domine !
    Aussitôt, sur les fils de l'AFP, la déclaration d'Attali, qui nous est transmise par nos secrétariats alors que nous sommes retranchés à huis clos, manque de faire capoter les choses.
    Heureusement, nous nous interrompons pour déjeuner : le graves qui accompagne le canard en gelée y est-il pour quelque chose ? Toujours est-il que l'arrivée du plat de résistance met un terme provisoire à l'empoignade générale. Miracle des institutions collégiales : nous redevenons chaleureux, amicaux, presque mondains.
    Je me rappelle que nous avons alors parlé du festival lyrique d'Aix-en-Provence où la majorité d'entre nous étions invités, et même du château d'Ansouis que la grand-tante de De Broglie, la duchesse de Sabran, projetait de nous faire visiter.
    Et puis, à 15 heures, nous avons voté. Sept voix pour Bourges, dont celle de Bernard Gandrey-Réty qui s'est ainsi désolidarisé des autres membres nommés par le président du Sénat.
    Je suis rentrée chez moi et j'ai dormi jusqu'au lendemain matin.

    19 juillet
    Gabriel de Broglie fait une « déclaration dissidente » sur le choix d'Hervé Bourges. Je ne savais même pas que cela existait, une déclaration dissidente ! Il paraît que c'est la coutume au Conseil d'État et à la Cour des comptes : lorsque quelqu'un n'est pas d'accord sur un vote et qu'il souhaite le faire savoir, il rédige une déclaration dissidente...
    Celle de Gabriel de Broglie ne m'étonne pas, car je savais ce qu'il en pensait, et je n'ai pas pu le convaincre du contraire. Il dénonce un « choix préalablement arrêté ailleurs ».
    Sombre bilan : voilà une nomination en principe sans histoire mais qui a suscité entre nous les plus vives tensions depuis l'automne dernier. Et que le pouvoir en place considère comme imposée par lui, et dont, du coup, il ne me sait même pas gré !

    26 août
    Coup de téléphone de François Mitterrand après le journal de PPDA en pleine affaire du Tchad. Je ne l'ai pas rencontré ni appelé – ce qu'il n'a pas fait non plus – depuis juillet.
    « Tout de même, me dit-il, certains font semblant de croire que Faya-Largeau, c'est la cathédrale de Strasbourg ! Le Tchad, ça n'est quand même pas l'Alsace-Lorraine ! »
    Il est chaleureux, me dit avoir dîné avec André Rousselet pendant ses vacances, m'assure qu'il m'invitera à déjeuner en septembre.
    « Tout cela change les choses, non, à la télévision ? » – c'est sa dernière phrase, sibylline.

    6 septembre
    Festival de Télévision européenne à Berlin. Dans une autre vie, j'aimerais habiter Berlin, « ville névrotique », comme le disent les Allemands. Berlin avec son mur, son absurdité, son passé, Hitler présent à tous les coins de rue, mais aussi Nina Hagen qui chante à l'Est, ses jeunes qui ressemblent aux jeunes de partout ailleurs. Et cet univers clos qui, lui, ne ressemble à aucun autre, et, surtout, ce mur obsédant, ce mur que tant de gens sont morts d'avoir voulu franchir.

    17 septembre
    Berlin : Lucia de Lamermoor à l'Opéra de Berlin-Est – et une lettre écrite à Mitterrand sur Desgraupes.
    Pas de réponse, cette semaine.
    Il faut dire qu'il avait autre chose à faire. Avant-hier, interviewé à la télévision par François de Closets, il a annoncé la baisse d'un point l'année prochaine du taux de prélèvement obligatoire. Il paraît que cela a fait un beau chahut, car il n'avait prévenu personne, pas même le Premier ministre, encore moins le ministre des Finances. Il a trouvé ça en direct, même si tous les Français croient sans doute que cette mesure a été soigneusement réfléchie et mise au point. Et maintenant, une fois que la chose a été dite, il faut bien qu'elle soit appliquée !
    Cela confirme ce que je sais de Mitterrand : il n'est pas ignorant des choses économiques, comme me le disait naguère Jean-Jacques Servan-Schreiber. Il pense simplement que la politique domine l'économie, qu'elle doit lui imposer son rythme et sa loi. Jamais il n'a si bien parlé, buvons à sa santé !
    Je retranscris ici cette lettre à Mitterrand que j'ai moi-même tapée sur ma machine personnelle pour qu'il ne puisse y avoir de

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