Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986
plupart d'entre nous ne le voient plus à l'Élysée pour le 14 juillet.
Quelques jours après cette conversation, et après une nouvelle interview de Mitterrand par Mourousi, je déjeune (donc, aujourd'hui) avec Ambroise Roux 6 . Il a rencontré le Président pendant une heure et demie, mardi dernier. Éblouissant, étincelant, définitivement acquis, il en est certain, à la cohabitation avec Chirac.
Et l'hypothèse Roland Dumas ? Ambroise Roux l'écarte : il pense lui aussi que Mitterrand a perdu confiance en Fabius, mais que c'est Pierre Bérégovoy et non pas Dumas qui sera nommé la semaine prochaine.
« Peut-on exclure, me demande-t-il, que François Mitterrand pense à Bérégovoy pour lui succéder ? Le chef de l'État m'a dit qu'il ne se représenterait sans doute pas à la présidentielle, sauf en cas de circonstances graves. Ne peut-on pas penser qu'il ait envie de mettre le pied à l'étrier à Bérégovoy ?
– Mais le nommer pour trois mois ?
– Au contraire ! Il ne risque rien à nommer Bérégovoy dès maintenant. Si ça marche, c'est parfait. Si ça ne marche pas, ça n'aura aucune importance, puisque la cohabitation arrivera par là-dessus ! »
En revanche, toutes les hypothèses qui courent Paris – référendum le 19 janvier sur la durée du mandat présidentiel, référendum sur le cumul des mandats... –, nous n'y croyons ni l'un ni l'autre.
Pour le reste, nous glosons sur la coexistence – qui l'eût cru ? – entre Mitterrand et Chirac.
« Il y a du Gambetta, dit-il, chez ces deux hommes. L'un, Mitterrand, a choisi le romantisme de Gambetta. L'autre, Chirac, sa rigueur. »
18 décembre
Maurice Faure ne croit pas un seul instant au remplacement de Laurent Fabius.
Mitterrand pourrait-il néanmoins lancer un coup : un référendum, par exemple ? Tout est possible, certes, mais il n'y croit guère.
Il se lance dans des estimations pour les législatives de 1986. Le PS, selon lui, réunit 27 % des Français. Le PC : autour de 10 %. Le reste de la gauche, radicaux et autres : 5 %. Total : 42 à 44 %. Le compte n'y est pas.
La cohabitation ? Il reste sceptique. Tout ce qu'il sait de Mitterrand l'incite à penser que les deux hommes, Mitterrand et Chirac, ne s'entendront jamais. Il se dit persuadé qu'en 1986 il y aura, après les législatives, une élection présidentielle.
Moi aussi, d'ailleurs, si j'en crois le pari du Siècle !
1 Christine Ockrent se contente de déclarer au journal Libération que « les exigences de la direction de la chaîne ne lui permettent plus de continuer ».
2 Date des futures élections législatives.
3 Après le refus de Fabius, François Mitterrand aurait néanmoins chargé Robert Badinter d'intervenir en son nom auprès de Michel Rocard. Badinter aurait joint Rocard dans la nuit pour lui demander de reconsidérer sa position (témoignage de Tony Dreyfus, 3 août 2008).
4 Le 16 janvier 1985.
5 Les trois membres de la Haute Autorité qui ont été nommés pour trois ans, Stéphane Hessel, Bernard Gandrey-Réty et Marcel Huard sont remplacés, comme le veut la loi, chacun par un membre nommé par le président de la République (Raymond Forni), celui de l'Assemblée nationale (Gilbert Comte) et celui du Sénat (Raymond Castans).
6 Il s'agit du Territoire de Belfort.
7 Énarque, féru de cinéma et d'audiovisuel, peu désireux de n'occuper que des fonctions administratives, Jean Drucker est entré à la SFP en 1975. Il a été appelé auprès de lui, comme numéro 2, par Jacques Rigaud, administrateur général de la CLT en France, président de RTL en 1980. Depuis, il est en charge des dossiers sur les satellites et les nouvelles chaînes privées.
8 Parmi les problèmes qui avaient opposé la Haute Autorité au président d'Antenne 2, le plus important fut sans doute celui que la presse a baptisé l'« affaire Manouchian ». Il s'agissait d'un documentaire réalisé par Mosco, intitulé Des terroristes à la retraite , concernant l'action et la disparition du réseau Manouchian, composé de résistants d'origine étrangère, dont 23 furent arrêtés et fusillés par les Allemands en 1943. Le film, commandé en juillet 1981 par Maurice Ulrich, mettait violemment en cause l'attitude du Parti communiste français pendant la guerre. Prudemment, Pierre Desgraupes, ne souhaitant pas de polémique politique avant les différentes échéances életorales, l'avait mis au placard, dont Héberlé l'avait fait
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