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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Il mérite bien que l'on y prie une journée !
    Cela dit, il avait salué sèchement et, tournant les talons, s'était éloigné vers le portail abbatial, ignorant la protestation de Catherine.
    Malgré la fatigue des longues étapes, elle eût voulu aller plus vite encore, ne s'arrêter que le strict minimum sur cette route qu'avait parcourue l'époux bien-aimé. Une journée passée ici lui semblait un affreux gaspillage, même si cette journée devait lui rendre des forces.
    — Que de temps perdu ! murmura-t-elle en offrant son bras à Ermengarde que ses suivantes venaient, non sans peine, de descendre de sa monture. La douairière de Châteauvillain, fatiguée elle aussi par des heures passées en selle, était aussi raide qu'une planche. Mais elle n'avait rien perdu de son entrain.
    — Gageons que je sais ce que vous pensez, ma mie ! fit-elle gaiement en entraînant Catherine sous le porche d'une grande auberge étayée par des contreforts qui lui donnaient un certain aspect de forteresse.
    — Dites toujours !
    — Vous donneriez beaucoup pour enfourcher, demain matin, un bon cheval, planter là tous nos diseurs de patenôtres et galoper aussi vite que le vent vers cette ville de Galice où vous pensez que quelque chose vous attend.
    Catherine n'essaya même pas de nier. Elle eut un sourire plein de lassitude.
    C'est vrai, Ermengarde ! La lenteur de cette marche me tue. Songez que nous sommes, ici, tout près de Montsalvy, qu'il me serait facile d'aller embrasser mon fils. Mais c'est pour un pèlerinage que je suis partie, et je ne tricherai pas avec Dieu ! A moins qu'en cours de route quelque chose ne vienne m'apprendre que c'est ailleurs qu'il me faut chercher Arnaud, je continuerai, avec mes compagnons, jusqu'au bout du voyage. Et puis, il est bon d'être nombreux. Le chemin est dangereux, les bandits pullulent. Il vaut mieux être en force. Avec vos femmes et vos hommes d'armes, nous ne serions que sept. En admettant même que nous le demeurions jusqu'au bout puisque, déjà, l'un de vos soldats s'est enfui.
    C'était vrai. Au petit matin, quand on avait quitté la commanderie d'Espalion, l'escorte d'Ermengarde ne comportait plus que trois hommes : le quatrième manquait. Mais, à la grande surprise de Catherine, la vieille dame n'en avait pas montré autrement de contrariété. Elle s'était contentée de hausser les épaules.
    — Les Bourguignons n'aiment guère les voyages ! Et l'idée d'aller en Espagne n'enchantait pas Saulgeon. Il a dû préférer rentrer !
    Cette philosophie inattendue avait intrigué Catherine. Elle connaissait trop Ermengarde et l'intransigeante fermeté avec laquelle elle menait ses gens pour ne pas trouver bizarre son attitude actuelle.
    Ou bien la redoutable vieille femme avait-elle changé à ce point ?
    L'auberge Sainte-Foy accueillit la dame de Châteauvillain avec tous les honneurs dus à son rang. Ermengarde, d'ailleurs, savait comme personne se faire servir. Il y avait beaucoup de monde à l'hôtellerie, mais elle obtint tout de même deux chambres : une pour Catherine et elle-même, l'autre pour ses chambrières et Gillette de Vauchelles que, décidément, elle avait prise sous sa protection.
    Les voyageuses expédièrent leur souper rapidement et en silence.
    Toutes étaient lasses, mais, tandis qu'Ermengarde, à peine rentrée dans sa chambre, se couchait et s'endormait, Catherine, malgré sa fatigue, s'attarda à la fenêtre qui donnait sur la petite place. Elle se sentait le cœur trop lourd pour dormir. Et puis, le sommeil avait moins d'importance ce soir puisque demain on resterait encore ici.
    Assise sur le petit rebord de pierre, dans l'encoignure de la fenêtre, Catherine laissait son regard errer sur le spectacle étrange et coloré du dehors. Des baladins, comme cela arrivait souvent dans les villes de grand pèlerinage, s'étaient installés devant l'église et faisaient là leurs tours devant un rassemblement de villageois et de pèlerins qui, faute de place, couchaient à même le parvis. Il y avait des musiciens, joueurs de viole, de luth, de harpe ou de flûte. Un garçon maigre, vêtu d'un costume mi-partie vert et jaune, jonglait avec des torches enflammées. Assis au pied d'une des deux tours romanes de la façade, un doigt levé, l'air inspiré, un conteur de fabliaux, drapé d'oripeaux bariolés, réunissait un cercle de jeunes garçons et de jeunes filles.
    Enfin, bondissant au son de la musique, une fille mince, vêtue d'un rouge violent,

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