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Catherine et le temps d'aimer

Catherine et le temps d'aimer

Titel: Catherine et le temps d'aimer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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effort.
    Sans répondre, Morayma la prit par le poignet et l'entraîna vers la tour de l'Eau. Parvenue sous la colonnade éclairée, elle regarda sa prisonnière, fronça les sourcils, remarqua :
    — Tu es bien pâle ! Es-tu souffrante ?...
    — Non. Fatiguée peut-être...
    — Alors, je ne vois pas pourquoi tu n'es pas encore couchée. Viens maintenant !
    Catherine se laissa emmener sans résistance jusqu'à une suite de pièces dont elle ne vit rien. Ses yeux, envoûtés par son esprit bouleversé, formaient et reformaient sans cesse devant elle la scène d'amour dont ils venaient d'être les témoins. Et Morayma, qui s'attendait à des cris de joie devant le luxe que l'amour du calife offrait à cette esclave rachetée, ne comprit pas pourquoi, à peine entrée dans la chambre où l'attendait une armée de servantes, Catherine se laissa tomber sur les matelas de soie pour y pleurer toutes les larmes de son corps.
    La maîtresse du harem eut cependant assez de sagesse pour ne point poser de questions. Elle se contenta de renvoyer d'un geste autoritaire toutes les servantes, puis, patiemment, s'assit au pied du lit pour attendre que l'orage cesse.
    Elle l'attribuait, avec philosophie, aux émotions plutôt fortes de cette journée mouvementée. Mais Catherine pleura longtemps, si longtemps que, seule, la fatigue vint à bout de son chagrin. Quand ses sanglots se turent, elle glissa sans transition dans un sommeil de bête harassée... Il y avait déjà un moment que Morayma l'avait précédée au pays des songes et dormait, tassée sur elle- même. La nuit d'été, ponctuée par le tintement de la cloche des canaux, acheva de couler sur Grenade.
    Il y avait tant de monde dans la chambre de Catherine lorsqu'elle ouvrit ses yeux encore gonflés par les larmes qu'elle les referma aussitôt, persuadée que c'était seulement la suite de ses rêves fiévreux.
    Mais le contact de tampons humides et frais sur ses paupières la convainquit de son erreur : elle était bien éveillée. Une voix ronronnante s'en mêla.
    — Allons, réveille-toi, Lumière de l'Aurore, ma perle précieuse !
    Réveille-toi pour contempler ta gloire !
    Catherine rouvrit des yeux méfiants. La gloire en question consistait en un bataillon d'esclaves aux bras chargés d'objets divers, agenouillées un peu partout dans la chambre. On lui présentait des soieries, des mousselines de toutes les couleurs, de lourds bijoux d'or sertis de pierres d'une grosseur barbare, des buires de parfums et d'huiles rares, des oiseaux aux longues plumes légères qui avaient l'air d'énormes joyaux aux couleurs fulgurantes. Mais ce qui retint immédiatement le regard de la nouvelle favorite, ce fut la forme débordante de Fatima qui, assise en tailleur sur un gros coussin posé à même le sol, les mains nouées sur son ventre drapé de soie rouge vif et sa noire figure fendue d'un sourire lunaire, la regardait s'éveiller avec une mine réjouie. Penchée sur Catherine, une jeune esclave couleur café au lait bassinait ses paupières.
    S'apercevant que la jeune femme la regardait, l'Éthiopienne se leva et s'inclina avec une étonnante souplesse, balayant le sol des absurdes plumes de paon fixées à sa coiffure.

    — Que fais-tu là ? demanda Catherine du bout des lèvres.
    — Je suis venue saluer l'astre naissant, ô Splendeur ! Il n'est bruit, dans les souks, que de la bien-aimée du Calife, de la perle rare que j'ai eu le privilège de découvrir...
    — Et tu viens, dès l'aurore, chercher ta récompense, j'imagine ?
    Le ton méprisant de Catherine n'effaça pas le sourire de Fatima.
    Visiblement, la négresse éclatait d'une joie qui la rendait imperméable à toute autre impression.
    — Ma foi non ! Je suis venue t'apporter un présent.
    — Un présent ? De ta part ?
    — Pas tout à fait. De la part d'Abou-le-Médecin !
    Tu sais, Lumière de l'Aurore, nous avons gravement méconnu cette belle âme !
    Le nom de son ami secoua comme par enchantement la nonchalance de Catherine. Au fond de la vague de colère, de douleur et de dégoût où elle avait plongé, la pensée d'Abou était quelque chose de réconfortant. Elle se redressa sur un coude, repoussant l'esclave qui alla s'agenouiller un peu plus loin.
    — Que veux-tu dire ?
    La main noire de Fatima désigna un grand couffin de paille dorée où s'empilaient les plus beaux fruits que Catherine ait jamais vus, la plupart lui étant d'ailleurs inconnus.
    — Il est venu, dès le premier éclat du jour,

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