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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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sont les neveux des évêques, qui participent à ce mouvement.
    « Devant les tribunaux, ils adoptent la même attitude :
    « 1. Nous sommes Français (ce qui n'est pas vrai) ;
    « 2. Nous sommes autonomistes ;
    « 3. Vous n'avez qu'à nous condamner : morts, nous serons des héros.
    « C'est farfelu, violent, mais limité. Pour ce qui est du sentiment, le gouvernement du Québec, qui est antiterroriste, éprouve à leur égard un attendrissement permanent ; on les condamne assez peu.
    « Ce mouvement repose sur quelques idées :
    « 1. Nous avons été colonisés, nous le sommes, nous ne voulons plus l'être. On a donné l'indépendance au Sénégal, il n'est pas normal qu'on ne donne pas l'indépendance au Québec.
    « 2. Ressentiment profond à l'égard des Anglais, qui méprisentles Canadiens français. Les journaux anglais détruisent tous les matins ce que le gouvernement fédéral essaie d'entreprendre.
    « Traditionnellement, les Français, c'est le prolétariat, les paysans, les curés, les notaires. Aujourd'hui, les autonomistes, ce sont des universitaires, des chimistes, des techniciens. Le théoricien de l'autonomisme, Chapuis, est un scientifique.

    Malraux : « La colère des Canadiens français est devenue si grande... »
    « C'est une idéologie de réaction, de ressentiment. On ne se soucie pas des problèmes concrets. Chapuis s'inspire de Mein Kampf, mais sans l'antisémitisme ni les camps de concentration. Il est passionné, simplificateur, dramatique. "Nous sommes une minorité. Il n'est pas normal que nous ne puissions nous exprimer que dans le Québec, où nous sommes une majorité. Il faudrait que partout, au Canada, nos droits soient reconnus à égalité avec ceux des Anglais. Il est intolérable de recevoir les discours du général de Gaulle par les agences de presse en anglais et retraduits ensuite en mauvais français. (Rires autour de la table.)
    « "Les manuels français sont très bêtes, puisqu'ils sont traduits de l'anglais et ne sont pas adaptés à notre culture. Tout cela n'est pas supportable."
    « La colère des Canadiens français est devenue si grande qu'ils ont maintenant la volonté d'être autre chose que des hommes en colère.
    « La position du gouvernement d'Ottawa est d'être compréhensif. Il voit la gravité de ce mouvement. Il se rend compte que, s'il y a sécession, la Colombie britannique va rallier les États-Unis ; il ne restera du Canada que les Grands Lacs. Il est donc prêt à reconnaître les droits des Français. Il souhaiterait aller aussi loin que possible, à condition qu'il n'y ait pas de séparatisme. Il ne condamne pas l'autonomisme comme immoral, mais comme non viable en pratique.
    « La position du gouvernement du Québec est la même que celle du gouvernement fédéral et du gouvernement de Londres. C'est un gouvernement de juristes, d'avocats. Il ne se pose jamais les questions fondamentales — le destin du monde — ni les questions économiques. Il veut simplement savoir si on reconnaît les droits moraux des Québécois, et comment.
    « Le mouvement autonomiste rencontre une sympathie modérée chez le Premier ministre Lesage, et plus vive dans les mairies.
    « Les Canadiens français, ce sont deux millions d'hommes dispersés et quatre millions d'hommes récupérables. Au Québec, c'est la concentration du prolétariat. Le cadre de leur vie n'est plus en majorité rural. Le maire de Montréal est violemment autonomiste 1 et pro-français. Les sujets d'humiliation des Canadiens français sont nombreux et le maire connaît les sentiments de sa population. Les journaux anglais jettent de l'huile sur le feu. Être lié aux Français à Montréal, c'est être lié à des gens "pas bien".
    « La position anglaise : s'opposer à l'autonomisme, parce qu'il n'est pas viable. Il impliquerait une baisse écrasante du niveau de vie dans le Québec, qui n'aurait pas d'autres ressources que de devenir américain. L' anti-américanisme peut devenir un ciment des Canadiens. Mon discours sur la culture, le Premier ministre Lesage l'a tiré dans un sens anti-américain. Les thèses que j'ai exposées sont pourtant les mêmes qu'à New York avec Kennedy à côté de moi.
    « L'anti-américanisme que professe Lesage est destiné à procurer un terrain de rencontre avec le Fédéral : il lui permet de se rapprocher du gouvernement d'Ottawa sans être traité de collaborateur. L'anti-américanisme est le masque d'un rapprochement avec la Grande-Bretagne. Les

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