C'était de Gaulle, tome 3
»
Au Conseil du 2 mars 1966, il avait demandé à Pompidou de plancher sur le sujet.
GdG : « Cette affaire de l'eau prendra de plus en plus d'importance. Quand vos réflexions auront pris de la consistance, il faudra faire une communication. »
C'est le Premier ministre lui-même qui la présente au Conseil du 24 août 1966 : « En 1964, une loi a créé un Comité national de l'eau, qui a été installé il y a quelques semaines. Il s'agit maintenant de compléter le dispositif de terrain, par ce décret qui crée six agences de bassin. Ces agences recevront des redevances qui permettront de mobiliser les moyens nécessaires à la réalisation de grands ouvrages collectifs.
« Au-delà, il faut aller jusqu'à la création d'une administration d'État, responsable de la gestion de l'eau. En attendant, il faut que les administrations concernées — Eaux et forêts, Génie rural, Ponts et chaussées, Mines — mettent des fonctionnaires qualifiés à la disposition des agences.
GdG. — Nous voyons que l'agriculture utilise de plus en plus d'eau. M. Pisani peut-il nous dire où en sont nos réserves ?
Pisani. — L'augmentation de la consommation d'eau est immense, dans l'agriculture mais aussi dans l'industrie. La ressource est immense également. Le problème quantitatif se posera quand même un jour, dans une vingtaine d'années.
Debré. — Bien avant, dans certaines régions.
Edgar Faure (revenant à la suggestion de Pompidou sur une nouvelle administration d'État). — Une nouvelle administration spécialisée ? Je n'ai pas cette conception. Je ne pense pas qu'il soit nécessaire de dessaisir les ministères compétents ; il suffit de les faire travailler ensemble.
GdG. — Dans un premier temps, en tout cas, le conseil de M. Edgar Faure me paraît sage. Mais il ne faut pas exclure l'étape ultérieure. La préservation de l'eau appelle toute notre vigilance. Peut être sera-t-elle un jour un problème majeur. Ce n'est pas encore le cas. Mais on n'est jamais assez prévoyant. »
Jusqu'au départ du Général, le conseil d'Edgar Faure sera suivi. Mais Georges Pompidou, Président, inventera le ministère de l'Environnement, dont Robert Poujade prendra brillamment la direction. Sur le fond, de Gaulle et Pompidou partageaient le même souci des éléments naturels.
« On n'aurait pas aménagé Paris si Haussmann n'avait pas eu tous les pouvoirs qu'il avait »
Conseil du 27 juillet 1966.
Mais c'est encore de Paris et de sa région qu'il est surtout question. Pas encore sous l'angle de la décentralisation. Il s'agit aujourd'hui de la réorganisation des services de l'État dans la région parisienne. Les débats sont vifs sur le décret que présente Roger Frey. Chacun sait qu'il a été préparé avec le préfet PaulDelouvrier 1 et même par celui-ci, qui a tout le soutien du Général. Frey marque intentionnellement l'étendue des attributions du préfet — veut-il les faire paraître exorbitantes ? « Depuis Haussmann, aucun fonctionnaire n'aura eu entre ses mains autant de pouvoirs. Naturellement, il nous faudra veiller à ce qu'une administration envahissante ne se développe pas autour d'une telle concentration.
Pisani. — L'idée générale reçoit tout mon accord, mais je dois faire part de mes hésitations. Delouvrier était comme un gouverneur général en Algérie. Il sera comme un gouverneur général à Paris.
Marette. — On ne peut mettre de côté la personnalité de M. Delouvrier, et pour ma part je risque d'être dépouillé de mes prérogatives.
Sanguinetti. — Il faut avoir le courage de le dire : c'est le début de l'éclatement du pouvoir central.
Debré. — Le contrôle financier souffre toujours des mesures de déconcentration. Ici, le préfet va bénéficier d'énormes délégations de pouvoirs.
Fouchet. — Je suis à fond contre ce texte. Il est dangereux pour l'État.
(Devant l'attaque vigoureuse qui se développe et que sans doute il n'attendait pas si passionnée, le Premier ministre monte au créneau.)
Pompidou. — Je dois rappeler qu'un texte est nécessaire pour cette énorme région. Sans lui, ce serait l'anarchie. Avec lui, ce n'est pas la dictature ! Entre l'anarchie et la dictature, nous avons cherché une position mesurée. Le préfet n'est qu'un préfet de région ordinaire, avec simplement des pouvoirs renforcés surtout dans le domaine de l'équipement. Comme tous les autres préfets de région, il sera placé sous l'autorité du ministre de
Weitere Kostenlose Bücher