Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
Vom Netzwerk:
commun que pour le couler de l'intérieur. D'ailleurs, les Anglais sérieux reconnaissent que j'avais raison et que l'Angleterre n'était pas faite pour entrer dans le Marché commun.
    AP. — Quand même, depuis Waterloo, nous ne nous sommes heurtés aux Anglais qu'à Fachoda et à Mers-el-Kébir ?
    GdG. — Vous savez, il ne faut pas leur reprocher Mers-el-Kébir. En 40, nous avions une bonne marine. Si elle s'était jointe à la marine allemande, elles auraient pu ensemble, avec la maîtrise de l'air qu'avaient les Allemands, permettre un débarquement de la Wehrmacht, qui n'aurait rien trouvé devant elle. Pas un canon sur la côte. Comment se seraient-ils battus sur leurs collines ? À coups de bâton ? L'affaire aurait été vite réglée. C'est pourquoi Churchill ne pouvait pas accepter la menace que notre flotte faisait peser sur l'Angleterre. C'est comme en 1805. Si notre flotte n'avait pas été battue à Trafalgar, Napoléon aurait débarqué en Angleterre et la question anglaise aurait été résolue pour toujours. Il s'en est fallu de peu, ces deux fois.
    « Pour les Anglais, la maîtrise des mers était la condition de leur survie. La supériorité navale était affaire de vie ou de mort. Nous, au contraire, notre destin était sur le continent. Nous n'avions une flotte que pour la gloire.

    « Il n'est pas acceptable que l'Allemagne ait la bombe atomique »
    AP. — Mais aujourd'hui, bien que les Anglais aient une force de dissuasion nucléaire, nous ne nous sentons pas du tout menacés par elle. Alors que vous ne voudriez pas, malgré la réconciliation franco-allemande, que les Allemands aient la leur ?
    GdG. — Pour la France, il n'est pas acceptable que l'Allemagne ait la bombe atomique. D'ailleurs, il n'est pas non plus dans l'intérêt de la France qu'elle redevienne un État centralisé comme le Reich, ni qu'elle retrouve ses anciennes frontières, ni qu'elle soit réunifiée. Ça nous arrange qu'elle soit coupée en deux, qu'elle soit fédérée en onze Länder, qu'elle soit cantonnée dans les frontières de 1945, qu'elle n'ait qu'une armée conventionnelle. La réunification, nous ne pourrions pas l'empêcher, si un jour les Russescessaient d'y faire obstacle ; et nous n'en aurions pas le droit, puisque c'est dans la nature des choses qu'elle se fasse, à la fin des fins. Mais tant que l'Union soviétique tiendra debout, elle ne voudra pas en entendre parler. En revanche, un armement atomique, nous ne le leur permettrons jamais ! Nous leur rentrerions dans le chou ! Admettre qu'ils se réarment nucléairement, ce serait beaucoup plus grave encore qu'en 36 d'admettre qu'ils occupent la rive gauche du Rhin ! Pour ce peuple guerrier, ce serait une formidable tentation !

    « Ce que nous aurons fait de mieux, ç'a été d'empêcher deux fois la guerre civile »
    « Finalement, ce que nous aurons fait de mieux (il veut dire : " ce que j'ai fait de mieux"), ç' a été d'empêcher deux fois la guerre civile. À la Libération, parce que nous avions devancé les communistes dans la Résistance et que nous avions pu prendre nos précautions pour les neutraliser. Sans quoi, ils se seraient emparés du pays. Ils n'auraient peut-être pas pu conserver le pouvoir très longtemps, mais il aurait fallu un carnage pour le leur arracher. Et en 58 et les années suivantes, la IV e n'aurait pas eu le coffre de bloquer l'armée et de mettre les généraux au clou 1 ... Vous savez, rien ne laisse de traces aussi profondes dans un peuple que les guerres civiles. »
    Il plonge dans un silence profond. Deux fois, trois fois, il veut bien en sortir en rebondissant sur mes questions ou mes répliques ; mais il vient un moment où il faut comprendre que, pour lui comme pour Vigny, « Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse ».
    Le lendemain matin, nous faisons escale en Guadeloupe.

    « Que les Américains se retirent la tête haute, tant qu'ils sont maîtres du terrain »
    Au-dessus de l'Atlantique, 12 septembre 1966.
    Après le décollage de Pointe-à-Pitre, il me fait venir près de lui. « Allez au confessionnal », me dit gaiement Pierre Messmer, qui vient lui-même d'y passer.
    Le Général me demande mes impressions sur le voyage. Je lui dis ma satisfaction, tout ayant marché conformément aux prévisions. Puis je lui retourne la question : « Dans ce tour du monde, qu'est-ce qui vous a paru le plus utile ?
    GdG. — Tout était utile. Djibouti : parce qu'il faut mettre les habitants du

Weitere Kostenlose Bücher