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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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nous empêcher de continuer. »
    Puis le Général disparaît dans sa cabine. Curieusement, il est fort peu expansif le reste du jour, à la différence des deux journées précédentes. Voulait-il exercer sa maîtrise sur lui-même, pour compenser le moment d'exaltation auquel il s'était laissé aller ? Reprendre sa distance par rapport à ceux qui avaient été témoins de cet instant d'abandon ? Ou encore, la certitude d'avoir raison contre tous, que lui avait injectée cette expérience réussie, le faisait-elle remonter sur le pic hautain où il retrouvait son rêve d' orgueil ?
    Il n'est pas sorti de sa cabine, jusqu'au déjeuner. À table, il a été laconique au point que le silence s'appesantissait sur ses invités paralysés. Quand, dans l'après-midi, il est descendu de l'échelle de coupée à Mururoa, la rumeur a vite couru : « Il est d'une humeur massacrante. »

    Alors qu'apparemment, il a toutes les raisons de l'avoir excellente... Pompidou n'a pas tort de dire que le Général est « spécial ».
    Nous nous baignons dans le lagon de Mururoa, dont l'eau ne joue qu'avec le rayonnement du soleil. Histoire de pouvoir le raconter, et d'essayer de dissiper le fantasme des obscurantistes. Mais comment lutter contre des fantasmes ?
    1 « Ni le chef ni l'historien ne se préoccupent des détails. » Au précepte latin bien connu, le Général a ajouté « ni l'historien ».
    2 Voir plus haut, Ire partie, ch. 12, « Vous me voyez installer Mitterrand à Matignon ? »
    3 Ministre d'État chargé des départements et territoires d'outre-mer.

Chapitre 9
    « MURUROA, ÇA RÉCAPITULE TOUT CE QUE NOUS AVONS ESSAYÉ DE FAIRE DEPUIS VINGT-SIX ANS »
    L'après-midi du 11 septembre 1966, nous avons rejoint Hao. Dans la soirée, nous volons en direction des Antilles. Nous voici sur le chemin du retour et c'est à peine si le Général a besoin de questions pour parler.

    Au-dessus du Pacifique, dimanche 11 septembre 1966.
    GdG : « Voyez-vous, l'indépendance nationale, rien ne vaut ça ! Il ne faut pas regretter que nos partenaires aient repoussé le plan Fouchet. Si nous avions dû conférer au préalable avec nos cinq partenaires, sans parler des Anglais, avant de prendre une initiative en politique étrangère, nous n'aurions jamais rien pu faire ! Nous aurions été mis en minorité par les autres à tous les coups. Croyez-vous que nous aurions pu décider de reconnaître la Chine ? On nous aurait démontré qu'il fallait attendre que les États-Unis la reconnaissent d'abord. Croyez-vous que nous aurions pu sortir de l'OTAN ? Que j'aurais pu prononcer le discours de Phnom Penh ? Nous nous serions usés en parlotes. Il y aurait eu des fuites, des pressions des Américains, conjuguées avec celles de nos partenaires. La presse se serait déchaînée contre moi avant que j'aie rien pu faire. Non, non, rien n'est plus précieux que de rester indépendant. La supranationalité, le fédéralisme, toutes les velléités de mise en cause de notre souveraineté, ce sont des menaces contre lesquelles il faut lutter, il faudra sans cesse lutter. »

    « Les Américains sont des Anglais qui ont voulu vivre leur vie quand ils sont devenus grands »
    Nombreux sont les gens qui s'imaginent que nous suivons le Général parce que son prestige nous en impose au point que nous le croyons infaillible. Quelle erreur ! Il n'est pas infaillible. Mais il est original. Il n'énonce rien qui ne soit en conformité avec la cohérence de sa pensée. Il pousse ses idées jusqu'au bout de leur logique. Il les ordonne avec clarté parce qu'il a pris l'habitude de les écrire. Il les impose par la vigueur de son esprit. Il les énonce comme s'il les récitait. Elles acquièrent une force de conviction à laquelle il est difficile de résister. Il sait ce qu'il veut. Chacun, en France, le devine. Et le monde sait ce que veut la France.
    AP : « Si les Anglais entraient dans le Marché commun, nousformerions une coalition plus forte, sans perdre notre indépendance.
    GdG. — Ne croyez pas ça. Entre les Américains et nous, les Anglais se sentiront toujours plus proches des Américains. Les Américains sont des Anglais qui ont voulu vivre leur vie quand ils sont devenus grands. Mais ils restent frères. Les Allemands ne se sont opposés à nous que depuis trois guerres. L'Angleterre, c'est depuis de longs siècles. Elle est plus dangereuse pour nous que l'Allemagne. Les Anglais ne nous ont jamais aimés. Ils ne voulaient entrer dans le Marché

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