C'était de Gaulle - Tome II
n'y vois aucun inconvénient. Il n'y a pas de raison que la situation privilégiée qu'ont les cadres ne soit pas compensée par quelques sacrifices.
« Il faut également faire des économies sur le personnel international ! Pour l'Assemblée parlementaire européenne seulement, il y a 450 fonctionnaires ! Pour l'ONU, pour l'OTAN, pour l'EURATOM, c'est pareil ! Il faut faire entendre notre voix pour réduire ce gaspillage. (Le Général se tourne vers Couve.) C'est scandaleux ! Et ils sont exemptés d'impôts !
« Dans cet effort, il y a solidarité du gouvernement. Je m'en félicite. Je salue le mérite des ministres à se résigner. Tous sont liés par la solidarité. C'est bien l'essentiel par rapport au régime antérieur. »
Quand Rome a parlé, tout le monde se tait. Un silence, puis :
« Eh bien, aujourd'hui commence la bataille. Cet après-midi, le Premier ministre, le ministre des Finances et le ministre de l'Information tiendront ensemble une conférence de presse à Matignon. »
Quant à moi, première nouvelle. Il est vrai que je ne pourrai jouer, à côté des deux ténors, que le rôle de la plante verte. Il se tourne vers moi : « Naturellement, vous ne dites pas un mot de ce chapitre tout à l'heure. »
Après un nouveau silence, il conclut : « Il fallait reprendre les rênes. J'ai voulu que ce soit fait. C'est ce qui est fait. »
Le Général se retrouve chef de guerre. Il a le don d'insuffler la passion du combat. Nous sommes mobilisés pour lutter contre le Mal sous toutes ses formes — les marges des petits commerçants, la roublardise des paysans, le laxisme des administrations, la lâcheté des patrons, la prolifération des fonctionnaires internationaux, le cynisme des Anglo-Saxons, l'arrogance du dollar — et, brochant sur le tout, la psychologie de facilité qui prend sa source dans la prospérité et débouche sur l'inflation.
Chapitre 3
« NOTRE BUT N'EST PAS DE CASSER DES ŒUFS ; MAIS CE QUI EST NÉCESSAIRE EST NÉCESSAIRE »
Au Conseil du 9 octobre 1963, Giscard : « Le plan de stabilisation a un mois d'existence. Pour le budget, l'évolution défavorable persiste. Le découvert dépasse déjà sept milliards, alors qu'en 1962, à la même époque, il n'était que d'un milliard. Mais le blocage des prix est scrupuleusement respecté.
GdG. — Il y a amélioration de la balance des paiements.
Giscard. — Notre préoccupation est l'échelle mobile des salaires. L'indice des prix donnerait une hausse de 3,5 % en année pleine, alors que nous marchions vers 6 %... Il faudrait publier les prix agricoles à bref délai.
Pompidou (sèchement : c'est lui qui est juge de l'opportunité du calendrier). — J'ai suspendu leur publication parce que je rencontre les dirigeants agricoles ce soir. Les prix sortiront après-demain.
Giscard. — Il faut éviter l'aspect théâtral et mettre en place un contrôle très précis. Par exemple, pour les oeufs, les prix à la production ayant baissé, une nouvelle hausse des prix de détail est aberrante. Il faut donc des mesures de taxation et un dispositif répressif. »
GdG conclut : « Ce plan est une opération de grande envergure. C'est seulement dans les mois qui viennent qu'on pourra voir l'effet réel. »
Après le Conseil, le Général me donne l'impression d'être quand même un peu désappointé.
« Si nous n'entraînons pas de baisse, nous devrions du moins provoquer un arrêt de la hausse. Mais dès que nous relâchons notre effort, les forces de hausse l'emportent. C'est toujours la facilité qui gagne. Les augmentations de salaires sont encore accordées dans des proportions excessives ; les patrons n'ont pas encore compris.
« Dites simplement à vos journalistes que les premiers résultats sont encourageants. Ils ne font que confirmer le gouvernement dans sa résolution de poursuivre l'effort. »
Au Conseil du mardi 15 octobre 1963, Giscard fait une longue communication sur la taxation de la viande.
Le Général lui répond : « Vous êtes en plein dans le plan de stabilisation. Il y aura quelques contrecoups inévitables. Notre but n'est pas de casser des œufs ; mais ce qui est nécessaire est nécessaire. Les problèmes sont posés. Il faut s'en tenir aux décisions qui ont été prises, notamment en matière de taxation. Il faut garder le cap avec fermeté et clarté. »
« Si je n'avais pas donné l'impulsion, personne ne l'aurait fait »
Après le Conseil, j'interroge le Général : « Vous avez dit à
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