C'était de Gaulle - Tome II
Avec le concours matériel et technique que nous leur apportons, beaucoup d'entre eux se sont engagés dans cette transformation.
« L'organisation du marché, l'exportation, c'est capital. Ça s'améliore, sans aucun doute, par exemple pour les fruits. Mais pour les artichauts, les choux-fleurs, la viande, ça ne fait que commencer. Enfin, c'est dans la bonne voie.
« Quant au Marché commun, nous l'avons construit avant tout pour y faire entrer l'agriculture. Y arriverons-nous? Je ne peux le dire à ce jour. Mais c'est nous qui l'aurons fait. La masse des paysans le sent très bien. »
« Ces farfelus farfelutent dans tous les sens »
Salon doré, 15 septembre 1965.
Les syndicats agricoles ne trouvent guère crédit auprès de lui. En pleine crise du Marché commun agricole, il m'en fait le sombre tableau :
« Ces syndicalistes, il y en a de deux sortes. Il y a les gens qui avaient organisé la corporation agricole sous Vichy. Ce sont des richards qui considèrent que l'État est fait pour les enrichir encore.Pour eux, il n'y a qu'une question, le prix du blé, le prix de la betterave; et pas d'impôts pour les agriculteurs. Alors, ils ameutent l'opinion publique, en mettant les pleins feux sur la misère du pauvre diable de la Creuse, pour que l'État les arrose, eux. C'est une espèce méprisable. Alors évidemment, ils sont pleins de haine pour moi et pour la V e République, parce qu'ils n'y tiennent plus les leviers de commande qu'ils avaient jusqu'à présent, et qu'on ne fait plus leurs quatre volontés.
« La deuxième catégorie, ce sont les farfelus, les gens de la Fédération des exploitations agricoles. Ces farfelus farfelutent dans tous les sens, sans jamais rien réaliser. C'est ça que je leur reproche en pleine figure, quand je les rencontre : " Vous n'aidez en rien l'agriculture à s'organiser; ça ne vous intéresse pas. Vous ne faites que de la démagogie." Rien n'empêchera qu'ils restent farfelus.
AP. — Sauf s'ils se tournent vers l'organisation moderne de l'agriculture.
GdG. — Mais ils ne se tourneront pas ! Ce genre de bonshommes n'ont jamais organisé quoi que ce soit. C'est des types qui courent partout, qui essaient de passer par les portes fermées et qui ne passent pas quand la porte est ouverte. Ils mettent l'envers à l'endroit. Ils veulent que le noir soit blanc.
AP. — Les jeunes agriculteurs semblent avoir compris que le sort de notre agriculture se jouait à Bruxelles sur votre fermeté.
GdG. — Oui, ceux-là, on dirait qu'ils ont compris. »
LA SOCIÉTÉ INDUSTRIELLE : ENTREPRENDRE
1 Société d'aménagement foncier et d'équipement rural.
2 Il a fallu la crise de « la vache folle » pour qu'on remette sérieusement en vigueur ces prescriptions, après 33 ans.
3 Salaire minimum interprofessionnel garanti et Salaire minimum agricole garanti.
Chapitre 11
« EN FRANCE, IL FAUT ÊTRE L'ÉTAT POUR ENTREPRENDRE DE GRANDES CHOSES »
Après le Conseil du 8 mai 1963, je demande au Général ce qu'il pense de la proposition de Bokanowski, selon lequel « il faut faire un redressement psychologique après le retrait de l'Algérie, donner aux Français des compensations d'ordre moral. Il faudrait relancer l'auto de course, en construisant un modèle capable de devenir n° 1 mondial. Ce serait extraordinaire pour l'orgueil national ».
GdG : « Je n'ai rien contre l'auto de course et je m'efforce de redonner aux Français l'orgueil de la France. Mais je ne sais pas si la première est nécessaire au second. Je crois que d'avoir un armement qui assure notre indépendance, d'avoir des performances économiques qui sont enviées par nos voisins, de pouvoir dire "zut" aux Anglais et aux Américains, c'est plus important pour l'orgueil national que de fabriquer des autos de course. Mais je veux bien qu'on en fabrique. Je me demande même pourquoi on n'est pas foutu de le faire. Vous voyez bien, rien d'important ne peut se faire en France, si ce n'est pas l'État qui en prend l'initiative.
(Il m'interpelle, parce qu'il commence à connaître ma prévention contre l'étatisme. C'est m'inviter à prolonger sur ce thème.)
« Les entrepreneurs n'entreprennent pas »
AP. — N'est-ce pas un cercle vicieux? Parce que nous avons été habitués, depuis Colbert et peut-être Philippe le Bel, à ce que rien d'important ne se fasse sans que l'État le décide, nous sommes devenus de plus en plus dépendants de lui.
GdG. — Eh bien oui, c'est la situation où nous sommes. Il
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