C'était de Gaulle - Tome II
pas, ils veulent tous être Président. Je suis obligé de les mettre en prison, pour leur permettre d'attendre la place paisiblement. »
Triboulet sait raconter une histoire : hilarité générale. Même de Gaulle laisse tomber son masque d'impassibilité. Lui qui rit souvent en tête à tête, il se surveille en Conseil.
Au Conseil du 6 mars 1963, Habib-Deloncle décrit les suites de l'assassinat de Sylvanus Olympio au Togo. Une intervention militaire serait projetée, avec le concours du Nigeria, pour châtier les putschistes.
GdG : « Houphouët, Senghor et les autres ont tous le complexe du futur Président assassiné et ne pensent qu'à châtier les assassins. Une intervention militaire ? C'est toujours aléatoire et dangereux. Une guerre, on sait comment ça commence, on ne sait jamais comment ça finit. Il peut y avoir un effet d'entraînement. Entraîner la Nigeria (sic), c'est installer les Anglais à Cotonou et à Lomé. La crainte que chaque chef d'État éprouve pour ses propres troupes ne fera que s'accentuer ! Elles rechercheront les citations, les croix de guerre, l'augmentation de la solde ! Si la Nigeria entre dans une guerre, le Ghana s'y mettra ! Puis l'ONU, c'est-à-dire les Américains ! Puis l'URSS ! Ce serait désastreux. Ça n'aurait pas de limite. C'est particulièrement dangereux pour l'Afrique francophone. Il faut nous y opposer absolument ! »
« Nous avons plusieurs enfants chéris »
Au Conseil du 6 mars 1963, Triboulet rend compte de son voyage à Madagascar : « Tsiranana 4 , qui se sent menacé par son armée, réclame à cor et à cri des moyens pour l'agrandir, mais en nous priant secrètement de ne pas les lui accorder, de manière à pouvoir dire que nous refusons... Mais il nous demande un effort exceptionnel de coopération.
GdG. —Tous veulent être exceptionnels ! Nous avons beaucoup d'enfants chéris. Que feraient-ils tous sans nous ? Seulement, si nous en faisons trop, ils ne nous le pardonneront pas. Et si nous n'en faisons pas assez, non plus. »
« Des colons qui pressurent le pays et en drainent les richesses »
Au Conseil du 17 avril 1963, Habib-Deloncle revient d'une tournée en Afrique : « La République de Centre-Afrique ne s'est pas remise du choc provoqué par l'annulation du voyage que Foccart devait y faire...
(Habib m'explique qu'on le considère comme un secrétaire d'Etat parmi d'autres, tandis que Foccart est, pour les Africains, le bras droit de De Gaulle, presque de Gaulle lui-même.)
« ...La colonisation n'y a pas le caractère fraternel qu'elle a dans les autres territoires. Certains Français conservent un comportement désagréable.
GdG. — Il y a à Bangui et aussi à Brazzaville des types insupportables, ce qui en général n'est pas le cas ailleurs. Ce sont des colons qui ne réinvestissent pas sur place leurs bénéfices, qui pressurent le pays et qui en drainent les richesses. Les autochtones ne les supportent pas et ils ont raison.
Habib-Deloncle. — Le gouvernement de Centre-Afrique nous demande de le soutenir contre ces mauvais Français. On a confiance en la France, parce que c'est la France du général de Gaulle. »
Les « vieux-gaullistes », comme Triboulet, Maziol, Marette, Boulin 5 , Habib, terminent leurs interventions par un hymne à de Gaulle. Les membres du gouvernement d'autre origine, soit politique comme Giscard, Broglie, Marcellin, Pisani, soit administrative, comme Joxe, Couve, Messmer ou Sudreau, trouveraient déplacé de faire un coup de chapeau au Général. Ainsi des hauts mandarins de la Chine impériale : ceux de l'ethnie de l'Empereur mandchou revendiquaient d'être ses esclaves ; les autres Chinois ne se disaient que ses serviteurs.
« Sékou Touré revient de loin »
Au Conseil du 15 mai 1963, Couve : « Les Guinéens insistent sur leur désir de rétablir de bonnes relations avec la France.
GdG. — J'ai reçu par la poste une lettre de Sékou Touré à mon adresse à Colombey, où il pense peut-être que je réside en permanence. Il est chaleureux, ardent, débordant du désir de relations particulièrement étroites et cordiales.
Pisani. — La radio annonce qu'il vous a invité en Guinée.
GdG. — II ne suffit pas de l'annoncer pour que j'y aille. Je suis allé à Conakry en 58. En cinq ans, l'expérience semble avoir ouvert les yeux de Sékou Touré. Mais ne nous précipitons pas. Son chemin est la démonstration par l'absurde des bienfaits de la coopération. »
Au Conseil du 22 mai
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