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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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d’autre à dire que ces mots :
    — Est-ce que vous volez ?
    — Non, répond la petite. Et vous ?
    Lindbergh devait confier plus tard que c’est à cause de cette réponse qu’il décida d’épouser Anne Morrow. Quand on annonça leur mariage, ils avaient respectivement vingt-six et vingt-deux ans. On sut qu’ils étaient fort amoureux l’un de l’autre et il n’y eut que les jaloux pour ne pas frissonner d’aise. Les mêmes jaloux ne se gênèrent pas pour signaler que le père de la mariée jouissait d’une fortune considérable. Les autres répliquèrent que cela ne gâtait rien et que Lindbergh, nommé conseiller technique de deux puissantes compagnies aéronautiques américaines, n’avait de toute façon besoin de quiconque pour vivre à l’abri du besoin.
    D’Anne Lindbergh, la princesse Bibesco a dit joliment : « Elle est entrée en religion avec lui  (48) . » Il sembla en effet qu’en se mariant avec Lindbergh, Anne Morrow avait épousé aussi cette aviation sans laquelle la vie de Charles n’aurait comporté aucun sens. Elle fut désormais de tous ses voyages, de toutes ses recherches. Elle travailla avec lui. Ils étaient deux, ils ne furent plus qu’un. Quand elle se mit à écrire, ce fut d’abord pour parler de son mari. Elle avait appris à piloter mais, quand son mari était aux commandes, elle refusait de prendre sa place. Elle ne s’y décidait que lorsqu’il avait besoin lui-même de s’occuper de quelque détail ou de prendre des photographies. Avec cela, ne manquant pas d’esprit. Quand Lindbergh atterrit au Kamtchatka, les Russes demandèrent à Anne quelle était sa profession. Elle répondit :
    — Heu… mariée !
    C’était au cours d’un périple devenu fameux qui les avait d’abord conduits en Alaska, au Kamtchatka, au Japon, en Chine enfin. Après quoi, ils s’étaient hâtés vers l’Amérique. Anne venait d’apprendre la mort de son père. Elle voulait le pleurer dans les bras de sa mère. En même temps, elle désirait passionnément retrouver son petit garçon, Charles Jr., né un an après leur mariage, et qu’elle avait confié à ses parents avant le grand voyage.
    Anne s’émerveilla de le voir trotter et tenter de prononcer quelques mots. Elle jugea qu’il était le plus bel enfant de la terre. Elle ne réagissait pas différemment de toutes les autres mères. Le certain, c’est que Charles était vraiment un beau petit garçon.
     
    Au cours de ses vols postaux survolant le New Jersey, Lindbergh avait aperçu naguère un site qui l’avait enchanté. Lui et Anne souhaitaient posséder une demeure bien à eux. Ils achetèrent un terrain dans une région, les Sourland Mountains, où ne vivaient guère que des bûcherons. Au lieu-dit East Amwell, près du bourg de Hopewell, ils firent construire une vaste maison, plus confortable que belle. Les fonctions de Lindbergh le retenaient à New York pendant la semaine. Ils habitaient chez la mère d’Anne, Mrs. Dwight Morrow, dans sa propriété d’Englewood. À chaque fin de semaine, ils retrouvaient avec bonheur « leur » maison.
    Bien sûr, le petit Charles était chaque fois du voyage. Au dernier week-end de février 1932, le bébé était enrhumé. En plein accord avec Charles, Anne décida de rester un ou deux jours de plus à Hopewell.
    La nurse, Betty Gow, avait été engagée quelques mois après la naissance de Charles Jr. Elle avait vingt-sept ans. En général, les Lindbergh ne l’emmenaient pas à Hopewell pendant le week-end car Anne préférait s’occuper elle-même du bébé. Pourtant, ce matin-là, mardi 1 er mars 1932, Anne avait appelé la nurse chez sa mère et l’avait priée de les rejoindre à Hopewell. Betty n’avait pas eu de mal à se faire conduire en voiture par l’un des domestiques : la mère d’Anne n’en employait pas moins de vingt-neuf.
    À Hopewell, Betty avait été accueillie par le maître d’hôtel et la femme de chambre, un couple d’origine écossaise, les Whatley. Ce soir-là, Betty se chargea du dîner de Charles Jr. Il ne se fit aucunement prier pour absorber les céréales dont, à l’époque, on croyait bon de gaver les petits enfants.
    Anne rejoignit Betty et elles déshabillèrent le bébé pour lui passer ses vêtements de nuit. Le médecin avait prescrit un laxatif, considéré comme adjuvant au traitement du rhume. Betty glissa dans la bouche de l’enfant une cuillerée de ce médicament. Charles Jr. manifesta son opposition

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