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Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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Florence et
ses habitants. J’ai hâte de savoir ce que tu fais ici.
    — J’allais te poser la question, même si j’ai mon idée
à ce sujet ! Les Génois commercent depuis si longtemps avec cette ville
qu’ils y ont leur propre quartier. Sans doute est-ce là que tu vis quand tu ne
t’égares pas dans la Judaria…
    Cristovao se raidit imperceptiblement. Sous ses dehors
affables, Meshoullam de Volterra lui signifiait qu’il croyait à moitié à son
histoire. Il préféra détourner la conversation :
    — Tes frères sont-ils heureux ici ?
    — Assez pour qu’un Chrétien passe la nuit chez
eux ! Plus sérieusement, ils sont installés ici depuis des siècles et
plusieurs d’entre eux occupent d’importantes charges à la cour. Leur communauté
est dirigée par un Rabbi Mor et des ouvidores, des auditeurs, sont
chargés de rendre la justice. Ils ont leurs propres collecteurs d’impôts car
ils paient de lourdes taxes, qui ont d’ailleurs tendance à se multiplier ces
derniers temps…
    — Comment cela se fait-il ?
    — Un souverain avait jadis contraint mes
coreligionnaires à pourvoir à l’entretien des animaux de sa ménagerie,
installée en contrebas du château Saint-Georges. Ce n’était guère onéreux. Mais
tout a changé depuis que les navires portugais rapportent des côtes d’Afrique
d’étranges animaux qu’il leur faut nourrir à grands frais. Fort heureusement,
ainsi que le disent nos sages, le Saint Béni Soit-Il donne à la fois le mal et
le remède.
    — De quelle manière ?
    — La plupart des Juifs sont employés au port. Les uns
rangent les planches destinées à construire les navires, les autres tressent
les cordes et tissent les voiles. Quelques-uns enfin ont pour mission
d’installer sur les bateaux les pièces d’artillerie fabriquées par leurs soins.
Tous vivent de la mer et n’ont qu’à se féliciter de son essor.
    Cristovao avait attentivement écouté les explications du
marchand florentin. Se lier avec un Juif préposé au ravitaillement de la ménagerie,
voilà qui lui permettrait de s’introduire aisément à la cour sans être astreint
à de longues et humiliantes démarches. Il y avait là une piste à suivre. Il se
montra donc particulièrement de bonne composition avec Meshoullam, faisant mine
de s’intéresser à tout ce qu’il disait. Il lui fallait s’en faire un ami. Ce
fut le cœur léger et joyeux qu’il quitta le lendemain, dès l’ouverture des
portes, la Judaria, la tête bouillonnante de projets.
     
    *
     
    Depuis son arrivée à Lisbonne, Bartolomeo se sentait espionné.
Il aurait été bien incapable de dire qui, parmi ses compagnons, surveillait ses
faits et gestes. Ses doutes avaient surgi quand il avait aperçu, de loin, une
ombre sortir de la soupente où il dormait. Le coffre où il rangeait ses
modestes affaires avait été fouillé. Il s’était ouvert de cet incident auprès
de son aîné qui l’avait rabroué en s’esclaffant. Ce n’était pas pour entendre
de telles fadaises qu’il l’avait emmené avec lui au Portugal. Il ferait mieux
de saisir au vol les conversations entre mestre Estevao et ses clients
habituels, des armateurs et des capitaines de navires qu’il fournissait en
cartes et portulans sortis de ses ateliers.
    D’origine génoise, le cartographe vivait dans le quartier de
Pedreira, majoritairement habité par ses compatriotes. Les nouveaux venus
étaient assurés d’y trouver le gîte et le couvert ainsi qu’un emploi pourvu
qu’ils fussent bons travailleurs. C’était là que Stefano Repagno avait débuté
avant de faire fortune et d’exiger qu’on l’appelât désormais mestre Estevao.
Fidèle à la tradition, il continuait à accueillir des apprentis venus de
Ligurie et avait engagé Bartolomeo après que celui-ci lui eut prouvé qu’il
était bon calligraphe. Depuis, du matin au soir, six jours sur sept, le garçon
recopiait avec application sur des portulans les légendes rédigées par le
cartographe. Le dimanche, celui-ci exigeait de ses apprentis qu’ils assistent
avec lui à la sainte messe en la cathédrale. À l’issue de l’office divin, ils
revenaient dans son atelier où il inspectait leurs coffres et leurs écritoires.
En fin de journée, il consentait à relâcher sa surveillance et les autorisait à
se promener en ville tout en les mettant en garde contre le danger de
fréquenter les tavernes.
    Pour Bartolomeo, cette escapade était l’occasion de retrouver
son

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