Chronique de mon erreur judiciaire
tout, ma femme n’est-elle pas infirmière ?
Surgissent aussi une revue pornographique et un vieux catalogue de jeux Playmobil. Des pièces saisies par les policiers, apparemment satisfaits de ces découvertes qui semblent pour eux avoir un sens. Je suppose que le catalogue de jouets a été caché par mon épouse pour compléter la collection des enfants au moment des fêtes. Quant à la revue pornographique, il s’agit d’un achat, pas de bon goût je l’admets, destiné à saluer le départ de sa sœur en Bretagne : ma femme prévoyait en effet de confectionner un pêle-mêle garni d’images de « beaux étalons » pour elle, comme cadeau gag. Finalement, les images nous ayant semblé trop osées, nous avions abandonné l’idée et sans doute Odile avait-elle oublié de jeter la revue. Et puis, après tout, ce journal étant en vente en kiosque, pourquoi en détenir un exemplaire se révélerait-il répréhensible ou prouverait-il quoi que ce soit ?
Après la chambre, les policiers investissent la salle de bains, puis la lingerie. Là, ils mettent à jour, cachées dans du linge, une cassette vidéo et une cassette audio. L’enquêteur ayant fait cette découverte appelle ses collègues qui me demandent ce qu’elles contiennent. Je n’en sais à nouveau rien, puisqu’il s’agit d’une cachette de ma petite femme : Odile a la manie de conserver ce que l’on jette. Cette fois, ils sont persuadés d’avoir décroché le pompon ! Mais quand ils visionnent le film, la désillusion se lit sur leurs visages. Il s’agit d’une cassette de foot, le match France-Brésil. Leur déception est palpable. Policiers et juge espèrent beaucoup de l’autre cassette, audio celle-là.
Le problème, c’est que le seul lecteur de cassettes des lieux se trouve dans ma voiture. Deux policiers m’y accompagnent, tandis que le magistrat et le reste de la troupe m’attendent sur le pas-de-porte de la cuisine. La surprise est à nouveau de taille, puisqu’ils entendent… la musique de notre mariage ! Là encore, leur enthousiasme faiblit.
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Dans la lingerie, je les vois ravis de trouver des préservatifs dont le juge ordonne aussitôt la saisie. Sur le moment, je m’interroge quant à cette découverte. À quoi peuvent-ils servir puisque Odile porte un stérilet ? J’apprendrai plus tard que ma femme tenait ces capotes du lycée où elle travaillait.
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Dehors, un policier reste en faction pour interdire l’accès à tout visiteur. À l’intérieur, mon téléphone ne cesse de retentir, mais on m’a interdit de répondre. La jeune fille engagée par Odile pour s’occuper des enfants se voit refoulée et ma comptable, inquiète de ne pas me voir à l’Étude et de n’avoir pu me joindre, chassée sans explications. En revanche, Jean-Pierre Bavière, président de la chambre régionale des huissiers de justice du Pas-de-Calais, arrive sur les lieux et assiste à la perquisition.
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Retour à l’étage. La visite se poursuit dans les chambres de Thomas, Sébastien et Cécile, puis dans la chambre d’amis, meublée de lits superposés et d’une armoire, et qui sert surtout de seconde salle de jeux. Les trois placards du couloir de distribution sont également fouillés sans que rien ne soit évidemment remis ensuite à sa place.
La perquisition au bureau est plus longue ; le juge ordonne la saisie de l’unité centrale de l’ordinateur, des CD-ROM – ce sont des jeux gravés – et des disquettes trouvées au fond d’un tiroir. J’ignore leur existence mais sans doute en avons-nous hérité à l’achat du PC. Un des policiers précise qu’elles sont vierges, mais le magistrat insiste pour les emporter ! Enfin, nous nous rendons dans l’autre chambre d’amis, quasiment vide, avec seulement un vieux sommier posé à même le sol.
En voyant la trappe qui mène aux combles, condamnée et calfeutrée, le juge demande ce qu’il y a à l’intérieur. Comme je lui réponds qu’il y a juste de la laine de verre posée sur le sol, il ordonne son ouverture. Je le sens très intrigué, voire content de sa perspicacité. Un policier commis arrache le papier isolant, puis enlève les vis avec bien des difficultés. L’intérieur étant évidemment vide, la déception se lit à nouveau sur le visage du magistrat qui tourne les talons. Quant à la trappe, personne ne la remet, bien sûr. La visite des dépendances et du second étage se fait à la même allure, une course folle qui fait
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