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Chronique d'un chateau hante

Chronique d'un chateau hante

Titel: Chronique d'un chateau hante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Magnan
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ans
d’existence.
    Le manoir
au pied paraissait petit.
    « Qu’est-ce
que je vais leur dire ? » ruminait le Mèche qui n’avait rien préparé.
    Un coq
strida et il parut au visiteur qu’il s’égosillait au milieu d’un étrange vide.
Il appela :
    — Oh
la maison !
    Le
silence qui retomba après son cri lui parut solennel. Il s’approcha. Le courtil
était désert. Çà et là, les poules caquetantes qui estarpaient semblaient
attendre leur pitance. Le gros de leur troupe s’était rassemblé devant le seuil
et y caquetait ferme, en un murmure réprobateur.
    Le
portail à deux battants était grand ouvert. Un volet à l’étage claquait au vent
nouveau.
    Le Mèche
fut arrêté par un couple de morts enlacé sur la courtepointe d’un lit bas à
l’étage, mais il avait déjà enjambé le corps de l’héritier des Provenchères,
Anne. Vêtu d’un pourpoint écarlate, celui-ci devait partir pour le bal lorsque
cette peste mal définie, et dont on ne sut jamais le nom tant elle fut locale et
de peu d’importance, l’avait terrassé, descendant l’escalier.
    Le Mèche
n’en croyait pas ses yeux. Le mot « poussière » était le seul que
formât son cerveau incrédule.
    « Le
voici donc, se disait-il, cet héritier mâle qui a fait envoyer sa sœur au
couvent, et maintenant il n’est plus rien et elle est tout. »
    Il ne
s’attarda pas à cette idée. Cette soudaine flambée de peste sur le pays de
Forcalquier que rien ne laissait prévoir le jetait dans une inquiétude
terrible. Il n’y avait pas de raison pour que sa propre demeure en territoire
de Lincel en fût épargnée. Il revint presque au pas de course vers son bien.
    Il croisa
Tancrède qui allait chasser à la sauvagine. Il fut soulagé.
    — Mais
suis-moi, dit-il en lui racontant l’histoire. J’ai peur pour Julie.
    Ils la
trouvèrent battoir à la main devant la surverse du puits, qui coulait une
lessive. Ils s’accueillirent les uns les autres à grands cris de joie. Ce
n’était pas la peine de tergiverser.
    — Je
ne sais pas comment tu vas prendre ça, commença le Mèche les yeux baissés, mais
ton père, ta mère et ton frère, je les ai tous trouvés morts.
    Julie
sans réfléchir entreprit une gigue de joie vite jugulée par son âme chrétienne,
mais qui n’en avait pas moins spontanément éclaté.
    Les
Provenchères tout entiers étaient rayés du monde des vivants. Il n’en restait
que cette fillette solide, apte à tous les travaux de la terre et qui ne serait
pas de trop pour être ménagère des champs, par les temps qu’on traversait.
    Elle dit,
dès qu’elle apprit la nouvelle, à Tancrède horrifié :
    — Je
veux t’épouser !
    — Mais
tu n’as que quatorze ans !
    — Et
alors ? Regarde mes parents ! Ils avaient quarante ans tous les deux.
À peine ! Mon frère en avait dix-huit. Par les temps qui courent on peut
mourir demain. On peut ne pas avoir le temps d’assurer notre postérité !
    — Mais
mon père est ton vassal !
    Julie
balaya l’objection.
    — Tu
seras comte Pons de Gaussan ! C’est mon deuxième titre ! Je le veux.
Beau-papa, dit-elle au Mèche, vous allez vous mettre en quête d’un
tabellion ! Il faut que Tancrède et moi on se marie.
    — Mais !
s’écria Tancrède.
    — Pourquoi ?
Je ne te plais pas ?
    Elle
saisit un couteau de vénerie qui traînait sur la table. D’un seul geste, elle
fendit sa robe de nonne et le cilice de sévérité qui gardait sa sagesse. Sa
beauté du diable apparut blanche et sans défaut des pieds à la tête, avec la
plus belle tentation callipyge qui se puisse imaginer et des seins en point et
virgule qui dardaient glorieux vers le plafond.
    Tancrède
devint cramoisi. Le Mèche se voila la face.
    — Va
vite chercher une robe de ta mère ! dit-il.
    Il avait
encore en mémoire le corps superbe de la Clairance qu’il n’osait pas toucher
autrefois. Il ajouta.
    — Elles
doivent toutes convenir !
    Lorsqu’elle
se montra en futaine grise et qu’elle eut dénoué la moisson blonde de sa
chevelure, sous le serre-malice des clarisses, le Mèche s’enquit :
    — Mais
tu dois bien avoir une parentèle ?
    La nonne
secoua la tête.
    — Non !
Ma mère était une Pons de Gaussan, fille unique, et mon père de Provenchères
n’avait ni frère ni sœur. Trouvez un notaire et cherchez bien. Je suis
héritière du titre des deux côtés !
    Maître
Chalgrin était le seul notaire que la peste, la famine et les malheurs

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